L’AVION DE L’APOCALYPSE
(Aka : Incubo sulla città contaminata / La Invasión de los zombies atómicos / City of the walking dead / Nightmare city / L’Invasion des zombies)
On ne devrait pas toujours se fier au seul avis d’autrui. Un confrère nanardeur et cinéphile éminent m’avait ainsi refilé le DVD de ce film en maugréant, d’un air désabusé, «Mouais, j’ai été déçu, c’est plutôt un navet… » M’abandonnant le précieux objet comme une vieille chaussette, mon camarade me quitta en se dirigeant d’un pas traînant vers la projection du film «Les Gaous » qu’il essayait de voir en entier pour la troisième fois afin de pouvoir mettre à jour sa chronique.
Autant dire que, me fiant à l’avis éclairé d’un cinéphile distingué, je n’attendais pas grand-chose de ce film, m’attendant à voir une bisserie soporifique. Poussé par le masochisme, j’enfournais le DVD dans mon lecteur, et j’eus alors l’agréable surprise de passer un très agréable moment en regardant cet «Avion de l’apocalypse » plaisamment grotesque.
Nous n’atteignons pas ici les sommets de «Virus cannibale », car le film est très correctement réalisé et rythmé, ne s’aventurant pas vers les niveaux de démence d’un Bruno Mattei. Mais l’idiotie de cette pseudo-invasion de zombies, la ringardise des effets spéciaux, l’ineptie de certains rebondissements, alliés à une mise en scène plutôt solide, font cette «Invasión de los zombies atómicos » italo-hispano-mexicaine un très agréable spectacle.
Les passagers d’Air France sont en révolte !
Commençons par définir précisément le postulat du film : contrairement à ce que pourrait laisser croire le titre hispanique, ou même le visionnage de certaines scènes, il ne s’agit aucunement d’une histoire de zombies ! Les créatures qui menacent le monde dans ce film ne sont pas des mort-vivants mais des hommes atteints par un virus qui les a changés en fous sanguinaires. A part cela, ils sont tous pourris, et on ne peut les tuer qu’en leur tirant dans la tête (le virus les ayant rendus invulnérables). Ben, heuuuu, c’est quoi la différence avec des zombies, alors ? On peut noter qu’ils courent (ce qui les rend d’ailleurs plus efficaces que des mort-vivants classiques, quoi que puissent dire les puristes) et font preuve à l’occasion d’une certaine intelligence, en utilisant parfois des armes et en usant de stratégies d’attaques. L’explication réside dans les pressions de la production, qui imposa au réalisateur Umberto Lenzi de rendre les créatures le plus semblables possible aux zombies de George Romero. Lenzi parvint à imposer certaines idées, mais ne put éviter d’en faire un film de « demi-zombies ».
On notera cependant que l’idée des zombies/contaminés qui courent fut joyeusement reprise plus tard dans «28 jours plus tard » et «L’Armée des morts », mais nous ne viserons personne en particulier.
Les programmes de la TNT, c’est pas encore ça…
Outrés par tant de mauvais goût, les zombies envahissent le studio de télé !
Cette parenthèse étant refermée, on pourra apprécier «L’Avion de l’apocalypse » pour ce qu’il est : un bis italien correctement troussé (Umberto Lenzi, bon professionnel de la mise en scène, n’atteint pas ici le ridicule de «La Guerre du fer ») mais contenant de belles perles nanardes.
On passera sur le point de départ des contaminés qui descendent de l’avion du titre, porteurs du virus, en tuant tout le monde sur leur passage : il en vaut un autre. Mais attardons-nous plutôt sur ce qui fait tout l’intérêt et la crédibilité des scènes mettant en vedette les contaminés : leurs maquillages ! Haaaa, le beau travail que voilà ! Les mort-vivants de «Virus cannibale » faisaient penser selon les scènes à des steaks ambulants ou à des mimes enfarinés , ceux-là semblent avoir obtenu leur look en se faisant tartiner la gueule avec de la crotte de pigeon ! De pures merveilles de maquillage nanar qui, associées aux grimaces des figurants, transforment toutes les scènes d’attaques en moments de haute comédie !
