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 Sujet du message: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 01 Avr 2014 16:37 
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Nanarland lui doit beaucoup
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"Dans les griffes du dragon d'or" est un nanar mineur, mais un nanar coup de coeur, ce qui lui vaut un traitement de prestige avec 1 chronique et 2 interviews. C'est un film que j'avais découvert avec l'ami Drexl avant même l'existence de Nanarland, à l'époque où on cherchait (déjà) les pires films à louer dans les vidéo-clubs. Si vous vous êtes déjà demandé comment certains films pouvaient être aussi catastrophiquement mauvais, on tient ici un cas d'école. Les témoignages sont édifiants et nous rappellent que la petite histoire du cinéma s'écrit souvent loin, très loin de l'imagerie glamour et du tapis rouge des festivals… Sur les quelques 70 chroniques de films que j'ai rédigées pour Nanarland, celle-ci est de très loin celle qui m'a demandé le plus de temps, du fait des entretiens à mener, retranscrire (le premier s'est fait par téléphone) et traduire, et l’iconographie assez riche pour illustrer tout ça. Les posts de ce forum étant limités à 60 000 caractères, j'ai d'ailleurs dû couper cette chronique en deux ! Comme sa longueur pose pour l'instant un problème technique pour sa mise en ligne sur le site, et que j'en ai marre d'attendre, je la poste sur ce forum. Bonne lecture !

Dans les griffes du dragon d'or / L'ombre du dragon (Shadow of the Dragon)

Etats-Unis / Canada. 92 mn. 1992. De Jimmy Williams, avec Robert Z'Dar, Gerald Okamura, Sandy Palm, Brian Big Mac McWhorter, Daniel Kong, Ewing Miles Brown, Donna Cherry, Trudy Adams, Al Guzman, Tommy Bull

Le genre : Docteur Toqué & Mister Tocard


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Aaaah, "Dans les griffes du dragon d'or"... un titre dont la poésie chante à l'oreille du spectateur la promesse d'1h30 d'exotisme opiacé aux confins de l'Orient éternel, d'aventures périlleuses et de mystères insondables comme le sourire du Bouddha.

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Visitez Chinatown de nuit et partez à la découverte des mystères de l'Orient.

Aux Etats-Unis, la deuxième moitié des années 80 a vu naître une petite vague de films centrés sur les agissements des triades chinoises ou des yakuzas japonais, sévissant généralement à New York ou Los Angeles. Dans le haut du panier, ce furent des films comme "L'Année du dragon" (Michael Cimino, 1985) ou "Black Rain" (Ridley Scott, 1989). En milieu de gamme, on trouve des titres comme le sympathique et azimuté "Les aventures de Jack Burton dans les griffes du mandarin" (John Carpenter, 1986) ou "Kinjite, sujets tabous" (John Lee Thompson, 1989), dans lequel Charles Bronson balançait au méchant des répliques aussi classes et subtiles que "Si tu m'fais des embrouilles, j'te pète les rotules et tu pourras plus t'faire prendre en levrette" (tu nous manques Charlie !). En bas de l'échelle, on trouve tout un tas de bisseries routinières, comme "Armés pour répondre" (Fred Olen Ray, 1986) et son casting très connoté, ou "Les Maîtres de la mort" (1988, Doo-yong Lee & Scott Thomas) avec Sam Jones et Linda Blair. Et au fond de la poubelle, en raclant bien les croûtes moisies collées à la paroi, il y a de purs nanars comme "Samurai Cop" (Amir Shervan, 1989) ou le "Shadow of the Dragon" qui nous intéresse ici, rebaptisé "Dans les Griffes du Dragon d'Or" en VF, sans doute pour créer la confusion avec "Dans les Griffes du Dragon Rouge" (un film avec Dolph Lundgren et Brandon Lee, sorti un an plus tôt et qui surfe lui aussi sur cette petite vague de mafieux orientaux).

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La jaquette française de chez FIP, qui copie-colle sans aucune justification la tête de Jorge Rivero !

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L'acteur mexicain Jorge Rivero dans "Fist Fighter", qui n'a évidemment rien à voir avec la choucroute.

Pour ce qui est de l'histoire, on évolue donc ici sur un terrain d'autant plus connu qu'il a déjà été défriché, tondu et ratissé un grand nombre de fois. Ici, deux flics bedonnants de Los Angeles traînent leur charisme défaillant lors d'une enquête dans les milieux du crime martial. Dans leur ligne de mire, le trafic de drogue d'une entreprise d'import-export dirigée par un mystérieux ninja qui se fait appeler "Le dragon du Mékong". Nos héros découvriront que leur ennemi et eux partagent un passé commun lourd de terribles secrets, du temps où ils combattaient tous ensemble, là-bas, au Viêt-nam…

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Avant toute chose, il me faut évoquer l'élément le plus marquant de ce film : ses héros. Nous sommes en 1992. Dans le cinéma populaire d'alors, en matière de charisme et de notoriété, on trouve en tête de classement des gros bras comme Schwarzenegger ou Stallone. Pas très loin derrière viennent les Jean-Claude Van Damme, Chuck Norris et Steven Seagal. Puis, un peu en contrebas, ce sont des figures comme, mettons, Don "the Dragon" Wilson, Joe Lara, Gary Daniels ou Michael Dudikoff. Beaucoup, beaucoup plus loin, on commence à apercevoir la moustache de Robert Ginty, les paupières lourdes de Chris Mitchum, les joues aérodynamiques de Max Thayer, perdues dans la masse grouillante et bigarrée de centaines de justiciers boîteux, sosies contrefaits, semi-culturistes pachydermiques et autres tatanneurs du dimanche, luttant pour leur survie dans l'univers impitoyable des direct-to-video. Jimmy Williams et Sandy Palm, les héros de "Dans les griffes du dragon d'or", se trouvent eux au-delà de cette foule, complètement hors de vue. Imaginez un marshmallow et un caramel mou passés au micro-ondes, donnez-leur le premier rôle dans un mauvais polar de 3ème zone et vous aurez une vague idée du résultat.

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Tony Baker (Jimmy Williams) et Brian O'Malley (Sandy Palm). Des flics comme on n'en fait (heureusement) plus.

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Nos héros en plein travail : deux gros boloss avec un steez pas très swagg (je précise ça à l'attention du petit Kevin de Maubeuge, alias "bogoss59", qui commençait à être un peu perdu avec "tou cé mot chelou que tu dis m'ssieur, tsé").

Les erreurs de casting, les héros pas crédibles, on connaît ça. Il suffit de penser à tous ces grands maîtres ninjas ténébreux joués par des touristes occidentaux ahuris dans les productions IFD. Là pourtant, on atteint un stade inédit. Le regard terne, le cheveu gras, le ventre mou et le maintien flasque, Jimmy & Sandy offrent une caricature grotesque de flics de choc. Imaginez Paul Préboist dans "Superflic se déchaîne" mais au premier degré, sans élément de comédie ! Jimmy est gras, râblé et courtaud, aussi sexy en marcel bleu électrique qu'une barrique de gros rouge à la Saint Jean. Pourtant, à côté de son coéquipier, la simple loi de la relativité lui donnerait presque une allure svelte, la foulée légère et le port altier. Parce que Sandy, lui, a carrément les épaules affaissées, l'air effondré dans son vieux costume, d'énormes valises sous ses yeux tristes, des bajoues de castor malade, et cette manie de tout le temps soupirer comme un vieux chien dépressif.

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Jimmy Williams dans son fameux marcel bleu. Quel homme !

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Sandy Palm semble lui préférer le rouge. On vous laisse juge.

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Prends garde, crime ! Roquentin mène l'enquête !

S'ils avaient la vingtaine au Viêt-nam, ils devraient logiquement avoir la quarantaine, sauf qu'ils en paraissent facile 10 ou 20 de plus. Attention, qu'on ne nous reproche pas de faire du jeunisme ! Après tout il existait à l'époque des séries mettant en vedette des enquêteurs du troisième âge, mais tous avaient leurs atouts. Colombo avait son style, dans "Arabesque" Jessica Fletcher avait de l'esprit et Derrick avait, euh… un public. Mais Jimmy & Sandy eux n'ont absolument rien, aucun charme, aucune plus-value. Le plus pathétique, c'est cette tentative désespérée d'émuler les innombrables duos de flics qui ont peuplé les écrans des années 80. Eux arrivent bien après la bataille, et nous composent une sorte de parodie involontaire de "Deux flics à Miami" devant laquelle on ne peut que rire.

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Papy & Pipô, la terreur du crime.

"Dans les Griffes du Dragon d'Or" reproduit maladroitement tous les poncifs du mauvais polar. On arrête un homme de main ? Celui-ci est tué par son employeur avant d'avoir pu parler (quand le flic chargé de le surveiller explique qu'il s'était juste « absenté pour la pause café », Jimmy & Sandy lui disent que tant pis, c'est pas grave… on croit rêver !). Pas grave en effet puisqu'on trouve dans la poche de la victime un paquet d'allumettes avec l'adresse d'un bar… l'enquête avance ainsi de cliché en cliché. Quand nos deux flics font le coup de feu, comme ce sont des vétérans du Viêt-nam évidemment il y a de la casse, et leur supérieur (Robert Z'Dar) se fâche tout rouge dans la grande tradition du polar ricain des 80's : « Six hommes tués, un blessé et une voiture incendiée, pourquoi faut-il qu'à chaque fois que vous êtes ensemble vous déclenchez la Troisième Guerre mondiale ?!? ».

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Le Capitaine Washington (Robert Z'Dar, malheureusement sous-employé).

En apparence, Jimmy & Sandy sont donc des durs, mais en fait pour ce qui est des sentiments ils sont tout mous à l'intérieur (déjà qu'à l'extérieur…). Jimmy va ainsi se maquer avec Margie, chanteuse dans le fameux bar du paquet d'allumettes, tandis que Sandy vit avec Ellen, une ex-prostituée qu'il a demandée en mariage dans sa cellule de prison (la classe Sandy !). Justification scénaristique à l'appui, nos flics de choc et de charme filent ainsi le parfait amour avec des filles deux fois plus jeunes qu'eux.

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Margie McGee (Donna Cherry, qui fut Miss California 84).

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Ellen O'Malley (Trudy Adams, vue dans les délicats "Gorgeous Ladies of Wrestling", "Powerful Women of Wrestling" ou encore "Space Girls in Beverly Hills").

