mouais, j'ai d'abord complètement adhéré à l'analyse de Raskolnikov, puis mon enthousiasme s'est un peu émoussé au fil des relectures.
sur le fond, je trouve ton analyse très intéressante, mais il ne faut pas oublier que le film date de 1978, et que le mouvement hippie a pris du plomb dans l'aile depuis 10 ans déjà, le concert des Stones à Altamont qui marque le commencement de la fin, datant de 1969.
or quand on est aussi peu précurseur il y a fort à parier que d'autres ont déjà délivré le message auparavant, et on peut légitimement soupçonner les créateurs de ce film de vouloir surfer sur une vague qui a déjà atteint la plage, plutôt que d'écrire un manifeste du mouvement hippie agonisant.
un autre truc qui saute aux yeux c'est que Eaux sauvages se veut une séquelle éhontée de Délivrance, qui date de 1972 (encore une fois Paul Kener a pris sont temps) à tel point que l'éditeur français de la VHS mettra comme accroche sur l'immonde jaquette: "souvenez vous... de Délivrance!" et plusieurs scènes du film trouvent un écho avec celles du film de Boorman, comme l'escalade de skipper Mike et celle de Jon Voight par exemple. ça sent encore le surf tout ça...
il aurait été trop gros de placer une copie d'une scène aussi emblématique que le duelling banjo. qu'à cela ne tienne, la chanson du générique contribue à pomper un peu l'ambiance du glorieux devancier. et les éléments que tu énumères avec justesse (yuppie traître, gros avare, débat pour savoir à qui appartient vraiment le territoire, définition du Karma, la drogue destructrice...), sont pour moi des ingrédients (clichés?) indispensables à saupoudrer dans le film pour que le public visé se reconnaisse, et ne se sente pas (trop vite) floué.
en bref je crois que malgré ton enthousiasme à considérer Eaux Sauvages comme
Le film de la génération Hippie, j'ai plus tendance à le prendre, pour mon plus grand plaisir, comme une tentative prétentieuse et tardive pour coller à une mode déjà dépassée. en plus va falloir pousser fort pour virer Easy Rider...
"et ce n'était même pas une montée si difficile que ça, Mike..." cette épitaphe me tue, je la dédie à ce film