Vous allez me dire que c'est plus trop le sujet.
La curiosité piquée par la chronique audio de Big Bug par Mathilde, je suis allé sur mon appli de streaming favorite (gag!), et j'ai regardé ce que j'attendais être un désastre.
Veuillez m'excuser le vocabulaire approximatif, les phrases un peu longues et les répétitions, il est tard, je bosse demain, j'ai plus d'ordi et je fais ça au portable, je ferai des exposés bien rédigés et relus trois fois quand le SAV de mon magasin favori arretera de prendre on PC en otage.
Alors, est ce dû à la sympathie que j'éprouve à l'égard du réalisateur ? est ce que la chronique de Mathilde descendait tellement le film que je n'attendais plus rien du produit? Est ce que j'avais pris du LSD? Personne n'aura jamais réponse aux raisons qui me portent à donner le verdict que je poserai sur ce film.
Hé bien, j'ai pas passé un si mauvais moment. Alors certes, le film est plein de défauts, entre les panards effectivement gigantesques utilisés pour expliquer contexte, enjeux et tout autre élément plus compliqué que "passe moi le sel", les robots qui veulent devenir humains par des moyens qui relevent d'une candeur que je n'imaginerai pas chez la plus pourrie des versions de chatgtp, et les xyonix au profil de sous Robocop à ratelier plastique qui se font dégager de la manière la plus con dans la famille des eucatastrophes (imaginez Sauron qui cabotine dans son volcan dans le premier episode du SDA, glisse sur une peau de banane et en fait tomber sa breloque). Certes.
Cependant il y a de bonnes choses. Relativement. Rentrez vos fourches. En effet le film parle de marivaudage, de frifris, de froufrous et de toutes ces choses. Mais ça a du sens. Oui tout le monde est con, hystérique et en manque total de repère. Mais ça a du sens.
Ça a autant de sens que la maison ressemble étrangement à un pavillon retrofuturiste à la Fallout 4 (dans sa scene d'intro les enfants hein, pas la version postapo), id est à l'americaine, pelouse proprette, baie vitree sur salon avec coin cuisine, couleurs pastels de rigueur, robots de cuisine aux couleurs vives et chromes, buanderie (pas sous sol, buanderie), deux chambres à l' étage, avec SdB privative pour la suite parentale, le tout dans une rue aux "maisons toutes pareilles" (pour citer les Cowboys Fringants). Des thèmes que l'on retrouve aussi bien dans Fallout que dans Retour vers le futur. Regardez autour de vous, la société actuelle n'attend que ça, que vous suciez votre pouce, entre l'art déco à l'ancienne, le succès de Stranger Things, le mattraquage ad nauseam pour tous les dessins animés de notre enfance. Pas pertinente l'ambiance? Oh que si malheureusement.
La société est gangrenée par une publicité omniprésente au point où un bidule qui m'a fait pensé au dirigeable de Blade Runner vient constemment conseiller un produit adéquat aux nez des protagonistes à chacune de leurs mésaventures avec la finesse et la délicatesse d'une fenêtre pop up de l'internet 1.5 du début des années 2000 et cela bien trop souvent, avec un cynisme se rapprochant un peu (un peu, ok?) d'un Robocop. Dites, vous avez regardé Youtube recemment? Ou Netflix en mode pas trop cher?
Les personnages principaux aussi sont le reflet d'une inquiétude légitime. Elza Zilberstein se targue de faire de la belle écriture en attaché a la plume, exemple parmi d'autres d'une incapacité des personnages à réfléchir un tant soit peu (voir aussi la scene de la recherche des lunettes). L'idée est pertinente (je renvoie les potentiels lecteurs au post sur l'utilisation de l'IA, et mon avis sur la question, et la formation des masses à la dependance à cette merde).
Alors voilà, oui, ça parle d'une catégorie sociale (bourgeoise, disait Rico? Je ne crois pas, je dirai "classe moyenne"), déconnectée au point de vivre sa vie sans souci autres que ceux qu'elle se créée, et soudain confrontée au soulèvement des machines. Sauf que non. Ça fait un moment que les Xyonix contrôlent tout, ils sont déjà les decisionnaires, la police, les instances, et les humains leur font une totale confiance. En somme ils se sont eux meme posé la laisse autour du cou, bien avant le début du film, et tout ça en fermant les yeux bien fort et en espérant que tout se passe bien (ce qui me fait penser à beaucoup de décisions stupides prises par le passé... Comment un exemple? Je sais pas, beeen, Titanic? Il coulera jamais, pas besoin de tous ces canots. Le mot de passe "motdepasse" de votre collègue de bureau. Vendre la FDJ, Supprimer l'ISF, supprimer la taxe d'habitation sans expliquer aux maires comment les caisses locales seront renflouées, etc...).