Loin d'être anecdotique, la romance entre Tony & Margie nous vaut notamment un somptueux montage en musique. Une séquence désarmante de naïveté, où les deux tourtereaux se baladent en roucoulant d'amour, partagent une glace, rient à gorge déployée, font semblant de manger des fleurs, regardent passer les bateaux, tout ça dans un montage légèrement accéléré, avec un grain différent du reste du film, ce qui laisse penser que ces scènes ont été tournées avec une caméra 16mm tournant en 16 ou 18 images par seconde (traduction : du matos léger qui permet de filmer plus facilement au milieu d'une foule quand on n'a ni autorisation de tournage, ni budget pour payer des figurants). Ce montage rappelle irrésistiblement une séquence analogue dans "The Toxic Avenger", avec en fond la musique "Is This Love ?", sauf qu'ici, encore une fois, il ne s'agit pas d'une parodie.

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"Dans les Griffes du Dragon d'Or" offre aussi une version de l'Orient tout droit sortie d'un vieux roman de gare à deux sous, en mélangeant indifféremment des éléments japonais, vietnamiens ou chinois. On a ainsi un ninja pratiquant le kung-fu qui idolâtre une statue khmer que veulent récupérer des Vietnamiens, réunis tantôt dans un temple thaï, tantôt dans un local décoré d'estampes japonaises ! Qu'importe, pour le spectateur ricain de base, tout ça fera sens (des niaks qui s'habillent comme des niaks, se battent comme des niaks, et vont dans des temples de niaks prier des divinités de niaks).

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Tandis que s’écoule, avec le débit d’un fleuve asiatique pendant la mousson, un prodigieux flot d’absurdités narratives, les personnages orientaux du film profèrent sereinement des paroles comme « Nombreux sont les yeux qui cherchent » ou « Le Bouddha peut resplendir à nouveau », brefs des trucs que si toi ou moi on les dit on aurait l'air complètement con, mais là, dans la bouche d'un type aux yeux bridés, ça semble tout de suite vachement profond. Le comble est atteint avec la scène où l'impayable Gerald Okamura fait office de détecteur de mensonge. Il prend les mains des héros dans les siennes, ferme les yeux, plisse le front et leur pose des questions d'une voix grave :

« - Avez-vous pris la pierre précieuse dans le temple ?
- Euh… non.
- Mmmh… ces hommes sont bons, ils disent la vérité !
»

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Gerald Okamura, habitué à ce genre de rôles.

Côté casting, la présence dans une telle galère d'une figure aussi culte et populaire que William Smith relève de la prise d'otage. L'acteur interprète ici le méchant Eric Brunner, alias "Le dragon du Mékong", mais sa performance fait peine à voir tant l'homme n'est plus que l'ombre clopinante de ce qu'il fut autrefois. William Smith, mon petit Kevin, c'est un type qui a eu une putain de carrière, et aussi une putain de vie. Né en 1933, il grandit dans un ranch du Missouri, que sa famille devra abandonner suite au dust bowl (les grandes sécheresses qui ruinèrent le Middle West, coeur agricole des Etats-Unis). A 18 ans, il combat en Corée dans les rangs de l'US Air Force. Le fait qu'il parle couramment 5 langues (Anglais, Français, Allemand, Russe et Serbo-croate) l'amène à mener des missions secrètes pour la NSA et survoler l'URSS. Sportif accompli, il pratique le football américain à un niveau semi professionnel, la musculation et le culturisme, le kung fu, la boxe (palmarès de 31 victoires pour 1 défaite au niveau amateur), il est champion de bras de fer, champion de fouet, fréquente assidûment les compétitions de ski et de motocross. Il enseigne le russe à l'université de Californie, travaille comme pompier, cascadeur, prof de gym, maître nageur sur la Côte d'Azur, et a tenu en tout près de 300 rôles au cinéma et à la télé.

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William Smith: The Man.

Dans les années 70 il joue très souvent des rôles de dur à cuire, de cowboy farouche, de méchant de Blaxploitation (5 films), de biker avide de castagne (notamment dans "Les Machines du Diable", où son gang de deux roues et lui sont envoyés par l'Armée affronter les Viet-congs !), et joue aussi les premiers rôles dans des films d'horreur et de SF comme "Bébé vampire" ou "Invasion of the Bee Girls". Dans les années 80, il se bastonne avec Clint Eastwood dans une des scènes de bagarre les plus longues et les plus cultes du cinéma ("Ça va cogner"), se fait embaucher par des pointures comme Coppola ("Rusty James") ou John Milius, qui lui fait jouer un Soviétique dans "L'Aube rouge", et le père d'Arnold Schwarzenegger dans "Conan le barbare". Et puis peu à peu, l'âge venant, il rejoint la triste cohorte de ces has been à l'aura déclinante, et se compromet dans une ribambelle de nanars aux titres ronflants comme "Cybernator", "Hell Comes to Frogtown", "Legend of the Roller Blade Seven", "Manosaurus", "The Erotic Rites of Countess Dracula" ou "Zombiegeddon". Dans "Dans les griffes du dragon d'or", William Smith semble avoir déjà fait le deuil de son amour-propre et livre une interprétation empâtée par l'alcool (lire nos interviews plus bas), traversant ses scènes comme un navire sans gouvernail, et c'est quand même bien triste. Lui qui incarnait autrefois la force brute et virile, à travers d'innombrables rôles de machos bagarreurs au physique de mâle alpha, offre désormais le triste spectacle d'un vieil homme hagard, sans vigueur et sans substance. Fait pas bon vieillir…

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Le méchant Eric Brunner (William Smith) soliloque avec une statue en balsa. Notez que si son visage est horriblement brûlé, sa moustache, elle, est toujours en place !

Outre Robert Z'Dar, Gerald Okamura[/color], le fantôme titubant de William Smith et nos deux saucisses ventripotentes de héros, "Dans les Griffes du Dragon d'Or" fait aussi figure d'écrin molletonné pour toute une galerie de tronches 24 carats. Sbires au regard flou, hommes de main patibulaires, voyous grimaçants… c'est un véritable festival de gueules comme on n'en voit que dans ce genre de productions. Je ne sais pas où le directeur de casting est allé recruter tout ce beau monde mais je lui tire mon chapeau.


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De vraies gueules de cinoche zédard.

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Un signe qui ne trompe pas : la présence de Conrad Brooks, une valeur sûre du nanar, déjà vu dans "Glen ou Glenda", "La Fiancée du Monstre", "La Nuit des Revenants", "Plan 9 From Outer Space" mais aussi dans "F.AR.T. the Movie".

Dire que "Dans les Griffes du Dragon d'Or" pue l'amateurisme et l'incompétence résonne comme un doux euphémisme. Scénario anémique, dialogues ringards, bagarres lymphatiques, péripéties molles du genou, cascades minables, fusillades cacochymes… Les mots manquent pour décrire la pauvreté de cette petite affaire, auprès de laquelle le pire téléfilm allemand semble un feu d'artifice d'inventivité et de savoir-faire. Dès les premières minutes du film, le ton est donné : on nous balance quelques stock-shots de la guerre du Viêt-nam, puis on enchaîne sur une poignée de soldats dépareillés qui avancent dans une forêt même pas tropicale. Certains portent un casque, d'autres une casquette, et l'un… un bonnet.

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Ceci est un jeune et valeureux G.I. en mission au Viêt-nam.

Au début on est attentif au moindre détail, on scrute la misère de décors réduits à leur plus simple expression. Il y a cette paillasse censée figurer un des plus importants temples d'Asie, avec sa statuette en polystyrène et ses quelques breloques, il y a ce commissariat à moitié vide, cette boîte de nuit... bon Dieu, même l'entrepôt fait cheap ! On répertorie les faux-raccords, on analyse l'absence de logique d'un montage balourd, la mise en scène cotonneuse. Et puis passées les 20 premières minutes on ne fait même plus attention aux erreurs de continuité, à une règle des 180° constamment méprisée, aux regards caméra d'apprentis comédiens livrés à eux mêmes, aux cadrages indignes des reportages d'un stagiaire de télé locale, à une photo dégueu shootée en Derrick-Color, et aux innombrables scories de ce polar martial exceptionnellement mauvais.

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Ceci est un haut lieu du bouddhisme.

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Ceci est un mannequin en mousse.

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Ceci est un stock-shot.

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Des effets spéciaux marqués du sceau de l'artisanat.

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Plan 1 : un mouchard tente d'alerter la police.

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Plan 2 : un sbire cabotin lui règle son compte à la dynamite.

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Plan 3 : la cabine téléphonique se transforme en boîte en carton, et le mouchard en poupée grossière.

Evidemment, le scénario est bancal et très lacunaire, ou très lacuneux c'est comme vous voulez (je veux dire que c'est gavé de plotholes mon p'tit Kevin, du vrai travail de boloss). Le réal n'a visiblement aucune idée quant à la façon de conduire son récit et se repose, en ultime recours, sur ce bon vieil artifice de la voix off pour faire avancer le schmilblick. L'enquête doit avoir l'air longue et compliquée, alors on filme nos héros qui marchent interminablement dans différents quartiers, interrogent la faune des bas-fonds de Los Angeles (genre un type en jean avec une mulette qu'avait pas l'air net), on les voit plisser les yeux et se gratter le menton, au détour d'un dialogue on mentionne un indic à Chicago, puis un bar près de la frontière, à Tijuana (ça n'apporte pas grand chose mais Jimmy devait trouver que "bar à Tijuana" et "près de la frontière" ça sonnait bien dans une enquête, même si la séquence a vraisemblablement été tournée dans un quartier Latino de Los Angeles). Et puis, pour clore le montage de cette séquence, Jimmy déclare brusquement à Sandy : « Tu vas aller au dojo, j'ai entendu dire que les ninjas s'y entraînaient ».

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Le fameux dojo où, paraît-il, des ninjas s'entraîneraient…

A ce stade là, vous vous serez sans doute posé, comme nous l'avons fait, cette question légitime et élémentaire : pourquoi ? La réponse est toute simple. "Dans les Griffes du Dragon d'Or" a été conçu par et pour Jimmy Williams, l'interprète de Tony Baker. Jimmy Williams est présent à tous les postes : réalisation, production, interprétation, montage, direction artistique, prises de vue, cascades... y a même son petit-fils qui traîne sur le plateau : mémé Josephine ne pouvait pas le garder car elle produisait et scénarisait le film avec pépé. Et son coéquipier, le flaccide Sandy Palm ? Et bien il est co-producteur du film. Tout s'explique.

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Le jeune Robert Shaun Williams dans le rôle du petit garçon égaré. Pas d'inquiétude, pépé Jimmy est juste à côté.

