CHRISTOPHER MITCHUM
Le phénomène des « fils de » incapables d’égaler la stature paternelle est bien connu dans tous les domaines et toutes les professions. Rarement aura-t-il cependant été aussi frappant que chez Christopher « Chris » Mitchum, fils de l’écrasante star Robert Mitchum et longtemps condamné à se traîner mollement dans les séries B les plus improbables, sous les quolibets de la planète cinéma.
Lorsque Chris Mitchum naît à Los Angeles, le 16 octobre 1943, la carrière de son père a déjà le vent en poupe et ne va pas tarder à rejoindre l’Olympe des stars. Chris et son grand frère James bénéficient d’une enfance favorisée. Le cadet des Mitchum poursuit des études universitaires en Pennsylvanie, puis en Arizona, mais le virus du cinéma ne tarde pas à le rattraper, alors que son grand frère a déjà commencé une carrière de comédien : en 1967, durant ses études, il tient quelques emplois de figurants dans des westerns tournés dans les environs de sa fac et décroche ensuite des rôles dans des séries télévisées. Ses débuts sont hésitants et, dans les deux années qui suivent, il se fait les dents en travaillant comme grouillot sur des films dans lesquels joue son père. En 1970, Christopher décroche son premier petit rôle dans une grosse production, en apparaissant dans le western «Chisum », avec John Wayne. Ce dernier prend le jeune Mitchum sous son aile et le recommande à Howard Hawks pour un bout d’essai. Le test de Chris est concluant et aboutit à un rôle relativement important dans « Rio Lobo », que le vétéran hollywoodien tourne avec John Wayne et Jennifer O’Neill. Le film est loin d’égaler les meilleures œuvres de Hawks – qui achève ici sa carrière – mais Christopher Mitchum bénéficie d’une bonne visibilité. Sorte de version rajeunie et blondinette de son illustre paternel, il ne crève pas l’écran mais se montre plutôt sympathique et attachant.
Christopher Mitchum dans « Big Jake »
Décidément chaperonné par John Wayne, qui l’a à la bonne, Chris joue à nouveau avec la star légendaire dans « Big Jake » (1971). Sa carrière semble se présenter sous les meilleurs auspices. Mais c’est compter sans le contexte politique du début des années 1970. S’il conserve une base de fans loyaux, Wayne est alors la bête noire des contestataires et d’une bonne partie des jeunes générations américaines, pour son activisme très droitier et son soutien sans faille à la guerre du Vietnam. Contrairement à ce que chacun – et notamment Christopher lui-même – aurait pu attendre, l’association avec un vétéran d’Hollywood s’avère un boulet pour un acteur en début de carrière. Chris Mitchum a des difficultés à trouver de bons rôles aux Etats-Unis et se risque à tenir l’un des rôles principaux dans « H-Bomb », un thriller produit à Hong Kong. Un directeur de casting finit carrément par lui dire qu’il n’embauchera pas quelqu’un ayant travaillé avec John Wayne.
Christopher Mitchum dans « H-Bomb »
Déçu et quelque peu en colère, Mitchum junior continue à chercher du travail à l’étranger. Mais il va vite se retrouver dans les griffes du cinéma bis européen, prompt à mettre la main sur tous les acteurs hollywoodiens dans la panade. On le voit dans plusieurs thrillers et films d’action italiens et espagnols, dont « Le Bal du Vaudou » (Una gota di sangre para morire amando) de Eloy de la Iglesia, sorte de semi-plagiat gothique d’ « Orange Mécanique » qui bénéficie d’une réputation sympathique auprès de certains bissophiles mais dont Chris gardera un fort mauvais souvenir du tournage. Il apparaît également dans « La Dynamite est bonne à boire », film franco-espagnol d’Aldo Sambrell, ou le polar « Meurtres au soleil », de Antonio Isasi-Isasmendi.
Autant de films qui font bonne figure dans les salles de quartier mais ne marquent ni l’industrie hollywoodienne ni l’histoire du cinéma. Christopher Mitchum se risque même aux Philippines, déjà à l’époque paradis du cinéma d’exploitation plus ou moins cheap, et apparaît dans quelques films destinés à l’export, comme le navet « Master Samurai » (en vidéo « La Rançon du Samouraï »), de Cesar Gallardo. Chris voit sa carrière patiner et tire de plus en plus, à l’écran, une gueule de six pieds de long, reprenant la nonchalance de son illustre papa sans posséder son charisme.
