Bon ben j'ai trouvé ça très bof...
L'intrigue en elle-même est vue et revue et rerevue, constituant l'intrigue de base des films de groupe de musique : moment de crise où le groupe est au bord de l'explosion puis va se ressouder face à l'adversité. Mais sur ce type d'intrigue, on peut avoir du passable comme du très très bon, comme le méconnu Spinal Tap... (vous pourrez dire autour de vous que la première fois que vous en avez entendu parler, c'était grâce à moi !
) Donc voilà, les Dead Makabés, groupe de Black Metal de second ordre, organise ses répètes dans l'arrière salle d'un restaurant chinois entre deux journées de boulot tandis que la baby-sitter garde la gosse. Amis depuis des années, n'ayant jamais vraiment percé, ils vont néanmoins être invités à participer au Hellfest. Pourquoi? Parce qu'un groupe s'est désisté et que des groupe de Black Metal en France, y en a pas des masses. Admettons...
Avec un résumé pareil, on se doute déjà que l'humour du scénario se basera sur cette opposition entre la mise en scène propre aux concerts de Metal et le comportement de ses membres dans la vraie vie des gens. Ca fonctionne super bien dans un film comme Detroit Metal City (dont je parle plus tôt dans ce topic) mais là, ça marche moyen. Certains gags fonctionnent (quand le bassiste lit le songbook du groupe) mais ça vire trop vite et trop souvent au "cé drol passque cé vré". Donc même si Julien Doré est convaincant dans son rôle, le voir constamment jouer les rebelles de la life en mode Emo est vite lassant. Pareil pour le bassiste qui est en fait un papa poule et le batteur "qui en fait est totalement dominé par sa femme à la maison". Enfin le noeud du film, l'arrivée du groupe à la Fête à la fraise, est marrante deux minutes (dont le premier plan où ils sont cernés par la foule dont un gars déguisé en fraise) mais très vite on a presque l'impression de voir pointer une forme de mépris pour les petits festivals de province "où les gens ils ont trop l'air con, enfin c'est trop les gens quoi j'veux dire...". Enfin c'est toujours mieux que si le film avait tourné au "ah non mais comment j'me rends trop compte qu'en fait le côté convivial de ces manifestations festives c'est trop chaleureux en fait...".
Et c'est un peu ça qui pêche dans ce film : le réalisateur a voulu faire un film à la fois pour les métalleux et pour faire découvrir le Metal au grand public, ce qui finalement ne satisfait personne. Martin Le Gall est sans doute un véritable amateur de Metal mais le scénario exploite ça de façon trop maladroite et on sent vite que le tournage au Hellfest va plus servir de caution pour Metalleux que de véritable point d'orgue du film en mode "Vous avez vu, on est pas des charlots, hein, on sait vraiment de quoi on parle". De la même façon, le personnage de la fille de l'inspec/teure/trice chargée de l'enquête, fringuée en Morticia du début à la fin est trop visiblement là en temps que personnage-Charon (spéciale cace-dédi, Jacques Demy !) chargée de faire entrer les spectateurs non initiés dans l'univers du Metal. Ca n'est pas remettre en cause le talent de l'actrice que de dire que ça ne fonctionne pas.
Le problème est surtout qu'on lui a donné un texte trop peu écrit, trop copié/collé wikipedia. Passé le premier acte où son jeu se limite à dire "Non mais putain mais c'est le Hellfest, quoi, j'veux dire..." où à jouer les blasées dans l'univers coloré de la fête, elle a droit à la scène la plus ingrate du film, qui part pourtant d'une bonne idée, scène durant laquelle sa maman vient lui dire "explique-moi ce que c'est que le Black Metal !". Et elle commence donc à faire un exposé chronologique de l'évolution du rock depuis l'origine jusqu'au Black Metal. Et si son jeu n'est pas en cause, c'est la réalisation trop molle, trop plan-plan, trop "bon allez j'ajoute un petit effet de lumière et ça fera l'affaire", qui fait que la scène ne fonctionne pas aussi bien qu'elle aurait pu. Pourtant l'idée d'alterner l'évocation de chaque étape d'évolution du rock avec un plan où le guitariste du groupe, dans une grange, joue un solo illustrant le genre en question, était bonne...
