Je me permets de rouvrir un sujet sur
Seven car le dernier date de 2013 et que je ne sais pas si cela a un sens d'ajouter un commentaire sur un sujet de 5 ans.
J'ai toujours trouvé que
Seven était un très bon exemple de la manière dont les spectateurs peuvent s'aveugler à un problème de cohérence gigantesque simplement parce qu'ils adorent un film.
Je ne m'apprête pas à dire que
Seven est mauvais mais que l'interprétation générale qui est faite de ce film ne se tient pas et que pourtant, non seulement elle est acceptée par beaucoup, mais qu'en plus elle ne semble pas ternir l'admiration que les spectateurs ont pour le film.
C'est écrit sur l'affiche: Sept péchés mortels, sept façons de mourir. Seven deadly sins. Seven ways to die.
Le film ne déroge pas à cette idée, le tueur commet des meurtres rituels punitifs en fonction des sept péchés capitaux. On nous martèle ça du début à la fin, on explore son modus opérandi, Somerset creuse la question d'un point du littéraire/intellectuel etc...
Aussi, Seven est connu pour être l'un des rares films criminels dans lequel le tueur parvient à ses fins. Tout se passe exactement comme John Doe l'a prévu. Il gagne. Il atteint son objectif sans concession.
Et pourtant. Lorsque le générique de fin apparait à l'écran, David Mills "la colère" est toujours en vie. Alors bien sûr, sa femme enceinte est (a priori) morte et il est clair que le pauvre homme est bien détruit psychologiquement. Mais il n'est pas mort. Le but de John Doe n'était pas "6 morts et 1 dépressif pour 7 péchés mortels."
Le tueur lui-même mourrait pour faire correspondre les chiffres 7 péchés/7 morts mais laisserait le pécheur qui correspond à la colère survivre parce que... euh... la colère est moins grave que... la fainéantise ? La gourmandise ? La luxure ? => Il n'y a aucune raison pour que David Mills mérite de survivre dans la logique de John Doe.
La conclusion de
Seven est platement incohérente. Elle ne fonctionne pas. Il y a un problème. Soit John Doe échoue, et dans ce cas il faudrait trouver en quoi et pourquoi il échoue, soit il n'avait pas l'intention de tuer Mills et dans ce cas l'histoire de tueur en série en fonction des sept péchés capitaux prend un coup dans l'aile.
(J'ai entendu dire que Mills devait se faire descendre par un sniper en hélicoptère dans la version originale du scénario, ça ne change rien au problème car John Doe ne peut pas miser sur un développement aussi hasardeux pour accomplir son œuvre et que si réellement il avait voulu que Mills meurt, il pouvait mettre en place beaucoup d'autres choses).
La manière dont je perçois les choses contredit l'interprétation la plus commune du film donc vous pouvez arrêter de lire ici si vous sentez que ça va vous gonfler.
Il n'y a pas de tueur en série dans
Seven.
Ce qu'il se passe, c'est qu'un jeune détective hyper motivé et incorruptible a demandé à être muté dans la ville la plus corrompue de la terre.
Le commissariat dans lequel il atterrit est saturé de ripoux, de juges véreux et de capitaines qui touchent des jolies commissions.
On décide donc de décourager cet ange immaculé, de le briser, de le dégoûter. On le met avec un coéquipier qui le rabaisse, le méprise, l'infantilise, le traite comme une merde. On le met sur l'affaire la plus morbide et sinistre du moment: un obèse mort en se goinfrant de spaghettis.
Comme ça ne fonctionne pas, que David Mills continue à être positif, énergique et déterminé à trouver sa place et à faire son boulot, on décide de passer à la vitesse supérieure: le tueur en série. On trouve un thème: les péchés mortels de la bible, ça sera facile à faire. Un avocat est assassiné, allez hop, transformons la scène de crime en scène de crime rituelle. On écrit "Greed" en gros et on trouve une manière de justifier cette avarice. Et on retourne écrire "Gluttony" derrière le frigo de l'obèse. Il est facile de détourner un crime en "crime rituel" et de lui faire correspondre un péché capital. J'imagine que les personnes derrière la conspiration peuvent s'en servir pour éliminer des personnes qui leur posent problème, puisque l'idée de "tueur en série" les protège d'une enquête approfondie.
Il y a dans
Seven beaucoup d'éléments dont nous faisons abstractions car ils semblent ne servir à rien, ou d'incohérences que nous écartons par suspension d'incrédulité mais qui soudainement trouvent un sens si l'on regarde les choses du point de vue d'une conspiration contre Mills. (Le tueur dans le commissariat, l'appartement qui tremble, la photographie surprise de Mills, l'absence totale d'empreinte digitale, la facilité avec laquelle Mills et Somerset dévouvrent l'appartement du tueur, qui contient des tooonnes de preuves incriminantes bien pratiques mais rien dans les journaux que celui-ci rédige au quotidien)
En fait,
Seven fonctionne exactement comme les photos de Mills dans la baignoire. On nous jette au visage des preuves implacables de la culpabilité du tueur/de l'existence de celui-ci, qui sont tellement énormes et choquantes qu'on en oublie de se demander s'il est logique qu'on les trouve ou qu'elles existent. David Mills est convaincu d'être chez le tueur lorsqu'il voit les photos de lui dans la baignoire, c'est pas un peu gros ? Quelqu'un lui met un flash dans la tronche à bout portant, deux jours après il retrouve les photos en train d'être développées chez quelqu'un. C'est implacablement convaincant certes, mais pourquoi le tueur aurait-il eut besoin de prendre ces photos à la base ? Pourquoi prendre un tel risque ? Parce que ça n'est pas le tueur qui prend ces photos, que l'appartement n'est pas celui du tueur, et que les photos servent uniquement à renforcer le lien dans l'esprit de Mills.
Bref, je ne vais pas développer plus ici, voici le lien à l'article sur mon Blog:
http://www.lecturesalternatives.fr/2018 ... -mots.htmlMerci pour votre attention et bonne journée.