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C'est moi qui paye et c'est moi qui réalise alors c'est moi qui décide que je s'rai un super flic casse-cou et sexy qu'aurait fait le VIETNAM ! Et toi Sandy, si tu mets des ronds on dira qu't'es mon coéquipier qu'aurait lui aussi fait le VIETNAM, et ensemble on s'rait trop forts ! Et même qu'on vivrait avec des p'tites pépées blondes et bien roulées ! Allez Sandy, lâche des ronds, fais pas ton radin… Allez-euh Sandy, comme ça on peut jouer à la bagarre contre les Chinetoques !

Jimmy Williams a commencé sa carrière d'acteur comme figurant non crédité sur des productions de premier plan ("Blue Collar" de Paul Schrader, "Raging Bull" de Martin Scorsese ou "Osterman Weekend" de Sam Peckinpah). Par la suite, il tient des rôles à peine plus consistants, et uniquement dans de pures bisseries ("Surgikill" d'Andy Milligan, "Samurai Cop", et pas moins de 7 films de Fred Olen Ray). Finalement, il doit attendre de passer lui-même à la réalisation pour obtenir son premier "grand" rôle.

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Une photo prise le 31 mai 2013 au Nuart Theatre de Los Angeles, à l'occasion de la projection du fantabuleux "Samurai Cop" d'Amir Shervan, en présence de membres de l'équipe. De gauche à droite : le directeur photo Peter Palian, Jimmy Williams (qui jouait juste le rôle d'un officier de police non crédité au générique !), Douglas Dunning (le responsable acquisitions de Cinema Epoch, qui distribue le film), Gerald Okamura, et Mark Frazer. Jimmy Williams a également co-produit et joué dans "Killing American Style", du même Amir Shervan, dans lequel apparaît aussi Sandy Palms. (Source photo : viewerdiscretionadvised.net)

Pour étayer cette hypothèse d'un film entièrement conçu comme un piédestal à la gloire de Jimmy Williams et de son copain Sandy Palm, il fallait les témoignages de quelques personnes ayant travaillé sur "Dans les Griffes du Dragon d'Or", alors votre serviteur s'est retroussé les manches et, grâce à la magie d'Internet et des réseaux sociaux, a contacté deux figures de ce somptueux nanar. Pour celles et ceux qui ont déjà vu ce film (j'en connais au moins… 4), la lecture de ces deux entretiens est indispensable. Pour le lecteur lambda et pressé, qui picore le web avec jamais moins de 10 onglets ouverts dans son navigateur, ce sera peut-être un peu long et fastidieux (clairement too much pour les neurones du p'tit Kevin, qui de toutes façons a déjà dû décrocher). Mais pour tous ceux qui se sont déjà demandés un jour, en parcourant les pages de ce site, comment il était possible de faire des films aussi mauvais, ces témoignages offrent un éclairage édifiant. Commençons avec Thomas Bull.

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Tommy Bull, acteur, réalisateur de seconde équipe et chorégraphe des combats sur le film.

Réalisateur de seconde équipe, chorégraphe des combats et interprète du bras droit du méchant dans "Dans les Griffes du Dragon d'Or", Tommy Bull est un personnage plutôt intéressant. Fils de boxeur, il a lui même remporté quelques titres dans le noble art dès l'âge de 17 ans, mais s'est surtout consacré aux art martiaux. Il est 9 fois champion du monde de kung-fu dans un style un peu confidentiel (Wa-Lu, originaire de Thaïlande), a remporté quelques belles victoires dans des compétitions de kickboxing diffusées sur les chaînes du câble aux Etats-Unis, avant de prendre sa retraite sportive en 1994. Il a également exercé le métier de chasseur de primes, et participé à la très populaire émission "America's Most Wanted". En tant qu'acteur et réalisateur de seconde équipe, il a notamment travaillé avec Robert Clouse ("Force Five"), participé à deux films italiens tournés coup sur coup en Floride ("Karate Warrior 2" de Fabrizio De Angelis et "Cop Target" de Umberto Lenzi), et croisé la route de pas mal d'acteurs appréciés ici (Richard Norton, Benny Urquidez, Gerald Okamura, Ted Prior, Robert Ginty, Charles Napier, Don "the Dragon" Wilson, Eric Lee, Gary Daniels, Malcom McDowell, Charles Napier, Robert Z'Dar, Joe Estevez ou encore David Carradine). Il garde un très mauvais souvenir de sa participation à "Dans les Griffes du Dragon d'Or", et son témoignage apporte un éclairage assez cru sur les conditions de tournage.

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Comment avez-vous été amené à travailler sur "Dans les Griffes du Dragon d'Or"?

Tommy Bull : « J'étais en Floride, je travaillais sur la série "2 flics à Miami", et j'ai profité d'un break pour aller passer une audition en Californie pour un film d'action produit par Concorde Pictures [Nanarland : la firme de Roger Corman]. Sur place, j'ai fait la rencontre de Jimmy Williams. Jimmy m'a parlé d'un film qu'il avait en préparation, et m'a proposé d'y tenir l'un des rôles principaux, ainsi que le poste de réalisateur de seconde équipe. Je n'avais aucune info sur ce projet, et pas la moindre idée que ça donnerait un film aussi mauvais, mais je lui ai donné mon accord. Quelque temps plus tard, je reprends donc un vol entre la Floride et la Californie, sans scénario entre les mains, j'arrive à l'aéroport et là il y a un vieux type qui vient me chercher, Sandy Palm, et qui m'apprend qu'il joue lui aussi dans le film. Il me fait monter dans une sorte d'épave roulante qui fume de partout, m'annonce qu'il m'emmène aux studios, directement sur les lieux de tournage, et il me tend le scénario pour que je puisse y jeter un oeil, alors que sa vieille bagnole est noyée dans un épais nuage de gaz d'échappement et que je n'y vois absolument rien. Et me voilà donc, à essayer de comprendre de quoi parle le scénario pour ne pas arriver complètement démuni sur le plateau de tournage, et à cause de la fumée j'ai du mal à respirer, et encore plus de mal à distinguer le texte que j'ai sous les yeux. Et je me souviens avoir alors demandé à Sandy "[i]Ok, qu'est-ce qu'on fait quand on arrive, par quoi on commence, qu'est-ce qui est prévu ?" Et lui : "Oh je sais pas, ce sera à toi de voir une fois sur place." C'était l'anarchie, j'avais jamais vu un truc pareil. C'est là que j'ai compris que ça allait être un sacré défi.[/i] »

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Comment s'est passé le tournage?

Tommy Bull : « C'était rude, y avait pas d'argent, une vraie misère. Les conditions de tournage étaient tellement rudimentaires que j'ai dû composer 65 plans avec, en tout et pour tout, une antique caméra qui avait au moins 50 ans. Je me suis efforcé de faire du mieux que je pouvais avec ce que j'avais, et je n'avais pas grand chose, parce que le budget était proche du néant, c'était comme tourner un film amateur. C'est l'épouse de Jimmy, Josephine Williams, qui faisait à manger pour toute l'équipe, et la pauvre était incapable de cuisiner, c'était une catastrophe. En fait je n'avais qu'une envie c'était de me barrer. Une fois sur place, quand j'ai vu la direction que prenaient les choses, je n'avais plus envie de faire ce film, mais je m'étais engagé et je suis quelqu'un qui tient parole, alors je suis resté. Le tournage en Californie s'est poursuivi par intermittence pendant plusieurs mois, et comme en parallèle je continuais à travailler sur d'autres projets en Floride, j'ai enchaîné plusieurs aller-retours pour tout mener de front, ce qui s'est très vite avéré épuisant. Et le pire c'est que je n'ai jamais été défrayé. Jimmy m'avait garanti une part de 35 000 $ sur les recettes, mais je n'en ai jamais vu la couleur, et au final j'en ai été de ma poche pour faire ce film. Je me suis tellement investi sur ce tournage, pour la simple et bonne raison que j'avais mon nom au générique, j'ai bossé littéralement 20 heures par jour pour arriver à boucler ce film pour Jimmy, pour arriver à produire quelque chose de bon à partir de quelque chose de très mauvais. C'était une expérience cauchemardesque, vraiment. »

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Vous êtes également crédité comme chorégraphe des combats. Il y a pas mal de sbires et d'hommes de main dans le film, parmi eux certains semblaient s'y connaître un peu en arts martiaux, d'autres… pas vraiment !

Tommy Bull : « Pour la grande scène de baston à la fin du film, on avait 50 ou 60 types qui devaient s'affronter dans une même séquence. En tant que réal de seconde équipe, j'ai fait de mon mieux pour qu'on voit un maximum d'entre eux à l'écran, mais c'était un peu perdu d'avance, avec cette grosse caméra qui était plus vieille que mon père, et seulement une nuit de tournage pour tout préparer, régler l'éclairage, chorégraphier les combats etc. Pour réunir tous les combattants dont on avait besoin pour cette scène, on avait organisé une audition, et peut-être 200 lascars se sont pointés au studio. Pas mal d'entre-eux nous ont joué du pipeau, en nous affirmant qu'ils s'y connaissaient en arts martiaux, et il s'est vite avéré qu'ils n'y connaissaient rien. Du coup je me suis focalisé sur les 4 ou 5 gars qui avaient vraiment des compétences martiales, et ça m'a bien aidé parce qu'avec eux c'était plus facile de mettre au point les combats. Il y avait notamment Gerald Okamura, un Asiatique avec qui je me bat et qui me tue dans le film. Je crois qu'il était Maître dans un certain système de kung-fu, c'était quelqu'un d'adorable... mais pas un très bon comédien ! »

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Tommy Bull et Gerald Okamura sur le plateau de "Dans les Griffes du Dragon d'Or" (plus précisément, sur le parking des studios Movie Tech, situés à Hollywood).

Tommy Bull : « Il y avait aussi un autre Asiatique, un p'tit freluquet dont j'ai oublié le nom [Nanarland : Daniel Kong]. Dans le film, son personnage est censé être un combattant aguerri, mais dans la vraie vie il ne connaissait rien aux arts martiaux. Qu'est-ce qu'il était mauvais ! A tel point qu'à un moment donné j'ai dû prendre son jeans, l'enfiler sur mes bras, avec une paire de baskets sur mes mains, pour faire croire à l'image que c'était lui qui portait des coups de pieds. C'est vous dire ! Bien sûr nous n'avions que très peu de temps pour tout mettre en boîte, et cette scène de baston générale - qui devait être un climax grandiose dans le scénario - et bien à l'écran elle a l'air minable. Et le pire dans tout ça c'est que Jimmy Williams n'était même pas là, alors que c'était son film ! Et quand il était là, il avait toujours une bouteille d'alcool à la main… »

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Tommy Bull essaye de faire adopter à Daniel Kong une posture correcte (image tirée d'une vidéo faite pendant le tournage).

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La scène telle qu'on la voit dans le film.

Des souvenirs de William Smith et de Robert Z'Dar?

