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Tomas Eldan (James Franco) est un écrivain en panne d'inspiration. Sur la route, il renverse deux enfant qui faisaient de la luge. L'un est indemne mais l'autre est tué sur le coup. Deux ans plus tard, devenu un auteur à succès, Tomas revient sur les lieux et se trouve face à face avec la mère des enfants (Charlotte Gainsbourg). On suit leurs parcours respectifs, elle portant sur son visage les marques de la douleur et du deuil, et lui s'enfermant dans une attitude stoïque, cause de bien des maux pour son entourage.
Un très beau film, pour peu qu'on accepte de se laisser porter par un récit tout en ellipse "Quatre ans plus tard". Mais c'est vraiment ce qui fait la force du film, se focalisant sur des morceaux de vies des deux personnages et sur leurs façons respectives de surmonter l'épreuve. Là où d'autres auraient pu poser la question "Qu'est ce qui est pire, perdre un enfant ou être responsable de la mort d'une personne?", Wenders nous montre juste deux portraits d'artistes (la mère est illustratrice), individus à fleur de peau qui tentent de gérer chacun à leur façon un drame horrible.
Loin de nous la jouer "tu la sens ma grosse pudeur", Wenders laisse son atmosphère se poser sur la durée, au risque de perdre certains spectateurs en route. Car il faudra l'entrée en scène du fils rescapé pour comprendre vraiment le propos du film : bien que se faisant répéter à l'envi qu'il n'est pas responsable du drame et que la mère et le fils ne lui en veulent pas, quelque chose s'est brisé en Tomas, qu'il n'arrive ni à comprendre ni à partager avec son entourage, et alors que la mère surmonte peu à peu la douleur de la perte, lui risque de s'enfermer à jamais dans sa culpabilité et son repli sur lui-même.
En résumé, un très bon Wenders, le réalisateur réussissant encore le tour de force de nous proposer un récit à la fois très épuré et très intéressant techniquement. Ainsi, un des premiers plans de James Franco est un regard caméra quand il s'adresse à des pêcheurs, regarde empreint de gentillesse qui tranchera avec d'autres plans du même type où il ne sera que froideur et dédain. De la même façon, l'idée d'illustrer l'enfermement psychologique de ce personnage par
deux travellings compensés (un au début et un à la fin) pour faire passer au spectateur le sentiment de longue parenthèse dans sa vie est vraiment excellente puisqu'on ne la comprend d'abord pas (à ce moment, Tomas ne sait pas encore qu'il y avait deux enfants sur la luge et ramène tranquillement le premier à sa mère tout en sentant que quelque chose cloche) et que ça n'est que la seconde, à la toute fin, qui la justifie. En clair, ce mouvement de caméra illustre le changement de perception du monde par ce personnage, puis un retour à la "normale".
Bande-annonce :
https://www.youtube.com/watch?v=Fl62PplyZis