Sapristi, il y a même un moustachu nanar !
Un autre atout pour le versement dans la nanardise du film réside dans la prestation des comédiens. Le rôle principal du journaliste télévisé est tenu, co-production oblige, par l’acteur mexicain Hugo Stiglitz, héros de «La Nuit des mille chats ».
Hugo Stiglitz : sa barbe est plus charismatique que lui !
Mais quel comédien ! Quelle expressivité ! C’est bien simple, on dirait une tranche de mou de veau avec des poils de barbe ! Inconsistant comme une méduse, Hugo Stiglitz nanardiserait n’importe quel personnage de héros ! En comparaison, sa partenaire italienne, Laura Trotter (vue également dans "Rush"), fait des efforts héroïques pour donner l’air d’y croire, mais sa motivation se retourne contre elle : on ne joue pas dans un film d’horreur bis comme si on était interprétait Pirandello sur la scène de la Fenice…
N’ai-je donc tant vécu que pour cette infâmie ? Etre l'héroïne d'un nanar pareil !
Heu…Hugo, tu pourrais te bouger un peu ? On joue notre grande scène d'émotion, là…
J’en ai marre de travailler avec des mexicains inexpressifs, je suis une grande actrice, moi !!!
Francisco Rabal, grand acteur espagnol qui travailla notamment avec Luis Buñuel, traverse quant à lui le film avec une indifférence si profonde que les airs de Droopy de Robert Ginty en paraîtraient quasiment expressionnistes.
Y’a pire : après, j’ai joué dans «Le Jour et la nuit » de Bernard-Henri Lévy…
On peut en dire autant de Mel Ferrer, acteur hollywoodien prestigieux, naufragé depuis longtemps dans la série B européenne, qui interprète un général à la remarquable inefficacité : ses scènes semblent avoir été tournées en trois jours dans un sous-sol de la maison du producteur…
Bon, hips , whisky pour tout le monde, hips ! Je vais vous raconter des anecdotes de tournage de «Scaramouche » !
Sans atteindre des sommets nanardesques, «L’Avion de l’apocalypse » contient, à mon humble avis, de belles perles qui en rendent la vision plaisante. Figurants démotivés (ou trop motivés), dialogues bêtifiants ou n'importequouesques («En lésionnant [sic] les centres nerveux, on peut provoquer la paralysie qui dans ce cas devrait entraîner la mort par inanition» ), effets spéciaux douteux, agrémentent un film qui nous gratifie par ailleurs de l’un des plans nichons les plus gratuits de l’histoire du cinéma, lorsqu’un contaminé dépoitraille sa victime d’un geste rageur avant de la trucider ! (Non, non, ma réputation étant déjà faite sur ce plan-là, vous n’aurez pas d’image de la scène !)
Mon Dieu, c’est horrible ! Ces maquillages sont vraiment trop mauvais !
Splotch !
Ciel, un zombie communiste!
Ajoutez à cela une des fins les plus stupides de toute l’histoire du cinéma, et vous aurez un petit nanar très consommable, que sa qualité technique rend d’autant plus visible. A consommer en apéritif, avant de passer à des choses plus costaudes !
L’AVION DE L’APOCALYPSE
Réalisateur : Umberto Lenzi
Pays : Italie / Espagne / Mexique
Année : 1980
Durée : 1 h 32
Genre : Le Sprint des mort-vivants
Catégorie : Horreur
Avec : Hugo Stiglitz, Laura Trotter, Mel Ferrer, Francisco Rabal, Maria Rosaria Omaggio
Nikita : 2
Cote de rareté : 2 (Trouvable). Le film a été édité plusieurs fois en VHS, par "Super Vidéo Productions" et par "Vidéo Spectacles". Réédité en DVD par Néo Publishing (qui a fait un travail soigné et propose les versions française, anglaise et italienne), on peut le dénicher sans trop de difficultés.