Tommy Bull : « J'ai fait un autre film avec Robert Z'Dar par la suite, à la Nouvelle Orleans, ça s'appelait "Fatal Pursuit" (encore un mauvais film), et dans celui-là j'avais des scènes en commun avec Robert. Ce n'était pas le cas dans "Dans les griffes du dragon d'or", où Robert n'avait que quelques scènes de dialogue dans des bureaux, et rien qui ressemble de près ou de loin à une scène d'action. J'ai dû le croiser peut-être une fois dans le studio, c'est tout.

En revanche, William Smith et moi avions de nombreuses scènes en commun, puisque je jouais son bras droit. Un jour on s'est embrouillés et j'ai dû le remettre à sa place. Le truc c'est qu'il buvait pas mal en dehors du plateau. Ce jour-là, j'étais en train de mettre au point une scène de combat entre lui et le petit Asiatique - celui dont je vous disais qu'il ne connaissait rien aux arts martiaux. C'était la dernière scène du film, l'affrontement final entre le gentil et le méchant, devant cette grande statue de Bouddha, à l'issue duquel le petit Asiatique devait tuer William Smith. Le problème c'est que le p'tit Asiat' était catastrophique, et c'est là que je me suis retrouvé à enfiler mes bras dans un jeans, avec des baskets sur les mains, et à donner des coups sur la poitrine de William Smith pour faire croire que l'acteur lui donnait des coups de pieds. C'était tellement ridicule qu'au bout du compte, je me suis dit que le plus simple c'était encore que la grosse statue de Bouddha tombe sur William Smith et le tue avant même le début du combat ! Parce que bon, sinon c'était franchement pas crédible : vous avez un type qui doit faire 30 kilos tout mouillé et ne sait de toute évidence pas se battre, et ce gars-là est censé terrasser cette brute de William Smith, qui a toujours joué les gros durs au cinéma ? Le public n'aurait jamais gobé ça.


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Bref, pendant que je réglais cette séquence, William Smith buvait du whisky dans sa caravane, et quand il a débarqué sur le plateau, il était soûl. Le caméraman et moi étions en train de composer un plan, et Smith se tenait dans le champs de la caméra, nous bloquant la vue, et il avait l'air de mauvaise humeur. Je lui ai dit "[i]Ecoute, j'essaye de faire mon boulot" et il est parti au quart de tour, "[i]Qu'est-ce qu'il y a, t'as un problème !?", et il a commencé à s'énerver et à me traiter de noms d'oiseaux. J'ai tout arrêté et je lui ai dit "Bouge ton cul et suis moi dehors, tout de suite", et une fois dehors je lui ai dit "Si jamais tu me reparles sur ce ton, je t'éclate la tronche". Il s'est lentement incliné devant moi, en titubant un peu, je lui ai dit de retourner sur le plateau et de faire son putain de boulot, et c'est ce qu'il a fait. Après ça je me suis très bien entendu avec lui.[/i] »

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Tommy (au centre), réalisateur de seconde équipe sur "For Life or Death" (1996), avec Richard Norton (absent sur cette photo) et Gerald Okamura.

Au générique de "Dans les Griffes du Dragon d'Or", on retrouve Jimmy Williams à quasiment tous les postes : réalisation, production, interprétation, scénario, montage, direction artistique etc. En fait on a parfois le sentiment que ce film n'est qu'une vaste entreprise égocentrique, conçue entièrement à sa gloire. Quelle est votre opinion à ce sujet ?

Tommy Bull : « Vous venez de mettre dans le mille en disant ça ! Jimmy Williams a fait exactement ce qu'il a voulu, comme il l'a voulu, dans le seul but de devenir une star. Bien entendu, quand il m'a proposé de bosser avec lui, je ne me doutais de rien. Pour financer leur film, Jimmy Williams et Sandy Palm ont baratiné un riche docteur - ils lui ont raconté qu'ils étaient cinéastes, qu'ils étaient en train de monter un super projet etc. Je crois qu'au départ ils ont obtenu de lui 75 000 dollars, de quoi démarrer le tournage. Combien ils lui ont soutiré par la suite, je n'en ai aucune idée : ils n'en parlaient jamais avec moi et eux seuls doivent connaître le budget global du film. Jimmy Williams n'avait pas la moindre idée quant à la façon de faire un film, ni le moindre talent d'ailleurs, mais il désirait néanmoins percer dans l'industrie du cinéma. Ce n'était pas un bon comédien, ni lui ni Sandy Palm, et ils connaissaient que dalle au cinéma d'action. Ils naviguaient à vue, sans avoir la moindre idée de ce qu'ils faisaient. La seule chose qu'ils savaient avec certitude à mon avis, c'est que le docteur qui avait investi de l'argent dans ce film ne reverrait jamais son fric. Mais ça Jimmy s'en fichait ! Il voulait juste percer comme acteur, se faire un nom, il avait l'égo nécessaire pour ça, mais bien sûr rien de tout ça n'est arrivé, tout ce qui s'est passé au final c'est que le docteur a perdu de l'argent, parce que je suis persuadé qu'il n'a jamais récupéré sa mise. C'est vraiment un truc qui me débecte à Hollywood, tous ces types qui se prennent pour des cinéastes, qui prennent de l'argent à des gens, et puis qui font leur film sans se soucier de l'intérêt des investisseurs. A ce niveau-là, le tournage de "Dans les Griffes du Dragon d'Or" m'a vraiment servi de leçon. J'étais écoeuré par l'insouciance et le manque de professionnalisme de Jimmy Williams, et depuis cette mauvaise expérience j'ai appliqué cette règle d'or dans ma carrière : quand un investisseur avec qui je travaille me confie son argent, mon boulot c'est de protéger cet argent et de travailler au maximum de mes compétences pour m'assurer qu'il réalise un profit. C'est une question d'honneur. »

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Nos deux interviewés Tommy Bull et Bill Mills, tournant des plans qui seront utilisés pour la séquence d'intro du film.

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Le résultat dans le film, avec Tommy Bull qui effectue des katas en ombres chinoises pendant que les crédits défilent à l'écran.

[la suite de cette chronique dans le post ci-dessous...]

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"Dans le monde de "Last Action Hero", j'suis à peu près persuadé que c'est Ralf Moeller qui joue dans "Un flic à la maternelle". (Plissken)


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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 01 Avr 2014 16:37 
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La deuxième personne que nous avons contactée pour nous parler du tournage de ce film s'appelle William Mills. Acteur, producteur délégué, cascadeur, accessoiriste, doubleur, bruiteur, bref homme à tout faire du film, Bill Mills insistait dès notre premier échange par e-mail sur le fait que, outre un budget de misère, le tournage fut un vrai désastre à cause d'un réal parfaitement incompétent, nommément Jimmy Williams.

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William Mills alias Bill Mills, dans le rôle du Détective Pat Carlyle.

« "Dans les Griffes du Dragon d'Or" est un film fauché, mal écrit et, malheureusement, piètrement mis en scène. Je dis "malheureusement" parce qu'entre d'autres mains, ça aurait pu donner un petit film honnête, vu la présence d'acteurs confirmés comme le vétéran William Smith (dont la filmographie pourrait remplir des pages entières) et Robert Z'Dar ("Maniac Cop", "Tango & Cash"). Mais les performances inspirées que l'un et l'autre auraient potentiellement pu livrer ont été noyées dans le brouillard d'une intrigue douloureusement lente, de sous-intrigues inutiles, et des dialogues compassés maladroitement récités par les "stars" du film : Jimmy Williams, Donna Cherry et Sandy Palm. Le film a quelques passages intentionnellement drôles (et beaucoup d'autres involontairement drôles), et quelques scènes d'action qui fonctionnent… mais pas assez pour l'élever ou le porter, même en le traînant, au-delà de sa retentissante médiocrité. Jimmy Williams est la "star" du film, qu'il a aussi (co-)écrit, produit ET réalisé. Et c'est bien dommage. Parce que c'est sans aucun doute le plus gros point faible de ce film. Au final, "Dans les Griffes du Dragon d'Or" ressemble un peu au travail de fin d'année qu'aurait pu rendre un étudiant en option cinéma… un étudiant qui aurait eu 5/20. Ou alors à un sujet d'étude pour les élèves : comment rater un film ! »

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Bill Mills, ici aux côtés de Daniel Kong, l'interprète du personnage de Minh (un visage déjà vu dans "Killzone" de David A. Prior, "Surf Nazis Must Die" et… c'est à peu près tout).

Comment avez-vous été amené à travailler sur ce film ?

Bill Mills : « J'ai commencé à travailler sur "Dans les Griffes du Dragon d'Or" vers la fin de 1991, alors que le film était en cours de production depuis déjà plusieurs mois. Au départ j'avais été embauché comme ingénieur du son, mais j'ai très vite mis la main à la pâte dans de nombreux autres domaines, comme l'habillage des décors, la garde-robe et les accessoires. A titre d'exemple, la tenue asiatique noire à manches blanches que porte Tommy Bull dans le film vient de ma collection personnelle, de même que la tenue rouge portée par Doc Duk, l'un des hommes de main du "Dragon du Mékong", ainsi que le sabre de samouraï que William Smith brandit vers la fin du film.

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La tenue rouge en question...

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…et son emploi dans le film.

« Quand je suis arrivé sur le tournage, j'ai mis la main sur un exemplaire - quelques pages à peine - de ce qui tenait lieu de scénario, et appris que l'un des enjeux narratifs du film tournait autour d'un bijou dérobé dans un temple au Vietnam. Mais le manque d'organisation était tel que le jour où nous devions tourner cette scène, et alors que nous en étions déjà à la pause déjeuner, aucun accessoire n'avait été prévu pour figurer ce bijou. Alors entre midi et deux j'ai conduit depuis Hollywood jusqu'à mon appartement, dans la vallée de San Fernando, et je me suis mis à chercher dans mes effets personnels quelque chose qui pourrait faire l'affaire. J'ai trouvé un vieux pendentif celtique en toc, sur lequel j'ai ensuite collé un gros bijou rouge en plastique, et le tour était joué. Nous n'avions qu'une heure de pause déjeuner, mais j'étais de retour sur le plateau dans les temps. A mon grand amusement, j'ai observé le réalisateur Jimmy Williams préparer la scène qui nécessitait cet accessoire, j'ai attendu qu'il se rende compte qu'il n'avait PAS d'accessoire, et c'est seulement à ce moment-là que je suis intervenu, tel une figure providentielle, en proposant au producteur exécutif Sandy Palm le bijou que j'avais bricolé à la hâte. Il était impressionné de me voir débarquer avec le bon truc au bon moment, de voir que j'avais pris l'initiative, et que grâce à moi le tournage n'allait pas prendre de retard. »

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Le fameux bijou que le méchant "Eric Brunner" (William Smith) dérobe du front du Bouddha. Le bord a été cassé pendant le tournage.

