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Titre original : Bloodsuckers from outer space
Titre français : Suceurs de sang
Origine : USA
Année : 1984
Durée : 90 minutes
Réalisateur : Glen Coburn
Avec : Thom Meyer, Laura Ellis, Rick Garlington
Catégorie : Épouvante
Genre : Dawa chez les ploucs
Si je vous demande, comme ça, à brûle pourpoint ce qu'évoque pour vous le mot "Amérique", vous pensez à quoi ? Sans doute à quelques images indéfectibles comme la statue de la Liberté (française au passage), les néons joyeux de Las Vegas, les gratte-ciels de New-York ou encore le tout Hollywood. C'est oublier que le grand frère ricain recèle en son sein de véritables joyaux qui ne demandent qu'à passer sur le devant de la scène. Il est ainsi une certaine catégorie de gens qu'on préfère passer sous silence dans la plupart des cas, ce qu'un premier ministre américain aurait pu qualifier d'"Amérique d'en bas" en la ressortant pour quelques prétextes démagogiques et cette catégorie ce sont les "rednecks". Mais comment reconnaître un redneck me demanderez vous ? Eh bien on peut dire de manière générale que le redneck (appelé aussi cul-terreux, plouc, péquenot ou encore rural de par chez nous) est simple, étroit d'esprit, réfutant l'intérêt de l'art ainsi que le droit à l'homosexualité, s'habillant avec des chemises à carreaux d'un goût douteux et/ou d'une salopette en jean. Quand il n'est pas occupé à découper de méchants adolescents en morceaux (
Massacre à la tronçonneuse) ou en conflit avec l'autorité locale tout en affichant sans vergogne ses tendances sudistes (
Shérif, fais moi peur), le redneck peut être amené à être recruté pour tourner un FILM !
1984. Les années 70 sont déjà loin derrière, semant entre deux tubes disco la fièvre zombie propagée par Romero. Ceci ne manquât pas de susciter de véritables vocations chez les cinéphiles en herbes, qui se lancèrent dans l'aventure quelques décennies plus tard. Glen Coburn sort d'un ciné club, encore ébloui par ce qu'il vient de voir. Son regard balaie l'obscurité de la nuit et une décision germe dans son cerveau. Il aura SON film, dont il sera le réalisateur, le scénariste et l'acteur car et c'est bien connu, on n'est jamais mieux servi que par soi même. Le voilà qui monte dans sa voiture pour faire des repérages dans l'arrière-pays, embauche sur place quelques figurants en échange d'une poignée de dollars ou d'un coup de main pour rentrer le foin et c'est dans la boîte en moins de temps qu'il n'en faut à Yul Brinner pour se faire la raie de coté. Oui mais voilà...
Le film s'ouvre sur une page de la vie quotidienne de ces gens simples. Un fermier vaque à ses occupations dans la cour de la ferme. Soudain, il se fige. Une grosse bourrasque venue de nulle part le fait vaciller. Il toussote, crachote un bon décilitre de liquide rouge et hop se relève en suceur de sang. Nous apprendrons plus tard que c'est un courant d'air venu de l'espace (c'est toujours ça de gagné sur le budget des effets spéciaux) qui est ainsi responsable de la transformation soudaine du bonhomme.
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[soustitreimage]Un fond blanc, deux ou trois coups de crayons, un peu de sirop de maïs et voilà le travail ![/soustitreimage]</center>
Mais qui viendra nous sauver de cette terrifiante menace ? La réponse est évidente : un reporter ! Enfin un photographe amateur pour un journal local, prénommé Jeff qui sera notre héros. Ce dernier tente de "s'exprimer" au milieu de l'incompréhension des gens de la terre. Jeff a un frère scientifique qui travaille à Research City (on ne se moque pas) nommé Ralph, qui avec son équipe - trois personnes - travaille sur un projet ultra secret d'étude du phénomène qui transforme les habitants en zombie/alien/monstre/vampire. Mais l'arrivée du général Sanders va bouleverser cette perspective. Le général ne s'en laisse pas compter car comme tout bon général américain, il fume le cigare, les plantons et les scientifiques qu'il considère comme des pédales cela va de soi.
Procédons scientifiquement. Pour ce qui est des acteurs, Jeff Rhodes (Thom Meyer) est une sorte de grande andouille a la tête ressemblant bizarrement à Schwarzenegger (mais seulement de profil). Il est mou, aussi charismatique qu'un pavé et nanti d'un regard de chien battu qui n'aide pas des masses à le mettre dans la position dominante. Une sorte de croisement improbable entre Luke Dukke, Peter Parker et Terminator.
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[soustitreimage]Jeff, porte étendard du Texas libre.[soustitreimage]</center>
Il rencontrera Julie (Laura Ellis) qui vient s'encanailler chez les bouseux car elle, elle vient de Dallas, ce n'est pas la même catégorie. Ce qui ne l'empêche pas d'arborer des anoraks particulièrement hideux, sans doute pour se fondre dans la population locale. Elle inhale de l'oxyde d'azote dans sa Pontiac, ce qui lui permettra de tomber follement amoureuse de notre apollon rural au détour d'un virage.
