Hum, hum...Si vous me permettez, je repensais au film la semaine passée, en retraite dans un monastère, et je pense y voir un peu plus clair. Au fond, je crois qu'il y a un vrai propos dans le film. Depuis toujours, je me dis que si ça avait juste été un gros truc bâclé à la Turkish Star Wars ou Birdemic, ça n'aurait pas eu le même impact. Ce qui est très fascinant avec The Room, c'est que l'amateurisme le plus affligeant côtoie, selon moi, d'authentiques qualités cinématographiques. Je vais procéder, pour le démontrer, à une analyse des trois personnages principaux du film.
JOHNNY :
Johnny, c'est le type exemplaire. Il ne se fait pas rembourser la monnaie quand il va dans un magasin. Il subvient aux besoins d'un ado orphelin. Il donnerait sa vie pour les gens qu'il aime. C'est peut-être pas l'homme idéal (plus tout jeune et avec un physique un peu trapu, contrairement à Mark, le beau grand blond), mais par contre, c'est le compagnon idéal. Toujours sympa et prêt à couvrir Lisa de ses petites attentions.
Problème, son petit monde se met à dérailler. Premier coup dur, on lui refuse au travail la promotion qui lui était acquise. Second coup dur, l'histoire de la gifle que Lisa prétend avoir reçue de lui alors qu'il avait bu deux-trois verres. Troisième coup dur, enfin et surtout, la tromperie de sa compagne, qui plus est, avec son meilleur ami.
Ce qui est assez intéressant, je trouve, dans le film, c'est qu'à la base, Johnny est un vrai positif. On a sans doute tous connu dans nos entourages des personnes qui en font un peut trop pour les autres, et qui un jour subitement, montrent des facettes plus négatives. Sauf que chez Johnny, tout vient vraiment du cœur. A la limite, et même si son personnage reçoit de beaux coups de pute dans le film, on aurait pu imaginer que sa positivité finisse par reprendre le dessus. Il y a dans l'ampleur de sa dégringolade psychologique quelque chose d'assez imprévu, et de ce fait, d'assez poignant.
MARK :
Mark, c'est un peu le poète, le contemplatif. Pas que ce soit un mauvais gars, ou un gros obsédé, mais il lui manque la force de caractère qui lui aurait permis de remettre Lisa à sa place au moment où elle se jette sur lui. A la différence des autres amis du couple, qui trouvent leur liaison révoltante, et qui à la place de Mark, auraient certainement réagi avec dureté. Mark semble prendre l'instant présent comme il vient. Ce qui ne l'empêche pas d'avoir des sursauts de remords ou même de colère.
LISA :
Lisa, c'est la crise d'adolescence sur le tard. Elle a dû se mettre en couple très jeune avec un homme qui a bien 25 ans de plus qu'elle, poussée par une mère assez revêche. Subitement, elle se rend compte qu'elle n'en veut pas, de ce confort matériel, de toutes ces attentions. Elle se rabat sur un gars de son âge, plus beau gosse. Mais The Room n'est pas pour autant un plaidoyer féministe. Quelque part, le mal est fait. Lisa se défait du carcan maternel dans lequel elle étouffe, très bien, mais elle se retrouve à agir en manipulatrice, et devient à son tour condamnable.
Enfin voilà. Finalement, je trouve qu'il y a dans tout ça une matière plus subtile et nuancée qu'on ne pourrait croire. The Room est un vrai film habité (enfin, façon de parler...), "pollué" (ou enrichi ?) par certains flottements d'écriture assez dingues. Bref, un truc vraiment inclassable et fascinant.
_________________ "Success is a state of mind." (Tommy Wiseau)
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