Accent
Support auditif permettant d'identifier sans trop de problèmes l'origine ethnique ou nationale d'un personnage.
Les accents au cinéma peuvent être divisés en trois catégories:
- L'accent réel ou bien imité.
Il s'agit du cas où l'acteur et / ou le doubleur possède réellement l'accent de ses origines, ou est capable de l'imiter convenablement sans tomber dans les stéréotypes et la caricature éculée. Ainsi, l'accent espagnol pour Victoria Abril ou de Sergi Lopez, italien pour Roberto Begnini, vietnamien pour le commissaire Van Loc, ou encore québécois pour Donald Pilon, sont bien les leurs et ne choquent pas outre mesure l'auditeur (enfin, parfois, si, mais pas pour les mêmes raisons...). Dans un registre différents, certains acteurs ou doubleurs sont capables de produire un accent étranger relativement naturel et crédible, qui ne sombre pas dans les tréfonds de l'imitation bas-de-gamme pour fin de banquet trop arrosé (Roger Carel, très crédible en italien dans "le coup du parapluie" par exemple).
- L'accent ultra référentiel ou mal imité.
Pour des raisons diverses, allant de la médiocrité de l'acteur (ou du doubleur) à la volonté délibérée de tomber dans le cliché éculé, en passant par le je-m'en-foutisme total, l'accent étranger est imité de manière grotesquement caricaturale, mais reste néanmoins identifiable, car généralement rehaussé d'expressions, d'idiosyncrasies et autres interjections qui se veulent "typiques" de la culture locale et dont l'acteur se sert jusqu'à plus soif pour bien faire comprendre au spectateur quel accent il imite (car, en réalité, un allemand qui s'exprime en français ne se sent pas obligés de placer un "Ja"/[i] ou un [i]"Ach" tous les deux mots lorsqu'il parle. De même, un mexicain ne commence pas systématiquement ses phrases par "Caramba" ou "Madre de Dios"... etc. ad nauseam).
Quelques règles générales concernant les accents ultra référentiels:
• L'accent anglo-saxon. Il consiste essentiellement à remplacer les sons "r" par des sons "w", et les sons "u" par des sons "iou". Pour plus de crédibilité nanarde, vous pouvez optionnellement choisir de substituer au phonèmes "è", "ê" ou "ai", un "é" de circonstance. Petites subtilités: si l'accent est spécifiquement britannique, ne jamais hésiter à placer un "Gosh", "God dammit" ou encore "Good Lord" en début de phrase pour identifier clairement l'origine nationale. En cas d'imitation de l'accent américain, remplacez les interjections ci-dessus par quelques "fucking" qui sonnent toujours plus authentiques. (Plus rare: en cas d'interlocuteur australien, le "fucking" a tendance à se prononcer "bloody".)
Exemple: "Oh Lord ! God dammit ! Vous autwes lé fwançé, n'avez aucioune coultioure !"
Exemple bis: "Oh Fuck ! Fucking Jesus ! Vous autwes lé fucking fwançé, n'avez aucioune fucking coultioure !"
• L'accent africain . Popularisé par le talentueux Michel Leeb, cet accent est l'un des plus simples à imiter. Il suffit juste de remplacer les phonèmes "r" par des "w" de circonstances. (Attention, cette règle ne vaut qu'à l'oral ! A l'écrit, on préférera remplacer ce son par une apostrophe.) Quelques interjections faciles à retenir afin d'authentifier d'avantage le discours: "Bwana", "Mon fwèwe", "Missié", ou encore "Là, di'don". Pour les plus perfectionnistes - ou les plus pervers - l'usage du "petit nègre" (qui consiste à ne pas conjuguer les verbes dans la phrase ) est évidemment recommandé.
Exemple: "Moi pas sa'oi' où êt'e le t'éso' pe'du du 'oi Salomon, bwana ! Moi te di'e la vé'ité, missié gentil blanc ! Te''itoi'e sac'é êt'e tabou ! Olala, là di'don mon f'è'e!"
• L'accent hispanique. Aaaah! Le monde hispanophone ! Sa samba, Sa salsa, ses mojitos, ses tapas, ses fajitas, ses trafiquants de drogue colombiens et ses gangs portoricains qui se trimballent en bandana rouge ! Ici, pas de complexité inutile: le son "u" devient "ou", les "e" se transforment en "é" et les "j" en "y". C'est l'un des accents étrangers les plus résolument simples à utiliser pour un doubleur fatigué ou pas doué. Quelques expressions typiques: "caramba", "madre de dios", "hijo de puta", etc.
Exemple: "Caramba ! Yé vé té fairé la peau, sale hijo de puta dé americanos !"