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[soustitreimage]Julie, celle par qui le miracle arrive.[/soustitreimage]</center>
Le frère de Jeff est interprété par Glen Coburn himself, tête pensante de l'équipe de bras cassés œuvrant à Research City (mais arrêtez de rire enfin, c'est un institut très sérieux!). Lui et ses trois ou quatre acolytes font tourner à eux seuls ce qui a l'air d'être un complexe assez grand. Ils portent des blouses avec Research City brodé au dos, c'est très classe. On le sent rempli de bonne volonté, mais le résultat n'est pas franchement probant, et on voit plus un jeunot avec une blouse de TP de Physique Chimie qu'un savant tentant d'enrayer une catastrophe.
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[soustitreimage]Il te plaît pas mon film ?[/soustitreimage]</center>
Le général Sanders (Dennis Letts) est assez savoureux dans le genre cliché. Il a une prédisposition pour la bombe atomique, trouve scandaleux qu'un établissement scientifique puisse obtenir des crédits auprès de l'Etat et aurait un char comme voiture de fonction si jamais on le laissait faire. Il est accompagné par son subordonné, le major Hood (Rick Garlington) qui a le défaut de trop vouloir réfléchir, chose intolérable dans l'armée. Ajoutons que ce bon général ne verra rien d'autre qu'un complot communiste dans l'arrivée des suceurs de sang.
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[soustitreimage]Le général Sanders larguant son missile atomique par minitel sur fond de Toccata.[/soustitreimage]</center>
Les seconds rôles jouent bien leur fonction d'amuser la galerie en nous exposant les meilleurs spécimen de rednecks que l'on puisse trouver sur le marché. C'est du beau, ça madame ! Incultes, homophobes, marginaux, moustachus, c'est que du bonheur. Il est parmi eux un homme dont le sens du devoir qui m'étreint m'impose de vous présenter plus en avant. Un second rôle qui en l'espace de 5 minutes de film montre en main, réussit à gagner haut la main le Moutier du meilleur second rôle. Je vous présente NORMAN (Big John Brigham). Imaginez Karl Marx, avec un bleu de travail et une casquette rouge et gavez le d'acides afin de lui permettre d'émettre des réflexions splendifiques sur ce qui se passe autour de lui, secouez et vous aurez un concierge comme on aimerait tous en avoir un en bas de chez soi. Il vaut à lui seul le détour.
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[soustitreimage]Norman, le concierge d'un autre monde.[/soustitreimage]</center>
Puisqu'on parle des élucubrations de Norman, penchons nous sur le son. Ah mais quelle (bonne ?) surprise ! Nous retrouvons aux commandes du doublage la bonne vieille équipe de margoulins déjà responsable via
Eaux Sauvages et
Wendigo de l'internement psychiatrique de quelques nanardeurs novices imprudents. Et toutes les caractéristiques sont là ! Phrasé monocorde, dialogues sans queue ni tête, synchronisation lèvres/voix aussi approximatif qu'un sondage IFOP le tout flottant mollement à la surface du film. Ce dernier n'est déjà pas très clair niveau action (le métrage est censé être une parodie de film gore), mais les doubleurs sabordent tellement le tout que le résultat est souvent l'inverse de ce que le réalisateur cherchait à nous communiquer, le tout faisant un joyeux bordel cinématographique. Le personnage de Julie (appelé parfois "Djulie" d'ailleurs) est particulièrement touché. Grâce soit rendue à cette dame qui nous offre un doublage délicieusement exécrable, lançant un "C'est horriiible" comme un nonchalant "il fait beau aujourd'hui". Je suspecte aussi l'emploi d'un homme pour doubler la rondouillarde tante Kate. Cerise sur le gâteau, on entend ça et là lors de passages sans trop de sons des bruits de fonds bizarres comme des voitures qui passent ou une radio étouffée. Le studio de ces messieurs serait-il mal insonorisé ?
Pour ce qui est des images maintenant, nous pouvons dire sans crainte que le maquillage est absolument touchant de naïveté en ce qui concerne les mystérieux suceurs de sang. Un peu de plâtre, du crayon, un peu de liquide rouge bricolé et voilà pour les effets spéciaux. Ajoutons quelques bras en mousses, saupoudrons d'un zeste de maladresse et c'est tout bon. Le principal aspect risible du film réside dans le fait que la nature même de la menace n'est pas bien identifiée. Un coup de vent les transforme en zombie, soit. Mais ils causent drôlement pour des zombies. Le coté freestyle de ces débonnaires "suceurs de sang de l'espace" offre un rendu assez fabuleux. Glen tente de faire de ce gloubi-boulga une parodie. Certes mais le décalage est si grand entre le doublage et l'action que les gags tombent en général à plat et certains passages sérieux font sourire, voire carrément rigoler. Jeff lançant de l'air le plus sérieux et déterminé du monde à un zombie un mémorable "
Nous ne vous laisserons pas nous sucer!! " est une petite perle de nonsense ! Un autre exemple est une scène de douche proprement (haha jeu de mot !) hallucinante. Le copain de Jeff qui est policier prend une douche avec sa copine. On distingue les deux silhouettes derrière le rideau de douche, une fenêtre éclairant par derrière, on voit très bien. Mais déjà le vent démoniaque venu de l'espace souffle à nouveau dans la maison et les deux tourtereaux vont devenir zombies dans des jets de sang...mais le résultat est catastrophique ! On voit clairement les acteurs prendre les bouteille de faux sang derrière eux, en asperger le rideau et se pencher sur la flaque de sang 3 secondes plus tard pour tenter de faire croire qu'ils ont régurgités tout ça ! La trajectoire des jets de sang est même visible !