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Le même accessoire utilisé dans le film.

« En à peine une semaine de tournage, je me suis rendu suffisamment utile pour que Sandy Palm me propose le poste d'Assistant de Production, avec l'accord de Jimmy Williams. Le deal qu'il m'a proposé, c'est que mon salaire resterait le même, mais que je percevrais un pourcentage sur les recettes du film, et pour finir de me convaincre il m'a aussi offert un rôle. J'étais alors loin de réaliser le pétrin dans lequel je venais de me jeter, tout ça parce que j'avais fait preuve d'une bonne volonté bien mal inspirée. On m'a promis que je toucherais un gros chèque une fois le film terminé mais, comme pour d'autres personnes qui ont travaillé sur ce projet, cette promesse ne sera jamais tenue. La suite, c'est une période de production chaotique qui s'est étalée sur plus de deux ans, suivie par une post-production cauchemardesque durant laquelle j'ai notamment dû doubler ou faire redoubler la quasi-totalité des dialogues du film, qui n'a finalement été terminé qu'en 1994. Chaque fois que vous voyez le nom MILLS au générique, quelque soit les variations de prénoms et d'initiales qui y sont associés, il s'agit de moi. Et vous verrez que la liste est longue ! »

D'autres accessoires du film, conçus par Bill Mills :

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« A gauche, c'est le modificateur de voix qu'utilise le "Dragon du Mékong". C'est juste une petite pièce de haut-parleur avec deux résistances collées dessus, et un peu d'adhésif au dos. A droite, c'est la pochette d'allumettes qui conduit Baker et O'Malley au "Kit Kat Klub". J'avais imprimé ça sur mon ordinateur. »

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« Les deux accessoires tels qu'on les voit dans le film. Sur le gros plan à gauche, c'est en fait le cou de Jack Birch, qui a doublé William Smith pour ce plan. De même, sur l'image de droite, ce sont mes doigts que vous voyez - alors que dans le film c'est censé être le personnage joué par Jimmy Williams qui tient les allumettes. »

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« Voici un des avis de recherche qui étaient affichés sur les murs du commissariat, j'avais également fait ça sur mon ordinateur personnel (au début des années 90, il faut le rappeler). Vous remarquerez que le type sur ces photos… c'est moi quand j'étais jeune ! Et le nom "William Wilde", c'est le pseudo que j'utilisais quand j'animais des shows téléphoniques durant la première moitié des années 80 ».

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Le même avis de recherche, punaisé sur le mur derrière Robert Z'Dar.

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« Ca ce sont les prothèses qui ont servi pour la séquence où un sbire indélicat se fait trancher la main. C'est le maquilleur d'effets spéciaux Bobby Swain qui avait fabriqué ça. Le faux moignon se glisse dans la manche, et les seringues raccordées aux petits tuyaux permettent d'en faire jaillir du faux sang. Ces mains et un bras en latex avaient été moulés à partir de ceux de l'acteur qui a tourné la scène, Ed Sanchez si je me souviens bien (qui deux ans plus tard a écrit, produit et conçu les effets spéciaux de "Manosaurus", film réalisé par… Jimmy Williams). »

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« La scène du film où Tommy Bull et Big Mac McWhorter tranchent la main du sbire. Bien sûr les billets de banque ensanglantés que vous voyez étaient également des faux... »

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« …d'ailleurs il m'en reste encore plein, avec "Motion Picture Use Only" marqué dessus. »

Comment expliquez-vous que ce film ait été si long à réaliser ?

Bill Mills : « Plusieurs raisons à ça, certaines liées au fait qu'il s'agissait d'une production à tout petit budget, d'autres simplement dues à la malchance. Nous disposions par exemple de notre propre matériel de prises de vues, une caméra Arriflex. C'était un engin énorme, gros comme l'ancre d'un navire, et pourtant on a réussi à se la faire piquer ! On la rangeait dans un van qui appartenait à la production et un jour elle a disparu, ce qui a évidemment engendré du retard et un coup dur sur le plan financier. Mais la raison principale, c'est que quelque soit la quantité de fric que notre producteur, "le bon Docteur" (comme on l'appelait) Victor Chartrand, investissait dans le film, Jimmy Williams finissait toujours par se retrouver à court d'argent… ce qui l'obligeait à interrompre le tournage, le temps de baratiner le docteur pour qu'il lâche encore 2000 ou 5000 dollars supplémentaires - de quoi acheter un peu de pellicule, louer du matériel, réserver un lieu de tournage, payer les acteurs, acheter de la bouffe pour les techniciens etc. On continuait alors le tournage pendant quelques temps, jusqu'à ce que Jimmy se retrouve à nouveau sans un rond, et répète le même manège, encore et encore, et ça a duré comme ça pendant toute la production du film. A mesure que le temps passait, il devenait évident que Jimmy utilisait aussi l'argent du Docteur Chartrand pour payer son loyer, ses factures, et d'autres dépenses personnelles. Le budget du film en était réduit d'autant, ce qui poussait ensuite Jimmy à embaucher un maximum de bras cassés prêts à travailler gratuitement ou presque. C'était vraiment un mode de financement digne d'Ed Wood. »

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Le "bon docteur" Victor Chartrand (assis au centre sur le canapé, avec le bras sur l'accoudoir), bienfaiteur du nanar malgré lui.

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Dans cette scène, Chartrand se délecte du spectacle d'une effeuilleuse. Commentaire de Bill : « Reluquer des dames se mettre toutes nues, c'est un des privilèges qui semble l'avoir poussé à investir dans ce film. Allez comprendre… »

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Victor Chartrand, photographié en 2005 aux côtés de la starlette Phoebe Price, lors d'un défilé de mode à Beverly Hills. Commentaire de Bill : « Il a vieilli et s'est de toute évidence teint les cheveux mais c'est bien notre homme. Le fait qu'il ait au bras une jeune et jolie créature devrait vous donner une idée du type de personnage auquel on a affaire… et sur la façon dont il semble avoir choisi de consacrer ses années de maturité et son surplus d'argent. »

Parlez-nous un peu plus en détail de Jimmy Williams…

Bill Mills : « Jimmy est un type complexe. Après avoir étroitement collaboré avec lui pendant plusieurs années, je dirais que c'est un individu doté d'une double personnalité, un mélange instable et déstabilisant avec d'un côté un artiste sincère, créatif et altruiste, et de l'autre un manipulateur égoïste dont la seule préoccupation est de maintenir son train de vie. Dans sa jeunesse Jimmy était plutôt balèze, en fait c'était un de ces "Monsieur Muscles" qui paradait sur les plages. Il faisait apparemment partie de la communauté des culturistes de Venice Beach, en Californie, et a commencé à travailler comme photographe pour les nombreux magazines qui étaient alors consacrés au bodybuilding. Je ne connais pas très bien son parcours, mais je crois qu'à un moment donné il a envisagé de faire carrière comme magicien, qu'ensuite il a commencé à faire un peu de figuration dans quelques films, et qu'en parallèle il a suivi des cours de cinéma à l'Université, avec l'envie de percer dans le milieu. »

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Jimmy Williams dans l'enfer du 'Nam.

Le nom de Jimmy Williams est omniprésent au générique, où l'on trouve aussi une "Josephine Williams" (co-productrice et co-scénariste), un "Kenneth J. Williams" (co-scénariste), ainsi qu'un "Robert Shaun Williams". Savez-vous de qui il s'agit ?

Bill Mills : « Josephine était l'épouse de Jimmy. "Kenneth J. Williams" était son nom légal (les quelques variations autour du nom "Williams" au générique cachent en fait la même personne, un peu comme moi avec "Mills"). Quant à Shaun Williams, c'était le petit-fils de Jimmy. »

Et son co-équipier et co-producteur Sandy Palm, que pouvez-vous nous dire sur lui ?

Bill Mills : « Sanford Palm était vraiment un chic type. Intelligent, compétent, travailleur, dévoué et loyal jusqu'à l'excès. Il était débordé par les innombrables demandes de Jimmy, qui le surchargeait de travail, mais il ne se plaignait jamais. Je sais qu'il avait été joueur de football [américain] quand il était au lycée puis à l'Université, et aussi qu'il avait combattu dans l'armée en temps de guerre. Il n'en avait pas l'air mais il avait une sacrée force physique, malgré son âge c'était encore un dur à cuire. Il avait aussi fait un peu de théâtre amateur. Autant Jimmy aimait les alcools forts comme le whisky ou la vodka, autant Sandy était lui un grand amateur de bière. Dans le film, la scène du night-club où son personnage dit à son partenaire "Tu sais que je n'aime pas la bière !" était une pure private joke, parce que c'est vraiment la dernière chose au monde que le vrai Sandy Palm aurait dite. Nous étions de bons amis, j'avais beaucoup d'affection pour lui, et son décès m'a profondément attristé.

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Que Jimmy, à son âge, et plus encore ce brave vieux Sandy, aient tenu les rôles principaux dans un film d'action, c'est un choix pour le moins insolite (et par là j'entends "complètement à côté de la plaque"). Il faudrait vraiment être myope au dernier degré pour ne pas voir le problème ! Mais je tiens à préciser, par égard pour sa mémoire, que ce n'était en aucun cas l'idée de Sandy. C'était l'idée de Jimmy, qui avait un égo démesuré et voulait se donner le beau rôle, pour se mettre en valeur. Sandy, lui, était quelqu'un de réaliste, lucide et très terre à terre… mais c'était aussi le meilleur ami de Jimmy depuis de très longues années. Du coup, si Jimmy avait décidé que Sandy serait son sidekick dans le film, Sandy n'y réfléchissait pas à deux fois et se mettait au garde-à-vous pour Jimmy. Sandy, c'était vraiment l'archétype de l'ami loyal, au soutien indéfectible, toujours là quand vous en avez besoin. Le seul problème en fait, c'est que le type avec qui il s'était lié d'amitié, ben c'était Jimmy. Du coup il ne pouvait pas faire grand chose, si ce n'est essayer de limiter la casse en jouant du mieux qu'il pouvait les scènes et situations que Jimmy et sa femme Joséphine avaient écrites dans le scénario. Mais je suis sûr qu'il aurait préféré avoir un rôle différent. D'ailleurs, Jimmy a dû finir par le comprendre puisque dans "Manosaurus", le film qu'il a réalisé dans la foulée de "Dans les griffes du dragon d'or", Sandy joue un scientifique. Le genre de rôle qui lui convenait tout à fait. »

Et William Smith, comment était-il ? Malgré son âge, l'avez-vous trouvé à la hauteur de sa légende ?

