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Dans son petit appartement new-yorkais où il vit avec sa femme, Leeward, musicien talentueux et atypique, compose des morceaux à l'aide de jouets de sa fille de trois ans, Rainbow.
Lilas, jeune vidéaste, traîne sa valise de squats d'artistes underground en galeries branchées, en espérant percer dans le milieu fermé de l'art contemporain.
Leur rencontre pourrait bien les pousser à enfin accomplir leurs rêves...
Un film frais et léger (selon l'expression consacrée) sur l'univers des artistes new-yorkais, qui ne se perd pas dans une dissection d'un microcosme mais qui se focalise sur deux personnages forts : Leeward, l'auteur compositeur interprète lunaire vivant pour (et pas "de") son art et la jeune française Lilas de Castillon (Lola Bessis), fille d'une artiste mondiale reconnue cherchant à sortir de l'ombre de sa mère. Le film suit leurs parcours, leurs échecs, leurs refus, leurs dilemmes sans non plus glorifier leur mode de vie.
Aussi, si l'on se prend très vite d'affection pour le personnage de Leeward, qui passe ses journées chez lui à jouer de la musique avec ses amis et des gens de passage rencontrés dans la rue, on comprend aussi le point de vue de sa femme Mary, infirmière confrontée tous les jours aux drames de la vie, seule source de revenus stable du ménage et échouant continuellement à faire prendre conscience à son mari de l'importance de travailler pour gagner sa vie. On est aussi touché par le refus de Leeward de compromettre son art en vendant sa musique pour une pub télé que par la séquence où sa femme Mary va visiter une maison à vendre, rêvant ainsi d'une vie plus calme et plus stable.
Mais le couple fonctionne, leur amour est palpable et on comprend qu'elle endure les réunions de famille où les parents de Leeward confortent leur fils dans sa position d'artiste vivant pour l'amour de l'art tout comme on voit que le personnage de Leeward souffre de sa propre incapacité à sortir de son univers, quitte à s'enfermer parfois dans un mensonge puéril. Tout en étant conscient du mal qu'il fait à sa femme, il ne parvient pas à mettre une bonne fois pour toute les pieds sur terre et à saisir les opportunités qui s'offrent à lui. C'est là que sa relation avec Lilas est intéressante.
Swim Little Fish évite d'emblée le gros cliché du film donneur de leçons avec gros slogan VIVEZ LIBRE. Le film ne traite pas de la rencontre de deux incompris qui vont s'unir contre l'adversité. Lilas et Leeward suivent deux routes parallèles, n'ont pas la même vision de l'art, n'en sont pas au même moment de leur vie et ne se croisent finalement que par intermittence, chacun cherchant à trouver son propre équilibre de vie. Lilas lutte pour sortir de l'ombre de sa mère, s'obstine à y croire et à lutter quand tout et tout le monde lui dit d'abandonner tandis que Leeward vit dans une bulle qui menace d'exploser à tout moment. Lilas encourage Leeward à franchir une étape importante de sa vie, à enregistrer un album (quitte à
le distribuer gratuitement dans la rue après) tandis que Leeward rappelle à Lilas la beauté de vivre pour son art et offre un cadre rassurant, apaisant à la jeune artiste en pleine tourmente.
Swim Little Fish Swim c'est donc l'histoire d'une complicité faite de petits moments de poésie qui permettent de surmonter les coups durs. En d'autres mains, Leeward aurait été un connard mégalo refusant d'écouter son entourage et Lilas une grosse névrosée suicidaire et cyclothymique. Lola Bessis et Ruben Amar réussissent à faire de leurs héros des personnages justes, touchants, à la fois forts et vulnérables, obstinés et en proie au doute, sans que cela ne se concrétise par de longs discours frappés au coin du bon sens populaire. Un film qui ne donne pas de leçon, qui n'impose pas un point de vue, à la fin duquel rien n'est vraiment résolu, un feel good movie fait de petites émotions, qui ne veut pas être drôle et parvient à en devenir vraiment touchant et attachant, à l'image de ses personnages. Un film découvert presque par hasard, à la B.O. magique (malheureusement pas éditée) dont les titres m'ont rappelé les premiers albums de Mark Oliver Everett.
Bref, un film que je range direct dans mon top 10 des métrages sur la vie d'artiste, quelque par entre le
Man on the moon de Milos Forman (
Amadeus est hors-concours) et
Salut l'artiste de Yves Robert.
Ah oui, sinon, dernier détail, Lola Bessis, veux-tu m'épouser?
Bande annonce :
https://www.youtube.com/watch?v=5wN1QGStpYY