Tout le reste du film fonctionne sur le même principe de la scène qui, mieux réalisée, aurait donné un truc vraiment sympa. Les scènes ne sont pas abouties, finissent trop tôt, les plans se coupent pile à la fin d'une phrase alors qu'on attendait une chute, un effet de conclusion... L'idée des plans de pose en mode "couverture d'album" était sympa mais on voit trop vite où ils veulent en venir (et puis dans le plan Abbey Road, le bassiste est même pas pieds nus...). Pareil pour cette idée de placer ça et là en exergue des citations des grands noms du Rock (surtout les Béhatles), citations qui ne sont pas forcément les plus marquantes ou les plus adaptées et du coup on imagine les scénaristes parcourir mollement des bouquins de référence sur le rock et se dire "allez, celle-là elle fera l'affaire et on n'en parle plus !". Enfin voilà quitte à faire un film pour musicos, autant explorer vraiment l'univers qu'on prétend représenter et/ou faire découvrir, d'autant plus qu'on retrouve le coup classique du soi-disant "concert" au cours duquel on ne joue qu'une chanson et après on se barre (c'est peut-être comme ça que ça se passe au Hellfest, j'en sais rien)... On peut aussi parler de gigantesques Plot-holes dans la narration qui rend difficilement compréhensible l'évolution de certains personnages (finalement, ils sont innocentés comment les héros? C'est vraiment que à cause de l'histoire de la croix que
la superstar du Black Metal demande au groupe de faire sa première partie?). Et enfin, franchement, la sous-intrigue Deus Ex-Machina d'Iggy Pop du film Les gamins était plus crédible sur le mode "Comment j'suis trop un passionné de musique" que n'importe quelle scène de ce film.
On a aussi droit dans ce film à tout un univers de private jokes faciles où le public rit non pas parce que c'est drôle mais parce que le rire indique qu'on a saisi la référence, contrairement à son voisin de fauteuil qui a l'air d'un sacré ringard qui croyait sans doute aller voir La Grande Bellezza et qui, se rendant compte de son erreur, n'a pas voulu bouger pour ne pas avoir la honte, non mais j'te jure, les gens sont trop coincés... Comme je le relevais déjà dans la bande-annonce, on a droit à un Whilhelm Scream (un truc que seuls les vrais, les purs, les tatoués, les mothafuckin' moviemakers de leur mère la chienne de sa race de pute à frange connaissent et placent dans leur film pour faire rigoler leurs pairs alors que la masse bêlante, enfin celle qui n'a accès ni à Allociné, ni à Youtube, ni à Wikipedia, ne connaît absolument pas...), un mec qui dit "c'est pas faux" dans la scène où apparait le personnage d'Astier et une autre scène où deux membres du groupe discutent pendant trois plombes sur le mode "Quoi? Tu veux participer à une émission de téléréalité? Non mais ça serait vraiment trop la honte quoi? NON MAIS LA TELEREALITE, QUOI ! PLUTOT CREVER ! ! !". Rholala, comme ça prouve trop que Julien Doré est trop pas un mec qui se prend au sérieux ! (même s'il n'est pas dans la scène...). Enfin, la scène où ils volent un van de hippies en s'exclament "c'est le van de Scooby-doo !" est sans doute une référence à l'épisode Kiss contre les pirates-fantômes de South Park mais à ce stade-là, on est déjà dans un cadre trop formaté pour que ça prenne... Ce qui est d'autant plus triste qu'on sent que le réalisateur croyait dur comme fer que son film serait un coup de boule salutaire dans l'univers formaté du cinéma français mais encore une fois, si le sujet est atypique dans notre beau pays, son traitement est d'une convention à peu près égale à celle des films de Fabien Onteniente ou de Gabriel Aghion, l'enthousiasme maladroit de la jeunesse en plus...
A part ça, y a quand même des trucs sympas. Les animations générique, notamment. Il y a une bonne ambiance/reconstitution dans les scènes de concert Black Metal et puis généralement, les acteurs sont bons avec une mention spéciale à Audrey Fleurot qui est belle et drôle et sexy en diable (lol) et qui mine de rien a quand même une bonne carrière depuis son rôle de Dame du Lac dans Kaamelott. Astier fait du Astier et ça fonctionne sans qu'on n'aie l'impression qu'il nous joue Le roi Arthur version flic et puis y a quand même le plus-produit du tournage pour de vrai au Hellfest où, passé les plans en mode "vous avez vu, hein, on y était vraiment !" prend vraiment son sens quand ils montent vraiment sur scène à la fin. Là on se dit que le tournage a dû être une aventure sympa et que, même si les comédiens ne sont au final pas super contents du film, il restera au moins ce souvenir... Mais au final, les scènes bien conçues comme celle où Audrey Fleurot comprend que le groupe Flower Power qu'elle a sous les yeux est un groupe de Metal déguisé en observant les détails ne font que mettre en "valeur" le côté quelque peu bâclé/symptomatique du premier film ("j'en fais à la fois trop et pas assez...") du reste du métrage...