Bill Mills : « Complètement ! Les moments que j'ai passés avec lui font d'ailleurs partie des meilleurs souvenirs que je garde de toute cette expérience. J'étais déjà un fan de longue date de cet acteur, depuis que je l'avais vu en cowboy dans la série télé "Laredo" en 1967, et plus encore par la suite avec tous ses rôles d'éternel rebelle, ses films de bikers des années 60/70, son personnage de Falconetti dans "Le riche et le pauvre" ou sa baston contre Clint Eastwood dans "Ça va cogner". Du coup j'étais vraiment enthousiaste à l'idée de travailler avec lui, et je n'ai pas été déçu : avec Billy tout n'était que franche camaraderie, langage viril, blagues de soudard et grandes bourrades dans le dos, ce qui fait que vous aviez vraiment l'impression d'être avec un vieux pote.

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« Bill & Bill ! Cette photo a été prise par la maquilleuse, sur le tournage du film. Elle nous a pris par surprise, ce qui explique en partie qu'on n'y soit pas à notre avantage. Malheureusement c'était le dernier cliché qu'elle avait dans son Polaroid, et on n'a pas eu droit à une seconde chance. Même si elle n'est ni flatteuse ni réussie, je suis malgré tout très heureux d'avoir au moins une photo de Bill et moi. »

Bill Smith s'est avéré quasiment conforme à l'image qu'un fan transi pouvait avoir de lui : fort, plein d'assurance, droit dans ses bottes, physiquement imposant, et néanmoins amical et coopératif. Enfin, la plupart du temps… Jimmy et Billy, voyez-vous, étaient de vieux compagnons de biture. Et du fait des conditions de travail minables avec lesquelles nous devions composer, plus le tournage avançait, plus Bill Smith devenait maussade, et plus il était enclin à laisser Jimmy lui "remonter le moral" avec quelques verres. Quand ces deux-là étaient un peu trop imbibés, généralement vers la fin d'une longue journée de tournage, les choses pouvaient alors déraper. Par exemple, Bill était complètement bourré quand on a tourné la scène dans le temple au Viêt-nam, où il parle à la statue et vole le bijou. Du coup il s'est contenté de remuer les lèvres pendant presque toute la scène, la bouche pâteuse, en essayant vaguement de se souvenir de son texte. Plus tard, quand j'ai dû redoubler tous ses dialogues en post-prod, je peux vous dire que sa prestation bafouillante ne m'a pas facilité la tâche !

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Juste avant de tourner la scène où le Dragon gifle Tony Baker qui est attaché à une chaise, Bill et Jimmy s'étaient copieusement biturés, et bagarrés pour de rire comme le font souvent deux copains ivres. Quand la caméra a commencé à tourner, Bill avait le regard fixe et l'oeil vitreux. Je ne sais pas s'il a voulu faire une blague à Jimmy, se venger de lui, ou bien si c'est qu'il n'était plus vraiment maître de ses mouvements, mais il lui a alors foutu une beigne monumentale. Plus tard, Jimmy m'a confié : "La vache, je suis surpris d'avoir encore toutes mes dents !". »

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Tiens, tu l'as pas volée celle-là mon salaud !

Il me semble que William Smith a aussi connu quelques mésaventures sur le tournage, vous auriez des anecdotes ?

Bill Mills : « La pire dont je me souvienne, c'est lors de la séquence au Viêt-nam où son personnage d'Eric Brunner marche sur une mine anti-personnelle... Le dispositif mis en place par le pyrotechnicien était composé d'un mortier, dont le canon était enterré de sorte que l'extrémité affleurait à peine du sol. De cette façon là, quand on déclenche les explosifs placés dans le canon, ça produit une grande flamme verticale qui sort du sol, similaire dans le principe à une chandelle romaine. Malheureusement, à cause sans doute de l'incompétence du pyrotechnicien qui avait mal protégé son dispositif, de la terre et du sable ont glissé dans le canon et l'ont bouché. Le résultat c'est que quand on a tourné la scène, le mortier, au lieu de cracher sa charge à la verticale, a explosé comme une véritable bombe. La déflagration a été si forte qu'elle a envoyé valdinguer Bill Smith, lui faisant perdre connaissance pendant plusieurs secondes, et perdre l'ouïe pendant plusieurs heures. Sur le coup j'ai bien cru qu'on venait de tuer notre vedette. Je peux vous dire qu'on est passés très près d'un drame, et que personne n'en menait large sur le plateau. William Smith a finalement pu reprendre ses esprits, et je ne l'ai jamais entendu se plaindre ni même mentionner cet incident par la suite.

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Note de Nanarland : le pire c'est que cette scène se passe de nuit et que la mise au point est complètement floue ! Le caméraman a dû filmer de loin en étant à fond de zoom. Ca valait bien la peine de faire prendre des risques à William Smith…

Il y a aussi cette scène où William Smith tient le serpent "baby" dans ses bras. Pendant qu'on tournait cette séquence, le serpent l'a mordu au beau milieu d'un dialogue ! J'étais là, j'ai tout vu, et je vous jure que c'est vrai : on a tous vu la tête du serpent le frapper en un éclair, puis du sang commencer à couler de sa main, mais personne n'a rien dit parce que la caméra tournait et que le preneur de son enregistrait. Fidèle à sa réputation de type coriace, William Smith n'a pas bronché. Il a continué à réciter son texte jusqu'à la fin de la prise, et attendu que Jimmy crie "Coupez !". C'est seulement à ce moment-là que tout le monde a pu cesser de retenir son souffle, et tandis qu'on se pressait autour de lui, Bill Smith a dit d'une voix très calme : "Enlevez-moi cette saloperie avant que j'en fasse une ceinture". Le propriétaire du serpent s'est précipité pour récupérer sa bestiole, et après qu'on lui ait désinfecté la plaie et appliqué un bandage (et après qu'il ait bu un verre de vodka !), Billy était prêt à reprendre le travail. »

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Hello "Baby" !

Que ce soit au niveau des effets spéciaux ou des décors, "Dans les griffes du dragon d'or" fleure bon le cinéma artisanal...

Bill Mills : « Oui, pour la confection des décors c'était vraiment l'art du Système D. On a notamment tourné dans les locaux de la Los Angeles Science Fiction Society, à Burbank, où je m'étais débrouillé pour louer un peu d'espace pour pas cher. Avec les moyens du bord, on a d'abord transformé ça en nightclub, le "Kit Kat Klub" où chante le personnage de Marjie McGee (Donna Cherry). Il y a d'ailleurs un joli faux raccord quand elle chante sur scène, puisqu'on la voit alternativement portant une veste, puis sans veste, puis à nouveau avec une veste ! Et la pièce qui lui sert de loge d'artiste dans le film, c'était en fait… des toilettes ! En bas de la porte, vous pouvez même voir l'espace où il y avait le petit signe "libre / occupé". »

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En ouvrant cette porte, le fringant détective Tony Baker se rend-il :
A) dans la loge de la chanteuse Marjie McGee ?
B) aux toilettes ?
(Réponse : les deux)


« Du jour au lendemain, ce nightclub est ensuite devenu un hôpital. Comme nous n'avions évidemment aucun équipement médical, là encore il a fallu improviser. J'ai bricolé un truc à partir d'un couvercle de glacière en polystyrène, que j'ai peint de couleur argent, et dans lequel j'ai planté quelques touches et boutons. J'y ai ajouté une rallonge de casque audio - un de ces vieux modèles qui avaient un boîtier pour régler le volume - et on a accroché ça au-dessus du lit du patient. Toute la magie du cinéma ! »

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« Vous pouvez voir le boîtier en polystyrène au-dessus du lit. Quant à la perf dans le coin à gauche, c'était juste une bouteille d'eau minérale en verre, qu'on a retournée et accrochée à un pied de micro. »

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« Le bureau du médecin légiste, ainsi que l'entrée du dojo, ont également été bricolés dans les locaux de la Los Angeles Science Fiction Society. »

Vous mentionniez un faux raccord, dans la scène où Donna Cherry chante. Vous avez d'autres exemples d'erreurs comme celle-là dans le film ?

« A un moment, on voit un des bad guys - celui qui tente de voler de la drogue au Dragon - exploser dans sa camionnette. Il s'agit de Ron Hinton, qui était mon voisin de palier à l'époque. Le souci, c'est qu'on le revoit un peu plus tard, debout à côté du Dragon, qui leur ordonne à lui et deux autres sbires d'aller tabasser O'Malley à Tijuana. Oups ! »

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Ron Hinton pique de la drogue à son boss, il monte dans son pick-up rouge, le pick-up explose. Quelques minutes plus tard, Ron Hinton (à gauche de l'écran sur la dernière image) reçoit des instructions de son boss.

Il y a aussi un splendide faux raccord à la fin du film…

« Ah oui, vous faites sans doute référence à la couleur du costume que porte Daniel Kong dans la dernière scène. C'est vrai qu'elle alterne entre le bleu et le blanc… mais figurez-vous qu'il y a une explication à ça !

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Un faux raccord d'anthologie. Ici, Minh, le personnage asiatique, est habillé tout en blanc…

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…et quand il se relève, le fond est devenu noir, et surtout la chemise de Minh est devenue bleue !

En fait, c'est dû à un accord que Jimmy avait passé avec la communauté bouddhiste qui dirigeait le temple que l'on voit sur les plans en extérieur. Les bouddhistes nous avaient autorisé à filmer leur temple, sous couvert qu'ils approuvent les scènes dans lesquelles nous allions intégrer ces plans. Le scénario leur importait peu… mais quand ils ont vu la scène une fois montée, avec le personnage joué par Daniel Kong habillé tout en blanc, ça les a mis hors d'eux. Le truc c'est que dans leur communauté, le blanc était exclusivement réservé aux prêtres de très haut rang. Du coup ils ont menacé de ne pas nous donner leur accord pour utiliser les plans du temple, à moins que l'on change ça. Jimmy a alors eu une "brillante idée" : il a demandé au laboratoire chargé de développer les négatifs du film de légèrement teinter cette scène en bleu, afin que les vêtements portés par Daniel ne paraissent plus blancs. Le résultat laisse à désirer… sur certains plans ils ont l'air blancs, sur d'autres bleus, et j'imagine que les différentes copies du film et la façon dont les éditeurs vidéo on étalonné leurs masters n'ont pas dû arranger les choses. »

Vous teniez je crois à réagir aux propos que nous a confiés Tommy Bull ?

