Les termes "guerriers" et "jungle" doivent être parmi les deux occurrences qui ressortent le plus régulièrement quand on fait une thèse sur les films de guerre. C'en est même à se demander si, de temps en temps, la guerre a jamais lieu ailleurs que dans des sous-bois humides. Et quand le danger tapi dans les buissons n'est pas un perfide viét (excusez le pléonasme), c'est un gros barbu sale qui fume des cigares en hurlant à la evolución. Les Guerriers de la Jungle se propose de mettre en valeur cette seconde catégorie de joyeux gaillards dans sa sous-dimension de la milice privée, toute aussi intéressée par les profits du trafic de came que par l'enlèvement d'otages, particulièrement quand ces otages sont de jeunes mannequins en petite tenue.
C'est ainsi qu'en plein cadre bucolique péruvien, quatre jeune "top-models" partent effectuer des séances photo nature, accompagnées de leur manager, leur maquilleuse, leur coiffeuse, leur producteur, tout ce petit monde étant guidé à travers les verts feuillages par un Indiana Jones local. Mais soudain, c'est le drame, leur avion touristique est abattu, et l'Enfer Vert leur accueille à bras ouverts.
Je pourrais faire durer le suspens sur les bien mauvaises surprises qui les y attendent, mais je me suis grillé tout seul dans mon intro. Alors autant tout vous balancer d'emblée. L'adversité est ici représentée par une bande de narco-trafiquants crasseux jaloux de leur parcelle de jungle qui ne supportent pas qu'on vienne fouiner dans leur activité professionnelle. A leur tête, le paranoïaque amorphe Cesar Santiago (tout un programme), leader gourou secondé par sa sœur et amante, Angel. Et oui, un tel non-respect des tabous les plus fondamentaux de nos sociétés ne peut qu'être le signe d'une méchanceté maléfique congénitale (ou bien d'un lien familial avec un certain Robert -Bo Donnelly- Ginty).
La troupe quasi au complet (les spécialistes y reconnaitront Didi Belair alias Eva dans certains Sidaris alias la nana aux gros nichons dans la séquence du motel de "Commando").
Une coupe de cheveux digne d'un groupe de hard-FM.
Les Guerriers de la Jungle, c'est avant tout un casting 4 étoiles.

Marjoe Goetner incarne Larry Shaker, producteur cocaïnomane (on comprend mieux le choix du pays). Cet habitué des nanarophiles a déjà fait ses classes en cabotineur enfiévré dans Food of the Gods avant de se faire mondialement connaitre en hippie halluciné dans l'incontournable "Starcrash", pour finir en démoniaque fabricant de virus à Ninja dans "American Warrior 3". Sa gymnastique faciale est toujours agréable à regarder, même si force est de lui reconnaitre qu'il a su assagir pour l'occasion son jeu d'acteur. Malheureusement pour lui, son personnage devait gêner le scénariste car il est soudainement et inexplicablement pris d'un comportement suicidaire qui se concrétisera par un décès dans la plus grande tradition du piège de jungle.
John Vernon incarne Vito Mastranga, un mafieux qui passe le film à attendre dans son coin qu'on veuille bien l'appeler pour la séquence finale. Second couteau que le physique prédestine aux rôles de salauds, il s'était illustré avec réussite en flic borné et sadique dans "Killer Klowns from outer Space". Pas grand chose à redire sur sa prestation ici, John assure le minimum syndical avant de finir finement haché par un pal d'hélicoptère.

Woody Strode incarne Luther, homme de main quasi-mutique. Autre célèbre tronche d'arrière-plan du cinéma italien, Woody est un acteur qui fait plaisir à voir, surtout quand il est équipé d'un arc et de la coolos-attitude black.
Sybil Daning incarne Angel, raffinée tortionnaire à la sexualité ambigüe du moment que c'est malsain. Actrice autrichienne membre de l'internationale du nanar pour avoir pu tourner dans des films ratés de nombreux pays différents, ses rôles ont l'avantage de souvent marquer les métrages en question : entre ses tenues déshabillées de "Malibu Express", son célèbre sextodécuple plan nichon de "Hurlements 2" et son domina-style dans Chained Heat, le mammophile a de quoi fantasmer. Dans le métrage présent, elle fournit un mix de ses prestations habituelles tout en réussissant l'exploit de ne pas trop se ridiculiser.
La perche-son, célébrité qu'on ne présente plus, véritable légende du nanar et caméo indispensable à toute réussite digne de ce nom. Savoir briller à l'écran tout en restant dans son coin est un art que beaucoup lui envie.