Ces gens sont devenus complètement dépendants de leur entourage electronique pensant, comme nous sommes aujourd'hui completement dependants des ordis et des portables (essayez de faire une multiplication a deux fois deux chiffres ou de vous passer de votre telephone une semaine). Le fait qu'ils nous paraissent agir en toute absurdité est le phénomène identique à celui qui nous fait rire devant un video gag, la certitude qu'on n'aurait pas fait comme ça. Ce qui est normal vu qu'on vit selon d'autres paramètres. Alors certes la dépendance décisionnelle a la machine etait déjà évoquée dans Alien, et mieux que ça. Mais là, led protagonistes ressemblent plus à ceux d'idiocracy en version tres soft, qu'à ceux d'alien.
Dans un certain sens, ils m'ont fait pensé a des protagonistes de Ravage, de Barjavel. Des gens tellement en dépendance de leur environnement qu'ils sont incapables de quoi que ce soit si on tire la prise de courant. Alors oui, ils échouent à sortir, et disent tant pis on verra demain. Et c'est pas déconnant, pasque ça me parait pas le genre de personnes à avoir 24 coups d'avance, c'est plutôt la paresse ou la misère intellectuelle, voir l'acceptation de la passivité, avec cette bimbo écervelée qui ne deparerait pas dans les Marseillais, preferant s'humilier en public histoire de gagner un acquis social (ou du moins ne pas en perdre). Theme qu'on pourrait rapprocher de certains thèmes abordés dans Running Man ou Marche ou Creve.
Quant à savoir si les robots veulent ou non baiser, ben non les robots veulent pas baiser. Ils veulent etre humain sans savoir ce que cela représente, tentent des trucs en fonction de ce qu'ils observent. Ils n'évoquent meme pas cette éventualité, se contentent de mimer certaines scènes humaines, sans en tirer quoi que ce soit.
Pour conclure. Oui je suis d'accord avec Mathilde, Jeunet a perdu de sa superbe, il est loin le grand chapiteau sous lequel il nous apportait ses spectacles merveilleux, tapageurs, poétiques, burlesques et puissants. Big bug est aussi asceptisé que l'atmosphère surfiltrée entourant ses protagonistes, les effets spéciaux raisonnables au mieux n'apportent rien à une comédie finalement assez convenue. Et pourtant non, je ne peux pas accepter que cela soit le résultat qu'on pourrait rapidement balayer d'un "ok boomer" aussi amusé qu'irreflechi. Certaines pertinences peuvent se retrouver comme le reflet grossi et déformé de certaines de nos réalités actuelles, un réchauffement climatique combattu à grand renfort de climatiseurs, un abaissement intellectuel généralisé via une dépendance (au sens clinique) à la machine, une incapacité créative ou décisionnelle frisant le niveau Cp-ce1 (au fait quel est votre niveau à votre jeu en ligne favori?). Big bug est le constat pathétique et pre-apocalyptique d'une civilisation rendue incapable et infantilisée, plongée dans l'ennui au point de ressembler à ces pauvres singes au zoo semblant attendre la fin de la journée en jouant distraitement avec leur zizi devant la vitre.
Mathilde reprochait au film que la révolte des machines est traité en "off". Mais c'est normal. C'est pas là ce qui importe. Le cinéma de SF, du moins un pan, ne s'interesse plus aux heros spaciaux et aux grandes fresques robotiques. Une partie de la SF déprime, se dit que là, c'est mort, il est révolu le temps où on pouvait penser que partir pour les contrées lointaines accompgné de son acolyte de métal et de siliconeurones, c'etait cool. Une partie de la SF pense que la direction qu'on prend ne mène plus sur ces voies, et veut tirer la sonnette d'alarme, afin d'alerter sur un futur qui ne sera ni spatial, ni cyberpunk, ni biopunk, mais juste punk, dans sa forme la plus littérale et étymologique.
Bon je me suis un peu enflammé, et vous m'excuserez (encoooore) ce gros paté indigeste, fruit de mon irrépressible envie de faire des phrases. Ma femme vous remercie par ailleurs d'être les victimes de mes soliloqueries à sa place. Big bug reste un tout petit Jeunet, qu'on regardera d'un oeil distrait au mieux, mais je ne peux ecarter dans les intentions de l'auteur des pertinences certes traitées avec beaucoup, beaucoupde maladresse à l'ecran, mais qui restent des critiques de notre époque par une personne qui ne s'y reconnait pas et qui veut alerter sur ces biais, ce qui le fait rentrer dans l'Anticipation. C'est mon avis. Et si ça fait de moi un vieux con, osef impérial.
_________________ Festival de la tarte à la va... Mais qu'est-ce que c'est que cette connerie? Il est où, mon "che" ?
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