« Oui, en effet. Tommy est quelqu'un d'un peu allumé, avec une forte personnalité, mais on s'entendait à merveille et je garde vraiment un super souvenir de notre collaboration sur ce film. A l'époque il était encore assez jeune, et débordait littéralement de cette fougue et de cette impétuosité qui caractérisent la jeunesse, ce qui avait tendance à en agacer certains, et en premier lieu Jimmy Williams. Le tournage de "Dans les griffes du Dragon d'Or" s'est étalé sur une longue période, et comme à l'époque Tommy a aussi travaillé sur d'autres productions, je soupçonne sa mémoire de lui jouer des tours. Dans la grande scène de baston finale par exemple, contrairement à ce que Tommy vous a dit, il n'y a jamais eu d'audition avec 200 postulants. En réalité on a eu toutes les peines du monde à réunir les 10 ou 12 types qu'on voit au final dans cette scène ! D'ailleurs plusieurs d'entre eux étaient des amis à moi que j'ai dû supplier de nous aider, parce qu'on manquait cruellement de volontaires prêts à travailler de nuit pour des nèfles. Et la plupart des autres, c'était des sbires déjà présents dans d'autres scènes du film.

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Cette scène de baston a en fait été tournée deux fois, à plusieurs mois d'intervalle. La première fois, c'est Jimmy Williams qui était aux commandes. Pour artificiellement accélérer l'action, Jimmy avait eu l'idée de ralentir la vitesse d'enregistrement de la caméra. C'était une mauvaise idée. L'effet produit était grotesque, et rendait la scène risible. Du coup il a fallu retourner en partie cette séquence. Apparemment Jimmy avait dit à Tommy qu'il lui laisserait chorégraphier et réaliser les nouvelles prises, et puis Jimmy a fait machine arrière, plus très chaud à l'idée de confier les rênes au fougueux Tommy. Mais Tommy n'a rien lâché, en lui rappelant de façon agressive la promesse qu'il lui avait faite, et Jimmy a finalement cédé. Pour assurer le coup, Jimmy a dégotté un étudiant en cinéma, Chris Bernal, et il nous a dit à Chris et moi que nous devrions prendre toutes les décisions en terme de réalisation, et que Tommy ne devrait s'occuper que de la chorégraphie. Là dessus Jimmy a quitté le plateau, et on ne l'a plus revu. A mon avis il avait les boules de lâcher son poste de réalisateur, mais il n'en a probablement rien dit à Tommy. Au final, la séquence a été mise en scène et chorégraphiée de façon collégiale, par Chris, Tommy et moi. »

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En début d'entretien vous nous disiez que vous aviez dû "doubler ou faire redoubler la quasi-totalité des dialogues du film"… vous pourriez développer ?

« Durant la phase de post-production, il a fallu redoubler environ 75% du film ! La raison c'est que pour certaines scènes les bandes-son enregistrées pendant le tournage ont été perdues ou abîmées, que d'autres scènes ont été tournées sans prise de son par manque de moyens, et aussi qu'il a fallu modifier certains dialogues pour résoudre des problèmes de continuité apparus au montage. Il a donc fallu ré-enregistrer un très grand nombre de dialogues, ce que nous avons fait non pas dans un studio professionnel mais… dans mon petit appartement du Nord d'Hollywood, avec un simple enregistreur à cassette DAT, la copie finale du film sur K7 VHS et une télé avec un écran de 50 cm.

Pendant plusieurs mois, la plupart des principaux acteurs du film (Jimmy Williams, Sandy Palm, Donna Cherry, Trudy Adams, Robert Z’Dar, Gerald Okamura, Daniel Kong…) ont donc défilé chez moi, s'asseyant devant le téléviseur qui diffusait les extraits de film les concernant, et relisant leur texte, tandis que moi j'enregistrais leur voix et je les coachais un peu. Pendant le tournage, du fait qu'il fallait aller vite - et surtout du fait que Jimmy ne dirigeait pas ses comédiens - le jeu des acteurs n'était souvent pas très bon. Pendant ces sessions de doublage, ils se voyaient en quelque sorte offrir une seconde chance, et tous ont saisi l'opportunité d'améliorer leur performance.

Mais comme la post-production s'est faite deux voire trois ans après le début du tournage, certains comédiens n'étaient plus disponibles pour enregistrer leurs dialogues. C'était notamment le cas de William Smith, et de quasiment tous les rôles secondaires. Du coup je me suis retrouvé à devoir doubler plus d'une vingtaine de personnages (dont un personnage féminin !), ainsi que la totalité des dialogues de Bill Smith. Si vous ajoutez à ça tous les "hiiiiiya !!!", les cris dans les combats, les hurlements de douleur, les grognements étouffés quand un personnage se prend un coup, une balle ou chute au sol etc., au final ma voix est omniprésente dans la version originale de ce film.
»

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Pour l'anecdote, notons la présence de Jack Birch dans le rôle d'un GI lors de la séquence d'introduction au Viêt-nam (à gauche). A droite, le même acteur dans "Road of Death" en 1973. Birch est un ancien acteur porno. Il a notamment joué dans "Gorge Profonde", dont il a épousé l'héroïne Carol Connors. Le couple a tourné plusieurs films X ensemble. Jack Birch et Carol Connors sont par ailleurs les parents de Thora Birch, l'héroïne de "Ghost World" et "American Beauty".

« J'ai également créé des bruitages et divers effets sonores, enregistrés avec le concours d'Alexandra Carlyle. Au final j'ai assuré l'intégralité du montage de la bande-son (c'est-à-dire le découpage et la synchronisation de tous les dialogues, de tous les bruitages et de toutes les musiques avec les images du film), le tout mixé sur un appareil à bandes 3 pistes. J'avais même composé un thème musical dans un style country-rock pour le générique de fin, mais contrairement à ce que Jimmy m'avait promis il n'a pas été utilisé. »

Avec le recul, quel regard portez-vous sur votre contribution à ce film ?

« C'était une sacrée expérience mais j'en garde un souvenir pour le moins amer, à cause de la façon dont la production a géré le tournage, de ce à quoi ressemble le film au final, et de promesses non tenues par le réalisateur/producteur. C'était beaucoup de boulot parce que j'étais producteur délégué, autrement dit je m'occupais d'une foultitude de petites choses qu'on me chargeait de régler quand il n'y avait personne d'autre pour s'en occuper. Comme je vous l'ai déjà raconté j'ai conçu les accessoires, les bruitages, meublé les décors, supervisé l'enregistrement des dialogues avec les acteurs disponibles, doublé moi-même les acteurs indisponibles, assuré le montage et le mixage de la bande-son, mais j'ai également assuré le repérage et le planning des lieux de tournage, co-réalisé certaines scènes avec la seconde équipe, servi de doublure sur quelques plans, aidé à bricoler quelques (mauvais) effets spéciaux, tenu le rôle du Détective Pat Carlyle, écrit les dialogues de la scène que j'ai en commun avec la "star" Jimmy Williams, j'ai aussi piloté la voiture qui défonce l'entrée d'un garage et percute un des méchants, j'ai même fait quelques cascades dans la scène de baston générale à la fin, et j'en oublie probablement encore. »

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Que ce soit l'intérieur d'un temple (matez ce sol : un coin de tapis, un bout de moquette, du plancher en contreplaqué et un morceau de gerflex !)…

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…ou l'entrée du Kit Kat Klub, les décors sentent quand même bien la misère.

« J'ai aussi fait venir pas mal de monde sur ce film, des amis comme Edward Green, Cary Martin ou Willem Griffin dans la scène de baston finale, Irene McGee qui jouait une flic, mon voisin Ron Hinton, et aussi Glen Blankenship, Casey Abbott et tous les musiciens qui jouent dans le Kit Kat Klub. Certains n'étaient là que l'espace d'une journée et ont trouvé ça amusant, mais pour ceux qui ont travaillé plus longtemps et n'ont pas été payés, c'était beaucoup moins drôle. D'ailleurs depuis le tournage certains ne m'ont plus jamais adressé la parole, ils m'en veulent de les avoir entraînés dans cette galère… et je ne peux pas leur en vouloir pour ça. »

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Thank you Bill !

Cote de rareté : 1/Courant

"Dans les Griffes du Dragon d'Or" est disponible en DVD français chez l'éditeur "FIP" (First International Production). Une galette basique, sans bonus, qui est disponible pour une bouché de pain sur les sites de vente en ligne. Le visuel est identique à l'édition VHS, déjà distribuée par FIP et éditée par Partner & Partner. Une autre édition VHS est sortie sous le titre "L'Ombre du Dragon".

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La VHS américaine.

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 01 Avr 2014 23:16 
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Ah bah tiens, je pensais justement à ce film cet après-midi.
Un premier avril, c'est une bonne date pour rendre hommage à un vaste gag involontaire comme "Dans les griffes du Dragon d'or".
Une chronique à la hauteur de l'attente et du film, on ne peut que s'incliner devant un aussi colossal labeur, surtout quand c'est l’œuvre de toute une vie de nanardeur. Respect et prosternation admirative. :worship: :worship: :worship:
Je retrouve dans ce texte fleuve toute la magie de ce film unique. C'est quand même incroyable qu'un film aussi mal branlé soit aussi fun à regarder. Le miracle du nanar.

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 02 Avr 2014 13:57 
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Espérons que l'on puisse trouver un moyen de passer cette chronique sur le site parce que le boulot d'investigation... WAOOH !

Le DVD contient la VO ? Parce que quelqu'un qui double une vingtaine d'acteur dans son petit studio, on ne doit pas entendre ça tous les jours.

Ca se lit vraiment assez vite. Les anecdotes sont tellement croustillantes qu'on a envie d'en savoir plus. Et on sent que si on pouvait retrouver encore quelques personnes ayant travaillé dessus, on en aurait encore au moins une centaine d'autres.

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 02 Avr 2014 14:10 
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Plissken a écrit:
Ca se lit vraiment assez vite. Les anecdotes sont tellement croustillantes qu'on a envie d'en savoir plus. Et on sent que si on pouvait retrouver encore quelques personnes ayant travaillé dessus, on en aurait encore au moins une centaine d'autres.


En fait j'ai obtenu il y a quelques jours le contact de Jimmy Williams himself, qui m'a renvoyé un mail avec son numéro de téléphone et son accord pour une interview. Mais cette chronique prenait de telles proportions que j'ai préféré la publier en l'état plutôt que de repousser encore. Ceci dit, au point où j'en suis l'avis de Jimmy Williams devient nécessaire : c'est quand même lui le réal et la vedette. Si cet entretien se concrétise je ne manquerai bien sûr pas de le publier ici ! Je vais aussi en profiter pour lui demander s'il sait comment on pourrait se procurer certains de ses films comme "Manosaurus", qui semble avoir du potentiel mais demeure complètement introuvable (un film de Jimmy Williams de 1994 avec Sandy Palm en scientifique qui créé un hybride homme/dinosaure, le tout produit par le Dr Victor Chartrand ? Putain il faut que je vois ça !!).