Paul L. Smith incarne Cesar Santiago. LA raison pour laquelle il faut regarder Les Guerriers de la Jungle. Ah, la jaquette française a beau mettre en avant sa participation à Midnight Express, pour l'amateur de nanar, c'est surtout le mono-neuronal Willard dans "Le Sadique à la Tronçonneuse", Surbus le gros lard des cavernes dans "Gor" et aussi le sosie officieux de Bud Spencer dans des sous-Trinita visant à soutirer toujours plus de sous aux naïfs consommateurs de VHS. Et dans le métrage présent, Paul nous donne le pire de lui-même : le regard se veut intelligent et hautain mais donne juste l'impression d'être contemplé par un bœuf mort ; le visage paralysé ne réagit à rien, seul un muscle contractant un coin de lèvre fonctionne pour lui permettre d'esquisser un petit sourire moqueur. Son plus grand exploit d'acting doit se résumer à relever brièvement les sourcils de quelques millimètres pour simuler la surprise. Il se déplace au ralenti, les bras pendants, l'air tellement balourd et démotivé qu'on croirait un hypothyroïdien mélancolique. Accepter que cet être amorphe puisse être le leader charismatique et sorophile d'une mini-armée est tout simplement inconcevable.
Dans le registre acteur nanar, y'a deux grandes écoles : le surjeu cocaïné et la paralysie faciale. Paul a clairement choisi son camp.
La surprise, by Paul L. Smith.
Le contre-coup nanar en est d'autant plus surprenant lorsque soudain, lors de l'assaut final, il s'anime et se met à violemment ruer dans les brancards. Il devient alors un indestructible martialiste bastonneur qui défonce tout ce qui lui tombe sous la main, faisant fi de tout type de blessure reçue : bouteille, chaise, couteau, et même balle de révolver le laissent de marbre et n'altèrent en rien son inexpressivité. C'est l'incroyable Hulk sans le vert et les hurlements. Il pourrait presque gagner la guerre à lui tout seul s'il ne finissait braqué au corps à corps par un lance-roquettes !!!
Paul Smith est vraiment un incroyable argument nanar dont le spectacle ne peut laisser de marbre.
Pour un peu, on se croirait devant Rambo 5, retour au pays du surpoids.
Paul Kersey braque le dealer : "
c'est fini pour toi, Rostov".
Mais n'oublions pas nos mannequins en détresse. Voir ces jeunes femmes infantiles courir dans la jungle en talons aiguille, le sac à main en bandoulière, est un spectacle assez sympathique, dont le destin tragique doit beaucoup à ce côté cinéma d'exploitation qui n'hésite pas à les faire sauvagement violer par une horde de guerilleros crasseux, dont un obèse poilu portant un tee-shrit E.T. obscène (y'a un petit côté Bisounours dans un film de cul). Mais c'est toutefois grâce à cette maturation psychique éclair que de ces enveloppes de fragiles donzelles, sortira une équipe de karatekas girls armées et prêtes à en découdre, dans une logique toute rape & revenge flick. Toutefois, la démonstration de l'adage "
ce qui ne nous tue pas nous rend plus fortes" s'arrête là, car à peine auront-elles réussi à piquer un bus de combat qu'elles se crasheront irrémédiablement sur la première épave venue, soit 10 mètres plus loin (je n'exagère même pas).
Tradition nanarlandaise oblige, je ne vous montrerai pas d'images du viol collectif mais plutôt celle d'une vieille péruvienne indignée.
Pour les plus vicelards en manque, voici tout de même le gros barbu et son shorty de l'espace.
Les quelques doublages aux accents péruviens valent le détour, même si l'ensemble des dialogues se contient (j'aime bien, toutefois, l'expression "
on a fait chou blanc"). La réalisation est sans particularité, avec un montage parfois un peu comiquement abrupte. Le quota nanar suit un rythme très tranquille, jamais vraiment ennuyant, et régulièrement ponctué de petits détails marrants (une tête de mannequin en mousse par ci, une maquette d'hélicoptère par là) avec une véritable envolée de débilité située lors du grand final qui voit Cesar exploser le baromètre du nawak.
Les Guerriers de la Jungle est donc à réserver pour les petits creux, en se gardant bien d'en attendre trop.
Allez, t'énerve pas Paul, il est quand même sympa ton film.
A plus, les filles !
Note : 1.5/5
Titre : Les Guerriers de la Jungle
Titre VO : Euer Weg führt durch die Hölle (Le chemin à travers l'Enfer)
Titre Alternatif : Jungle Warriors
Pays : Allemagne/Mexico
Année : 1984
Durée : 1H32
Genre : Placide et Mollo / Les Guerrières de ....
Catégorie : Guerre
Réalisateur : Ernst R. von Theumer
Acteurs : Nina Van Pallandt, Paul L. Smith, John Vernon, Alex Cord, Sybil Danning, Marjoe Gortner , Woody Strode, Ava Cadell...
Images bonus
Un garde qui pisse sur son propre véhicule.
Encore un guerillero qui confond libertad et incurie dentaire.
La troupe des bad guys.
Même dans la jungle, on trouve des fans du Rocky Horror Picture Show.
La Danoise Nina Van Pallandt nettoie le palais au fusil-mitrailleur.
Des tirs au lance-roquettes en intérieur !!
Une balle, et voici un figurant qui se prend soudain pour un clown.
La même, grâce à une flêche.
Cesar à la recherche du piaf responsable de son état.
Pour le plaisir.
Cote de rareté : 5/Introuvable
Seule l'édition version VHS de chez CBS Fox vous permettra de profiter du film en français. Il existerait un DVD zone 1 dont les spécificités me demeurent inconnues.