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[soustitreimage]Et youpiii on rigole..ah merde pardon *tousse tousse* aaaarg[/soustitreimage]</center>
Autre scène qui ne manquera pas de retourner les neurones du spectateur non prévenu est un passage lourd de drame où Jeff pavoise avec son oncle Joe. Ce dernier lui fait comprendre qu'il a intérêt à arrêter ses conneries (c'est à dire faire des photos, parce que l'art on n'y comprend rien, et c'est pour les pédés de toute façon) si il veut un jour reprendre la ferme. Un vrai dialogue de fou se met en place.
Jeff : "Oncle Joe, tu n'est pas mon père"
Joe : "J'ai aimé ton père comme un frère"
Jeff : "Mais c'était ton frère"
Joe : "C'est vrai c'était mon frère..."
Soyons honnêtes, parfois Glen parvient à faire sourire au bon moment. Une course poursuite entre Joe devenu zombie pourchassant Jeff sur fond de banjo et en accéléré ou l'arrivée de Sanders au complexe scientifique de Research City (bon ça suffit, vous deux au fond vous sortez !) qui nous montre une sentinelle zêlée se faire rembarrer par le général à qui on ne la fait pas (car lui c'est pas un pédé).
Mais certains passages font beaucoup trop premier degré, que ce soit dû à l'action ou à un jeu subitement nerveux et théâtral (mais au mauvais moment, c'est ballot) des sagouins du doublage pour en faire une parodie décente. Les gags surgissent à l'improviste, complètement décalées par rapport à l'action présente. On est loin de la folie constante d'un Mel Brooks, on sent plutôt l'amateur de fond de garage. On a en fait l'impression que Glen Coburn ne s'est pas décidé à faire un film 100% sérieux ou complètement parodique. Ce qui fait que le manque de rythme du film occasionne un petit vagabondage de l'esprit ça et là et on décolle de la télé pour voir si on a bien allumé sous les épinards.
Acteurs à la ramasse, clichés trop appuyés, doublage apocalyptique et effets spéciaux de fond de jardin (on aura même droit à quelques stockshots de lancer de missile et d'explosion atomique) constitue l'essence de ce film qui gagne quand même ses galons de nanar, ne serait-ce que par la prestation phénoménale de ma nouvelle mascotte, Norman ! Je lui laisse d'ailleurs le mot de la fin.
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[soustitreimage]Fuyez, les enfants, cette chronique est vraiment trop étrange ![/soustitreimage]</center>
Note : 2.75/5
Rareté : Rare 4
Un dvd zone 1 est disponible depuis peu aux States, avec le visuel du début de chronique.
Pour ce qui est de la francophonie, bonne chance car les VHS proviennent de boîtes d'éditions plus ou moins fantomatiques. Édité chez Socai, US Vidéo (tiens donc) avec le même visuel et il semblerait que l'on puisse également le trouver chez Ciné Budget sous le sous-titre Horror Academy 1.
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[soustitreimage]La VHS de chez Socai[/soustitreimage]</center>
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[soustitreimage]La splendide jaquette québécoise[/soustitreimage]</center>
A ne pas confondre avec ce film là qui n'a rien à voir :
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BONUS
Images :
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[soustitreimage]Un "old timer" suceur de sang de l'espace[/soustitreimage]</center>
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[soustitreimage]Le retour de la myope des joues[/soustitreimage]</center>
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[soustitreimage]Un scientifique à lunettes[/soustitreimage]</center>
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[soustitreimage]Plan poules[/soustitreimage]</center>
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[soustitreimage]Pas de tables de réunions ? c'est pas grave on prend six tables empruntées à l'école du coin et voilà ![/soustitreimage]</center>
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[soustitreimage]Un président des USA très occupé[/soustitreimage]</center>
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[soustitreimage]La science saluant le génie ou Bonjour monsieur Norman[/soustitreimage]</center>
Vidéos (Copyright Kobal)
Le planton zêlé
http://kobaloulou.free.fr/suceur/militaire.avi
L'oncle qui est le frère de son frère
http://kobaloulou.free.fr/suceur/oncle.avi
Redneck homophobe :
http://kobaloulou.free.fr/suceur/pd.avi
Norman dans ses oeuvres :
http://kobaloulou.free.fr/suceur/norman1.avi
http://kobaloulou.free.fr/suceur/norman2.avi