Bien aimé.
Ce qui n'avait été qu'un délire sans lendemain pour Tarantino devient chez Rodriguez une nouvelle marque de fabrique, une nouvelle corde à son arc de réalisateur. Il creuse toujours le sillon de l'action cartoonesque initiée avec El Mariachi mais s'autorise toujours plus de délire. En voyant ce film, on mesure une fois de plus le champs de possibilité que le numérique a ouvert dans l'univers du réalisateur. On se rappelle des gunfights bondissants de Desperado, de l'hyper-stylisation de Sin City et des gadgets high-tech numériques de Spy Kids. Il y a un peu de tout ça dans Machete Kills, à quoi il faut ajouter l'hommage aux héros Grindhouse invincibles des années 70-80.
En comparaison, le premier Machete restait relativement soft. Un film extravagant, sans complexe mais plus proche dans l'esprit d'un Desperado dans sa volonté d'ancrer ses personnages dans un univers relativement réaliste. Ici, le film gravit graduellement les échelons qui séparent le monde réel de l'univers de la série B où on se permet tout pourvu que le public prenne son pied. De ce point de vue, et même si c'est avant tout fait pour coller avec l'esprit du projet Grindhouse, le fait de faire démarrer le film sur la bande-annonce de Machete Kills In Space in 3D donne tout de suite le ton et on sait qu'un pas va être franchi par rapport au premier film.
En même temps, ce second opus respecte la règle d'or des trilogies-sagas, à savoir que le second film est avant tout une passerelle entre le premier et le troisième (L'empire contre-attaque, Retour vers le futur 2, Les deux tours, Matrix Reloaded...). On va donc assister à un film qui commence sur une base de série B classique à intrigue prétexte à moults gunfights et autres décapitations gore et part petit à petit vers autre chose de plus foutraque tout en restant aussi fun. La transition se fait clairement avec l'apparition du personnage de Mel Gibson, son univers hommage à Star Wars et ses dons de préscience, même si quelques détails nous avaient préparé à cette transition (l'homme de main éventré qui réapparait comme neuf).
Mais le plus important avec ce film, c'est que tout le beau monde réunit dans le projet le fait avec un vrai professionnalisme, chacun donne à son rôle toute la mesure ou la démesure nécessaire. Pas de concours de cabotinage, de délire entre pote, de "je vais faire espré de jouer mal ça sera trop lol". De Charl... Carlos Estevez à Mel Gibson en passant par Amber
Heard et Michelle Rodriguez, tous se mettent au service du film en donnant à leurs rôles un vrai souffle qui participe au plaisir non coupable qu'on éprouve à la vision du film. La palme revient pour moi à l'abnégation des quatre comédiens venus jouer le temps de quelques scènes le personnage le plus WTF de tout l'univers Machete : Cuba Gooding Jr., Walton Goggins, Lady Gaga et Antonio Banderas. Et même Rodriguez se fait plaisir à ressortir quelques auto-références comme le pistolet-bite ou le duel avec un personnage aveugle qui rappelle la fin de Desperado 2, se permettant même une pique à Tarantino (ils sont fâchés finalement ou pas ces deux-là?).
Enfin, il faut revenir deux secondes sur la bande-annonce de Machete In Space, pur condensé de délire témoignant encore une fois de l'amour de Rodriguez pour la série B Grindhouse totalement délirante nous rappelant au passage le côté totalement opportuniste magouilleur de ce genre de projet. Outre la pique gratuite à Justin Bieber, j'aime beaucoup le "LADY GAGA DANS LE ROLE DE... QUI ELLE VEUT !" et surtout "LA PRESENCE EXCEPTIONNELLE DE LEONARDO DI CAPRIO DANS LE ROLE DE L'HOMME AU VISAGE D'ACIER
(l'acteur peut changer...)". Après je sais pas si ce nouveau Machete a déjà été en partie tournée ou si ça va se faire comme pur le premier, en bricolant un script autour de scènes tournées juste pour une fausse B.A., mais je l'attends avec impatience.