SHOCK 'EM DEAD
USA. 1991. 93mn.
Réalisateur : Mark Freed
Avec : Stephen Quadros, Traci Lords, Markus Grupa, Karen Russel, Aldo Ray, Troy Donahue...
Ami lecteur, souviens-toi... Souviens-toi de la fin des années 1980... Cette époque bénie où le summum de la classe était de foncer sur l'autoroute avec une cassette de Poison ou de Mötley Crüe à fond dans l'autoradio... Toute une génération réunie dans l'adoration des guitar heroes qui jouaient plus vite que leur ombre, parés d'atours chatoyants, fluos et moulants de préférence...
Shock 'Em Dead est l'histoire d'un jeune loser dénommé Martin. Quand il ne se fait pas houspiller par son patron à la pizzeria ou par le propriétaire de la caravane dans laquelle il habite, Martin joue de la guitare. Mal. Tellement mal que, lorsqu'il tente d'auditionner pour un groupe, il ne fait que se couvrir de ridicule.
"Allô ? Je t'appelle pour te dire que t'es nul !"
Parlons-en, de ce groupe, car on ne peut pas dire qu'ils aient de leçons à recevoir en termes de ridicule. A commencer par le chanteur, Jonny, dont les accoutrements indescriptibles, les manières improbables et la voix insupportable (ce qui serait normalement handicapant pour un vocaliste) le rendent tout de suite éminemment sympathique au nanardeur.
"Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhhh"
Il est secondé par un batteur à la chatoyante crinière permanentée, un claviériste proprement inexistant ne s'exprimant qu'à travers les pouets de son instrument et un bassiste, Greg, dont le seul intérêt scénaristique est d'être le boyfriend de la manageuse Lindsay, interprétée par l'ancienne star du X Traci Lords. Au niveau sonore, la soupe qu'ils nous servent est tiédasse et d'une laideur sans nom, à l'image de la piteuse version du légendaire Purple Haze de Jimi Hendrix qui ouvre le film.
Le problème est que Martin a perdu son travail en allant auditionner, et que sans argent, il ne peut plus payer son loyer. Totalement désemparé, il se raccroche à son dernier recours : une sorcière vaudou qui lui propose d'exaucer son voeu le plus cher. La réponse de Martin ne se fait pas attendre : « être la plus grande rock-star de tous les temps ». Ainsi soit-il ! Cela nous vaut une magnifique scène d'envoûtement qui voit notre loser projeté dans un monde parallèle où il rencontre un être étrange muni d'une guitare à deux manches (Michael Angelo Batio, du groupe Nitro), qui lui transmet ses pouvoirs via un éclair nanar.
A son réveil, Martin a ce dont il rêve : un manoir gigantesque (avec un water bed, of course), des femmes peu vêtues à son service, une pièce remplie de guitares, et surtout une virtuosité inégalée. Pour bien nous faire comprendre qu'il n'est plus un loser, il perd également ses grosses lunettes, et gagne une perruque noire du blus bel effet. Rebaptisé Angel Martin, son premier réflexe sera de retourner voir le groupe pour leur prouver qu'il est l'homme de la situation.
"Woah, je suis tellement fort que ma guitare se branche toute seule !"
A partir de là, le film va enquiller les descentes de manches vertigineuses et les plans shredding les plus imbuvables en toute impunité. Pour le plus grand bonheur des amateurs de guitare, cela nous vaut des gros plans sur les mains de notre héros, qui donnent au tout une étrange allure de vidéo pédagogique pour apprenti musicien. Au passage, inutile de préciser que lesdits gros plans ont l'avantage de ne pas révéler trop expressément que c'est une doublure (le même Batio) qui joue. Les faux raccord du type guitare débranchée-branchée sont évidemment légion.
Concours de grimaces.
"Ouéééééééééé !" (ce plan revient à l'identique quatre fois de suite)
Vous le voyez venir : c'est bien joli de devenir un dieu de la guitare en deux temps trois mouvements, mais il doit y avoir un revers à la médaille. Pour faire vite, Angel/Martin, à l'instar de ses nouvelles égéries, est maudit et doit tuer des gens pour survivre, car il ne peut ingurgiter de nourriture, ce qui l'empoisonnerait. Là commence une relative hécatombe dans le casting, qui fera malheureusement disparaître assez vite Jonny au moment où ses tenues de scènes dépassaient l'indicible pour atteindre l'impensable. Qu'importe puisqu'Angel lui a volé la vedette dans le groupe et que cela leur a garanti une tournée en ouverture de « Creeping Flesh ».
"Je vais l'étriper ce braillard à la con !"
Seulement voilà, comme le laisse deviner la jaquette qui met en valeur Traci Lords, Angel tombe amoureux de Lindsay, mais essaye aussi de la tuer pour survivre. Cohérence des personnages, quand tu nous tiens. Il est à noter que l'ex-hardeuse sera une des rares actrices à ne pas dévoiler son anatomie dans le film.
Lindsay est sous le charme du ténébreux Angel.
Son fiancé Greg se rend compte qu'il se passe quelque chose de louche, mais tarde à prendre la mesure du danger que représente le guitariste maudit, jusqu'à ce qu'il se décide enfin à lui régler son compte au terme d'une bagarre dont la mollesse n'a d'égale que l'invraisemblance.
Mais ce qui se passe à l'écran n'a que relativement peu d'importance par rapport à l'allure générale du film et aux pics de délire visuel et sonore qu'autorise ce style hard-glam californien, surtout quand il est conjugué à une phénoménale absence de moyens, voire de talent. Au final, le film se laisse agréablement suivre malgré sa trame hautement prévisible, et contient nombre d'éléments propres à réjouir le nanardeur novice ou endurci.
Quelques looks grâcieux pour finir en beauté.
3,5/5
(je me suis un peu laché sur les caps, mais j'ai pas pu résister)