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 08 Avr 2014 7:53 
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Hail to John Nada qui en une chronique et 2 interviews ressuscite l'esprit Nanarland des années 2000. C'est sans doute parce que sa chro a débuté dans ces années-là. :-D

Très bon texte qui met bien en valeur la fascinante nullité mollassonne de ce film dont je conserve un très bon souvenir nanar. Les interviews sont tout aussi excellentes et lustrent encore un peu plus l'éclat nawak de cette œuvre enfanté dans de bien drôles de souffrance. Certes, y'a un côté pathétique dans ces fins de carrière éthylique et j'ai même eu un peu de peine pour le bon docteur à qui on a dû faire miroiter le strass hollywoodien pour lui soustraire ses économies... jusqu'à ce que je vois la photo plus récente. Le mec a l'air de s'en être bien remis (et il a la même la tronche de quelqu'un prêt à remettre le couvert pour le plaisir des effeuilleuses !).

Ça me donne envie de me remettre à ma chro de Road to Revenge, surtout que William Smith figure là aussi au casting.

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"T'as vu, les œufs sont cuits à l'envers..."


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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 09 Avr 2014 14:04 
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Nanarland lui doit beaucoup
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Kobal a écrit:
Ça me donne envie de me remettre à ma chro de Road to Revenge, surtout que William Smith figure là aussi au casting.


Oh oui, "Road to Revenge" mérite sa chro (d'ailleurs je ne savais pas que tu l'avais attaquée !). Et si William Smith joue dedans, c'est sans doute parce que son pote Jimmy Williams l'a entraîné dedans : sur "Road to Revenge" Jimmy est producteur délégué, costumier et tient un petit rôle. Faudra que je l'interroge sur ce film aussi...

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 12 Avr 2014 7:55 
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Vu le film pour l'occasion.

Je ne peux qu'applaudir au travail de chercheur digne des archéologues les plus chevronnés, pour une œuvre fort dense. C'est en effet un nanar de compétition, au moins digne de "Megaforce", et "Ultime combat", où absolument rien ne fonctionne et tout est absolument hilarant, y compris les scènes les plus dramatiques.

Ce qui m'a surtout frappé, c'est le caractère looser de nos deux héros: Bien que ce soit des casse-cous et qu'ils se tapent de jolies nanas, ils foirent tout ce qu'ils entreprennent, tombent dans des pièges qu'un boy-scout prépubère aurait vu venir, se font latter en baston comme des merdes (quelles bastons d'ailleurs, sans doute chorégraphiées par le spécialiste des films de Cetin Inanc), ne trouvent des indices que par hasard et se font engueulés comme des merdes par leur boss.

Ce n'est plus deux flics à Miami, mais deux looser en Californie! Ca m'a rappeler le film "Mittchell" avec Joe Don Baker, sauf que ce dernier est une bonne série B.

Ah puis il y a cette impression tenace au vue du grain de caméra que le film a été tourné dans les années 1970 alors qu'il le fut au début des années 1990, un an avant "Jurassic Park".

Bref, après "Cyborg cop", les années 1990 révèlent encore leur lot de trésor.

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Pour qui sonne la glace, celui-là, je l'ai refroidi!


Dernière édition par Paul Kersey le 24 Avr 2014 6:02, édité 1 fois au total.

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 18 Avr 2014 8:12 
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Revu aussi pour l'occasion.

Il est vraiment très nase !

Beau boulot comme d'hab John !

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 27 Nov 2016 23:03 
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La chronique est désormais en ligne : http://www.nanarland.com/Chroniques/chr ... -d-or.html

J'ai finalement pu intégrer les interviews en pages annexes, avec les liens en fin de chronique, et à droite dans "liens utiles".

Quelques menues modifs par rapport à la version postée sur ce forum, et ajout d'une 3ème interview : celle du réalisateur/producteur/interprète principal Jimmy Williams !

Je crois que j'ai jamais passé, et ne passerai plus jamais autant de temps sur une chronique. Je l'avoue, c'est complètement idiot mais j'ai eu le béguin pour ce film (car pour la petite histoire on se l'était maté avec François "Drexl" Cau avant même de connaître Nanarland - qui n'existait pas encore d'ailleurs - dans l'optique, déjà, de se taper un nanar pour rigoler). Avec trois interviews j'ai vraiment le sentiment d'être allé au bout du truc, même si j'aurais sans doute été plus avisé de consacrer mon temps de recherche, traduction, illustration etc. à un plus gros morceau, ou un titre plus "vendeur", voire à chroniquer d'autres films. Bref, j'ai eu le béguin je vous dis, et ça ne s'explique pas...

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 28 Nov 2016 19:48 
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Ça fait bien plaisir de voir toutes ces nouvelles chroniques en ligne ! :D

L'interview de Jimmy Williams est passionnante. On bave à l'idée d'une sortie de "Manosaurus" et "The education of a vampire" en copies remasterisées dans un coffret édition de luxe en trio avec "Dans les griffes du Dragon d'or"; j'imagine bien le coffret collector "Légendes d'Hollywood : Jimmy Williams, l'intégrale" avec sur le boitier une photo noir et blanc de Jimmy en mode intime, gros plan, sourire en coin, menton posé sur le pouce et regardant l'acheteur droit dans les yeux...

Super boulot !

(Edit : le passage sur William Smith m'a rappelé que j'ai la chro de "Seven" d'Andy Sidaris qui poirote depuis bientôt trois ans; même du temps de sa gloire, l'Homme :worship: a parfois tourné dans des nanars, rien que le fait que son sidekick dans ce film d'action soit une poupée gonflable vaut bien une chronique)

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 28 Nov 2016 23:16 
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Localisation: Près de Paris...
Alors là, je dis respect! Traiter un nanar ainsi, si ce n'est pas une preuve d'amour, je sais pas ce que c'est...

Bravo pour tout le taf' fourni, très belle chro' et interviews très sympathiques, je suis réellement impressionné!

:worship01: :worship01:

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"Quand un gars court après une femme la queue à l'air et un couteau de boucher à la main, c'est drôle, j'ai peine à croire qu'il quête pour la Croix-Rouge."

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 29 Nov 2016 20:04 
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Docteur es nanarologie
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Felicitations a John nada et a la team nanarland, ce film meritait amplement de figurer sur le site. Voici enfin un dur travail de nanardeur recompense et cela fait plaisir.

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 16 Déc 2016 13:31 
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Mon Dieu la tête à bébert ! On dirait un mix entre un pizzaïolo cocaïnomane et Ron Jeremy. D'ailleurs je suis sûr si il avait survécu au prince du film de cul, il aurait probablement été choisi pour faire son film biographique.

Bon à part ça, je sais que Z'dar a la tête qu'il a à cause d'une maladie (mais c'est quand même marrant).

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"Monica, sorcière-vampire, a le pouvoir d'envahir avec ses vampires. Cooper envoie des crocodiles mangeurs d'hommes pour créer un chaos. Seul Jack, un homme honnête, peut mettre fin à ces horribles tueries." -
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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 22 Déc 2016 19:09 
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Les interviews sont une véritables mines d'or.


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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 22 Déc 2016 21:54 
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Grand Nanardeur
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Messages: 975
Localisation: Localisation non trouvée (d'après mon appli météo)
On a vraiment de la peine pour Tommy Bull, lui qui s'est tellement investi dans ce film pour le rendre le plus potable possible et qui n'y est même pas arrivé. Un tel dévouement pour un film condamné dès le départ, ça force le respect.

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En revoyant La liste de Schindler, j'ai tout de suite pensé à Deux sœurs à enculer. (Jack Tillman, 2021)

à bas la nanarploitation !


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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 23 Déc 2016 19:01 
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Maîtres es Nanar
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Inscrit le: 05 Oct 2007 21:09
Messages: 1203
On ressent bien l'ambiance épouvantable qu'il peut y avoir lors du tournage d'un vrai nanar.

Ça avait été le cas de The Room, même si ce dernier disposait au moins d'un budget conséquent pour une production indépendante.


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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 25 Déc 2016 3:16 
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Elbidasse a écrit:
Mon Dieu la tête à bébert ! On dirait un mix entre un pizzaïolo cocaïnomane et Ron Jeremy. batteries solaires D'ailleurs je suis sûr si il avait survécu au prince du film de cul, il aurait probablement été choisi pour faire son film biographique.

Bon à part ça, je sais que Z'dar a la tête qu'il a à cause d'une maladie (mais c'est quand même marrant).



m'a vraiment plutôt fait rire avec sa tête,je le trouve quand même drôle ....un bon souvenir


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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 28 Déc 2016 13:33 
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Inscrit le: 01 Oct 2003 15:13
Messages: 5363
Localisation: Grenobyl
jean23 a écrit:
Elbidasse a écrit:
Mon Dieu la tête à bébert ! On dirait un mix entre un pizzaïolo cocaïnomane et Ron Jeremy. batteries solaires D'ailleurs je suis sûr si il avait survécu au prince du film de cul, il aurait probablement été choisi pour faire son film biographique.

Bon à part ça, je sais que Z'dar a la tête qu'il a à cause d'une maladie (mais c'est quand même marrant).


m'a vraiment plutôt fait rire avec sa tête,je le trouve quand même drôle ....un bon souvenir


Oui, enfin vers la fin ça devenait moins drôle, il ressemblait à ça :

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Sinon j'ai échangé quelques mots avec Ed Sanchez, car je rêverais vraiment de voir un jour Manosaur(us). Hélàs, il me dit que c'est mort de chez mort, car même la copie de travail s'est dégradée au-delà du réparable :(

Citer:
Unfortunately, even the work print no longer exists, having deteriorated beyond redemption.


Seule consolation, il m'a fait suivre l'affiche (très sommaire) du film, et quelques photos de tournage. Voici donc en exclu mondiale, brought to you by Nanarland :

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Ed Sanchez en train de construire une maquette pour Manosaurus : "Besides writing the script for Manosaurus, I created the monster makeups and built a miniature set to double for an actual location so we could blow it up."

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La même maquette, après son explosion dans le film.

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William Smith, fidèle au poste.

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 Sujet du message: Re: Dans les griffes du dragon d'or - Jimmy Williams (1992)
MessagePublié: 29 Déc 2016 19:34 
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Nanardeur fou ?
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Localisation: Quelque part entre les bornes et les limites
Entre ça et le topic des décès, c'est la semaine des mauvaises nouvelles. :(
Les photos font méga-envie, quel supplice. Une réunion William Smith/Vernon Wells en plus...

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