Christopher Mitchum retourne ensuite aux Etats-Unis. Tandis que son père assure sa dernière partie de carrière en cachetonnant tranquillement et que son frère connaît lui aussi des difficultés à s’affirmer, le cadet des Mitchum enchaîne les séries B plus ou moins honorables et les productions plus moins improbables : «The One man jury » (un sous-«Inspecteur Harry» avec Jack Palance) « Le Jour de la fin des temps » (un film de science-fiction), « Tusk » d’Alejandro Jodorowsky, des apparitions dans des séries télévisées… De quoi garnir quantitativement un CV mais pas de quoi tutoyer les étoiles. Au milieu des années 1980, c’est à nouveau la panade : Christopher Mitchum retourne aux Philippines et se commet dans des productions comme « American Commandos » ou « SFX Retaliator ». Ressemblant de plus en plus à la caricature flapie de papa, Chris se voit honni comme l’un des acteurs les plus mous de sa génération par les malheureux ayant commis la folie d’acheter ou de louer les VHS de ses films.
Christopher Mitchum, en compagnie de son père Robert Mitchum et de son fils Bentley Mitchum, également comédien.
A force de toucher le fond, on finit par se mettre à chercher du pétrole et, entre deux passages aux Philippines et en Indonésie, Christopher Mitchum participe à des productions Eurociné comme « L'Ange de la Mort » - où il joue un méchant néo-nazi sbire d’Howard Vernon – et « Dark Mission, les Fleurs du Mal » de Jesus Franco - où il est un héros d’une apathie invraisemblable. « Les Prédateurs de la Nuit », toujours avec Franco, « After Shock » (un post-apocalyptique pourri mais rigolo, avec un défilé impayable de tronches du cinéma bis), « Biohazard : the alien force »…. Ca patine sérieusement pour Mitchum Junior, dont la seule apparition dans une grosse production des années 1990 se résume à un petit rôle dans « Tombstone », avec Kurt Russell (un bide). En 1999, sans doute désireux d'arrêter le massacre, Christopher Mitchum met un terme à sa carrière de comédien et ne sortira de sa retraite qu’en 2006, pour les besoins d’un film réalisé par son fils Bentley Mitchum.
Handicapé par le poids d’un père trop célèbre, auquel il ressemble trop pour que la différence de talent ne se voie pas, Christopher Mitchum n’aura jamais réussi à se faire un prénom. Sympathique mais manifestement très démotivé par sa carrière à partir d’un certain stade de déchéance, Chris aura au moins réussi à aligner une filmographie suffisamment bizarre pour attirer notre intérêt et notre bienveillance. S’il apprend qu’il existe, quelque part au monde, des gens assez fous pour regarder un film uniquement parce que Christopher Mitchum joue dedans, peut-être cela lui fera-t-il plaisir ?
2007
Goy
2006
Soul Searchers
1999
Lycanthrope
Night of Terror
1998
Diamondbacks
Love and War II
1997
Lethal Seduction
1996
Jimi
Fugitive X: Innocent Target
1995
Lethal Cowboy
Striking Point
Biohazard: The Alien Force
1994
Magic Kid
Body Count
1993
Tombstone
1990
Aftershock
1989
Real Men Don't Eat Gummi Bears
1988
Dark Mission, les fleurs du mal ( Dark Mission : Operación cocaína)
Les Prédateurs de la nuit (Faceless)
American Hunter /Lethal Hunter
1987
L'Ange de la mort / Commando Mengele (Angel of Death)
Savage Harbor /Death Feud
SFX Retaliator /The Heroin Deal
1986
Final Score
1985
Palmer, père et fils (Promises to keep) (TV)
American Commandos / Hitman
The Serpent Warriors
1984
The Executioner, Part II
La Forêt explosive (Danger - Keine Zeit zum Sterben / No time to die)
1983
Commander Firefox
1981
Ritoru champion
1980
Le Jour de la fin des temps (The Day Time Ended / Earth's final fury / Vortex)
Tusk
Rumeurs de guerre (A Rumor of War) (TV)
Desperate Target (1980)
1978
The One Man Jury / Dead on Arrival
Stingray
1977
Flight to Holocaust
1976
La loi de la haine (The Last Hard Men)
1975
Chinese commandos
1974
Once
La Dynamite est bonne à boire / Bloody sun
Master Samurai / La Rançon du Samouraï
1973
Ricco/ Un Tipo con una faccia strana ti cerca per ucciderti / Cauldron of death
Le Bal du Vaudou (Una Gota de sangre para morir amando/ Clockwork Terror /Murder in a Blue World / To Love, Perhaps to Die)
A Time for Love /New Kind of Love
Asia Cosa Nostra
1972
Meurtres au soleil (Un Verano para matar)
1971
Cactus in the Snow / You Can't Have Everything
Big Jake
H-Bomb / Great Friday / Operation Alpha
1970
Rio Lobo
Bigfoot
Suppose They Gave a War and Nobody Came?
Chisum
1969
Un homme fait la loi (The Good Guys and the Bad Guys)
Young Billy Young
Ainsi que quelques apparitions dans des séries télé