• L'accent italien. Grosso modo, c'est la même chose que l'accent hispanique. Qui l'eût cru? Une petite subtilité subsiste néanmoins: en cas d'italien "typique", les phrases sont hachées, ultra-rapides et nécessitent le recours extra-linguistique aux mains de l'acteur qui doivent énormément s'agiter pour ponctuer le discours. En revanche, en cas de Parrain de la Mafia, la voix doit venir du fond de la gorge et se perdre dans un souffle. Une patate chaude placée dans chaque joue est un plus incontournable. Idiosyncrasies typiques: "Mamma Mia", "Ma", "Ma que", "Perche?"... Attention ! L'accent ne suffit pas toujours ! Le discours italien nanar exige, en plus de l'accent, de fréquentes allusions à la mère du personnage, ainsi que l'utilisation systématique d'un sabir franco-italien qui fait "vrai".
Exemple: "Mamma mia ! Ellé sont pas bonné mes pasta? Ma que? Ma, cé lé pasta qué ma Mamma, ellé m'a appris à fairé ! Tu traité ma Mamma dé puta? E Perche?"
Exemple bis: "Ma, molto perdoni, Parrain, ma jé crois qué Don Gio é Dragonné, il a trahi la famiglia..."
• L'accent asiatique. Assez basique également, il suffit de remplacer les sons "r" par des "l", et le tout est joué. Voilà des Chinois plus vrais que nature. Ne pas négliger, par contre, de faire de fréquents débordements syntaxiques à base de proverbes abscons et de citations pseudo-philosophiques.
Exemple: "Le petit singe est bien impludent de venil dans la tanièle du Dlagon ! Tu vas subil le coulloux du Clan des Ninja Warriols, chien d'étlanger !"
• L'accent allemand. Que serait un bon film traitant de la Deuxième Guerre Mondiale sans méchants nazis, je vous le demande? Mais attention, se contenter d'un grand blond aux yeux bleus en uniforme ne suffit pas à faire un terrifiant SS. D'une part parce que l'acteur n'est peut être pas blond aux yeux bleus, et ensuite, parce que s'il se met à parler avec l'accent italien, américain ou philippin, la crédibilité du film en prendra un coup (déjà que...). Or, l'officier allemand, se doit de parler avec un accent purement teuton.
L'accent allemand s'obtient en produisant des sons gutturaux venus du fond de la gorge, en remplaçant les sons "t" par "d" (et inversement), les sons "s" deviennent des "z", les phonèmes "v" se transforment en "f", et les "g" en "k". Pour la crédibilité, il est utile de replacer quelques interjections typiques dans la phrase, telles que "Ach", "Ja", "Jawohl". Faites également précéder la plupart des noms communs par leurs articles en allemand ("Der", "Die", "Das", inutile toutefois de se soucier des conjugaisons réelles. Ça passe tout seul.)
Exemple: Ach ! Herr Doktor ! Guand ch'aurai mis au boint mein rayon lasser, blus rien ne m'embêchera de defenir der Baîdre du Bonde ! Ach !
• L'accent russe. Elément indispensable de tout film reaganien qui se respecte, l'accent russe fait partie des plus complexes à imiter. Il tourne essentiellement autour d'une solide dose de roulements de "r", sans pour autant en arriver à produire un son "l". Par ailleurs, il est bien connu que le russe est incapable de conjuguer des verbes. La difficulté ici, consiste à ne pas tomber dans les dérives de l'accent "petit nègre". Pas facile ! Ne pas hésiter, pour plus de crédibilité, à utiliser des termes issus du vocabulaire politique marxiste traditionnel. ("Sale Capitaliste", "Camarade", "Vil exploiteur du peuple" etc....)
Exemple: "Tu devoirrrrrr signer cette lettrrrrrrrrrrre qui prrrrrrrrouve que tu rrrrrrreconnais n'êtrrrrrrre qu'un sale capitaliste exploiteurrrrrr du prrrrolétarriat, chien d'Amérrrrrricain. Toi le fairrrrrre tout de suite, Camarrrrrade !"
- L'accent portenawaque.
Ici, on commence à tomber dans les tréfonds du n'importe quoi. Soit l'acteur ne sait clairement pas imiter l'accent concerné, soit il s'en fout complètement. Degré zéro de l'imitation, l'accent portenawaque peut s'exprimer de plusieurs façons: accent qui ne ressemble à rien (Michel Galabru imitant l'accent allemand dans "Le Führer en Folie"), interversions d'accents entre plusieurs protagonistes (l'accent anglais qui devient subitement asiatique dans le doublage de la "Résurrection du Dragon"), melting-pot auditif (l'accent "italien" du "Parrain" de la "Résurrection du Dragon" qui hésite entre l'accent espagnol, toulousain et marseillais) et mauvais copiage éhonté (Didier Gustin imitant Patrick Sébastien imitant Yves Lecoq imitant la voix de Miterrand dans "Opération Corned Beef").
_________________ "Franchement, est-ce que j'ai une tête à avoir tué 33 personnes? Non. Tout ce qu'on peut me reprocher, c'est d'avoir ouvert un cimetière sans licence!"
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