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Deux enfants sont envoyés passer une semaine en Pennsylvanie, dans la ferme de leurs grands-parents. Mais lorsque l'un d'eux découvre qu'ils sont impliqués dans quelque chose de profondément dérangeant, leurs chances de retour s'amenuisent de jour en jour.
Ca fait un petit moment que je désespérais de revoir un jour un bon film de Shyamalan. Passé la bombe (aujourd'hui overspoilée) que fut en son temps
Sixième sens et un
Incassable qui fait partie de mes films préférés, la suite de sa filmo n'avait pas toujours été à la hauteur de ces excellents débuts (je ne parle pas de ses deux premiers films, que je n'ai pas vus...). Si
Signes restait redoutablement efficace en matière de jumpscare (mais décevait sur ses dernières minutes), si
Le Village possédait des atouts indéniables en matière de storytelling en faisant un film plus au fait de son époque qu'il n'y paraissait, on pouvait avoir par la suite le sentiment que l'univers du réalisateur se perdait petit à petit dans un magma hollywoodien où l'on sentait de moins en moins sa patte.
De ce point de vue, les premières images de
The Visit avait tout pour signer l'arrêt de mort du cinéaste, celui-ci semblant abdiquer tout projet un minimum personnel pour céder à la mode du found footage du
tapis de prière post-Paranormal Activity. Mais au final, ce film, sans égaler ses premières réussites, prouve que le monsieur a encore de la ressource et que, pour peu qu'il revienne à un cinéma plus épuré, a encore de quoi nous surprendre...
En effet, si l'on retrouve dans The Visit quelques travers propres au sous-genre du pseudo found footage, qui reviennent sempiternellement depuis Blair Witch, force est de constater que Shyamalan propose un film qui respecte les conventions tout en apportant une certaine finesse qui fait défaut à nombre des œuvres du même genre. Il y a tout d'abord ce sens du grotesque et du décalage, qui perdure tout au long du film et qui nous fait longtemps hésiter sur l'issue du film : va-t-on avoir affaire à un film d'horreur, un film fantastique ou juste à une version Cinéma de genre d'un film comme Festen? En effet, les scènes de tension sont, jusque très tard dans le film, contrebalancées par les réactions amusées ou effarées (donc marrantes) des enfants avec leurs
tapis de prière, qui acceptent le mutisme et l'excentricité de plus en plus inquiétante et malsaine de leurs grands-parents.
Mais c'est finalement dans son dernier acte que le film prend tout son sens, Shyamalan
donnant un pendant psychologique à l'adage cinématographique selon lequel "ce qu'on ne voit pas et qu'on imagine est plus effrayant que ce qu'on nous montre". En effet, si la mère avait "tout simplement" dit à ses enfants la raison de sa brouille avec ses parents au lieu de rester évasive, les enfants auraient compris bien plus vite que le couple avec qui ils passent leurs journées sont des imposteurs, au lieu d'interpréter le comportement erratique des deux vieux comme un refus d'évoquer le passé ou un ressentiment quant à leur fille.
Ainsi, sans renouveler le genre du found footage, The Visit parvient à en faire un film typiquement shyamalan-esque, avec une certaine finesse d'écriture qui lui est propre et qu'on croyait perdue ces derniers temps. Après, le film n'est pas non plus parfait (on y retrouve ce cliché particulièrement crispant de l'apprentie cinéaste à peine pubère qui tient un discours sur l'art cinématographique posé et construit en mode J'ai 14 ans et je n'ai déjà plus rien à apprendre sur le 7e art) mais il parvient sans peine à surclasser bien des autres film du même genre tout en se refusant les effets faciles et en proposant une horreur ouvertement grotesque ou le rire côtoie le glauque (ah, les scènes, et surtout la dernière..., sur les
couches lavables du Grand-père).
Shyamalan n'est pas mort, j'espère que la suite sera du même niveau !
Bande-annonce :
https://www.youtube.com/watch?v=Ngd42wen_3M