ÇILGIN KIZ VE ÜÇ SÜPER ADAM
(3 Süper Adam/ 3 Supermen and Mad Girl / 3 Supermen vs Mad Girl)
Dans les années 1960 et 1970, quand les italiens faisaient du film de super-héros, c’était souvent le sauve-qui-peut général. Quand les turcs imitaient les italiens, on n’était même plus atterré, mais déterré. Vous cherchez le film de super-héros le plus ringard de tous les temps ? Vous trouvez « L’Homme-Puma » trop sage, « Superargo contre Diabolikus » trop convaincant ? « 3 Supermen and Mad Girl » est fait pour vous.
Ce film de 1973 est une imitation stambouliote de la série transalpine des « Trois fantastiques supermen », qui donna lieu à une enfilade de série B psychotronique, ainsi qu’à un spin-off approximatif en version péplum (« Supermen contre amazones »). Le fil conducteur de cette série très vaguement cohérente était la lutte de trois guignols en pyjamas rouges contre les forces du mal. Mêlant avec plus ou moins de bonheur l’humour et l’action, la série des Trois fantastiques supermen (à Hong Kong, dans la jungle, à Tokyo…) n’était cependant pas préparée à cela : un plagiat sans aucune vergogne, combinant le pire des séries de science-fiction des années 1950 à la fantaisie totalement débridée des turcs. « Çilgin kiz ve üç süper adam », c’est du costaud d’un bout à l’autre, la densité du film dépassant, en 1h10, celle de bien des oeuvres plus étirées.
Précisons avant toute chose que la découverte de ce film s’est faite dans des conditions nous interdisant le recours à tout sous-titre. La compréhension des détails de l’histoire s’est donc avérée légèrement compromise. Mais cela n’a pas une très grande importance, tant la simplicité (les mauvaises langues diraient le simplisme) du récit rend le film facile à suivre, même pour qui n’aurait aucune notion de la langue turque.
L’histoire tourne autour des agissements d’une organisation de méchants en cagoules vertes (le Ku Klux Klan d’Istanbul), dirigés par un grand chef affublé d’un masque de diable rouge en carton. La principale exécutante du chef suprême est une certaine « Mad Girl », vêtue d’un costume rose bonbon et d’un loup pailleté qui la fait un peu ressembler à une strip-teaseuse de l’immédiate après-guerre.
Cette salope de Mad Girl.
Le Grand Stratéguerre.
Un sbire et deux sbirettes.
L’organisation, pour autant que j’aie pu suivre le récit, se livre principalement à des prises d’otages sur des femmes à moitié à poil. Les méchants utilisent notamment, pour arriver à leurs fins, les services d’un robot en carton. Mais vraiment en carton. Ou alors, au mieux, en polystyrène. En tout cas, d’un robot qui ferait passer celui de « Supersonic man » pour des merveilles de technologie. Oh et puis assez essayé de décrire le robot, voici des images :
Heureusement, les Trois supermen sont là ! Mais qui sont-ils donc ? Les supermen sont un trio de godelureaux passant leur temps à bronzer sur le pont d’une goélette. Composé comme dans la série italienne d’un héros et de deux sidekicks plus ou moins comiques, le groupe se procure des outils indispensables dans le cadre de la lutte contre le mal : des collants rouges à l’épreuve des balles, qui leur permettront d’affronter sans crainte des armées entières de sbires.
Du repos pour les braves.
On a beau être super-héros, on n’en est pas moins homme !
Une fois équipés de ces mirifiques costumes, nos trois héros partent à l’assaut des méchants, dans une succession frénétique de pugilats guignolesques et de triples saltos arrière en trampoline. Les combats contre les sbires en cagoule verte ne cessent pour ainsi dire pas jusqu’à la fin du film, et nous valent de grands moments de rigolade : notons entre autres détails que les capes des costumes des Trois supermen n’ont visiblement pas été correctement accrochées et qu’elles n’arrêtent pas durant les bagarres de pivoter et de passer sur la poitrine de nos héros, qui s’emmêlent avec.
Le récit du film se déroule à une allure frénétique, les échauffourées succédant aux escarmouches, les torgnoles aux mandales,, les retournements de situation aux plot twists et les feintes aux coups tordus. On ne s’ennuie pas une seconde, face à une débauche d’action totalement débile et puérile, aussi frénétique que mal foutue. On croirait parfois voir un vieux film amateur, tourné par un dilettante qui aurait un vrai sens du rythme.
Débordant d’amateurisme, esthétiquement misérable, « 3 Supermen and Mad Girl » est à voir comme un témoignage brut de décoffrage de l’époque où la Turquie produisait à la chaîne un cinéma bis dénué de toute pudeur esthétique. Il n’y a ici pas de réticence à franchir son seuil d’incompétence, à exhiber sa misère budgétaire, à montrer ses costumes ringards, à enchaîner bagarre ridicule et poursuites grotesques ; aucune limite, aucune inhibition : les turcs sont grands.
Des plans nichons dans un film venu d’un pays musulman, ça fait toujours drôle, y’a pas à dire…
De superbes décors.
Moins extrême que « Turkish Star Wars », « 3 Supermen and Mad Girl » n’en est pas moins une pépite du cinéma turc à découvrir d’urgence pour qui veut voir dans son expression la plus brute toute la beauté d’un cinéma bis oriental à jamais disparu. Un véritable bonheur, à la folie totalement décomplexée !
Raaaaaaah, ce robot !!!!
ÇILGIN KIZ VE ÜÇ SÜPER ADAM
Réalisateur : Cavit Yürüklü
Nationalité : Turquie
Durée : 1h10
Année : 1973
Genre : Y s’tamponnent à Istanbul
Catégorie : Super-héros
Avec : Levent Çakır, Gerçek İsmi, Hüsevin Savar, Altan Bozkurt
Nikita : 3
Cote de rareté : 4/exotique
Jamais sorti en France sur quelque support que ce soit. On peut le trouver sur des sites de vente spécialisés dans les films rares comme
www.revengeismydestiny.com
