Bon, à la suggestion de Kobal, je poursuis la discussion entamée sur Rambo. Je n'ai pas envie d'en faire un long débat, mais bon, allons-y :
Kobal a écrit:
Tu as sans doute percu mon profond desaccord avec ton opinion. Si message politique il y a dans Rambo, c est plutot celui du sort des veterans laissers pour compte et jetes apres usage par une societe qui les investit comme mauvais objet porteur de toute la responsabilite et de la culpabilite d une guerre atroce qu il faut desormais oublier.
Il est jutement tres interessant que Rambo ne tue directement personne (alors que le public a pourtant conserve l image d une tuerie massive, la faute au 2eme opus) et qu il ecope d une telle chasse a l homme cherchant a le detruire, a le nier dans son existence et dans ce qu il represente.
Pour moi, c est un film qui illustre a merveille la nevrose de guerre (ou etat de stress post-traumatique, ou psychotraumatisme). En deca de la question sociale, John Rambo souffre d une profonde atteinte psychique qui perturbe son comportement et handicape sa reinsertion. C est tout autant pour ca qu il disjoncte (ou en fait, est deja disjoncte). Il a meme ete decrit plus specifiquement un Syndrome Rambo ou le psychotraumatise de guerre se reclue tellement qu il peut finir par vivre en ermite dans la nature, manifestant des conduites hostiles et hetero-agressives. Le film ne me semble donc pas particulierement cretin sur ces elements, bien qu il faille garder en tete le caractere forcement plus spectaculaire relatif a l aspect fictionnel.
Je comprends tes arguments. Je crois même que ce sont les commentaires sur ce forum qui m'ont incité à m'intéresser au film. Mais entre les intentions du film et la réalité, il y a un certain décalage. Peut-être que c'est ma perception plus nord-américaine des choses qui entre en conflit avec la vôtre, mais bon, bah.
Sur papier et probablement dans le roman,
First Blood est une dénonciation pertinente de la condition des vétérans traumatisés du Viet-Nam et des autorités dont la stratégie se limite à cacher la poussière sous le tapis. Le gouvernement a créé des Rambos mais, maintenant que la guerre est finie, s'en lave les mains, laissant à des policiers dépassés par les événements la tâche de s'en occuper. Il y avait de quoi faire quelque chose de très cru, une sorte d'
Halloween engagé, et je suis persuadé qu'un John Carpenter au sommet de son art aurait trouvé le moyen de présenter le malaise sans édulcoration ou manichéisme.
Dans le film, par contre, rien à faire, même avec la meilleure bonne foi, c'est impossible de ne pas voir autre chose qu'un grand benêt bourrin mais au grand coeur qui joue à cache-cache avec une bande de policiers idiots (un cliché horripilant qui a sévi dans les deux premiers
Die Hard) et la réserve nationale, pas mieux fournie (parce qu'eux n'ont pas fait le Viet-Nam). Du coup, le message s'en trouve complètement changé : on n'est plus dans la dénonciation de la guerre, mais dans un mauvais western spaghetti, où Rambo fait office de héros solitaire avec lequel on ne peut que sympathiser parce que tous les autres personnages (sauf le colonel Trautman) sont des méchants caricaturaux et unidimensionnels. Tout est si manichéen, tellement cousu de fil blanc, on se croirait presque dans
Rocky IV.
C'est sûr que ça peut paraître moins gros à première vue que les propos de
Rambo II et
III, mais, niveau morale sous-jacente, on n'est pas loin du révisionnisme reaganien de l'époque, du genre « c'est la faute aux bureaucrates et aux
liberals déconnectés de la réalité si on a perdu la Guerre du Viet-Nam ».
Rambo II reprend cette thématique et la pousse à son paroxysme (c'est le moins qu'on puisse dire), mais au moins a « l'honnêteté » de ne pas se faire passer pour une fable humaniste.