Devil Rider(aka Barrow Street aka Riders Killers aka Master’s Revenge)
Catégorie: Crime et délits
Genre: Débile Rider / Né pour être savate / Born to be worst/ Vieux motards que jamais.
Réalisateur: Brad F. Grinter
Pays: Etats-Unis
Année: 1970
Durée: 1h10
Avec: Sharon Mahon, Johnny Pachivas, Ross Kananga, Ridgely Abele, Chris Martell... .

Depuis "Eaux Sauvages", tout le monde sait qu'un doublage magique peut faire basculer un film vers les bas fonds de la bêtise. Découvrir en "Devil Rider" une autre œuvre à la connerie décomplexée en ce qui concerne sa post-synchro, ne peut dès lors que pousser le nanardeur à sauter de son divan. Alors si en plus on lui apprend que le metteur en scène est Brad F. Grinter, co-responsable du cataclysmique "Blood Freak", il ne fait plus qu’un bond, mais entame une série de saltos digne d'un gymnaste olympique.


Un générique qui donne mal au coeur.
Tout commence lorsque James Aldridge, prof de karaté, se prend la tête avec sa petite amie Katie, laquelle lui reproche de passer plus de temps sur son tatami qu'à s'amuser, ce qui aménera la douce à s'acoquiner avec une bande de motards menée par Champ. Inquiet, le père de la demoiselle engage un détective afin de faire revenir sa fille dans le droit chemin, et lui éviter de finir comme sa sœur Penny, qui avait déjà suivi nos Hells Angels des bacs à sables. Une préoccupation légitime lorsqu'on sait que les dits bikers ont des vies de marginaux, les voyant s'échanger leurs femmes ou régler le moindre contentieux à grands coups de chaînes de vélo.


James, le "Karaté Instructor" dixit la jaquette.

Champ, monsieur loyal du cirque Bikeros, et cette gourdasse de Katie.

Penny, la frangine de Katie. Là si j'étais vilain j'écrirai une légende du style "que fait Amy Winehouse dans un nanar des années 70 ?". Mais comme je ne suis pas du genre à tirer sur l'ambulance, je m'abstiendrais.
Derrière cette trame adulte, sorte de pamphlet sur une forme de détresse psy qui pousserait les filles de bonne famille dans les bras de malotrus, on découvre vite des éléments qui vont changer le tout en pur moment de rigolade. Comme annoncé dans l'intro, la grande force du film réside dans sa VF. Bazardé par des comédiens sous temesta, pas un dialogue n'atteint son but la faute à un foudroyant manque de conviction. Prodigieuses de platitudes, les plus petites répliques sont ainsi sublimées par des acteurs au fond du trou, récitant leurs phrases sans la moindre émotion et jouant faux comme c'est pas permis. Les hésitations étant légions, on peut se douter que la poignée d'intermittents responsables du doublage découvraient leurs textes au fur et à mesure, sans s'être encombrée de quelconques séances de préparations. Mais avec trois pelés et un tondu pour faire l'ensemble des voix, difficile de s’attendre à un miracle. La forme est magnifique, le fond n'est pas mal non plus, nous gratifiant de jolies impro. Certes, on ne retrouve pas les trips cocaïnés de "Blood Freak" ou les envolés philosophiques d'"Eaux Sauvages", mais les efforts investis pour se hisser au niveau de ces références force le respect. Ainsi, relever toutes les répliques affolantes et nonsensiques du film serait fastidieux, et reviendrait à recopier une grosse partie de la bande son. Mais il est clair qu'entendre deux motardes se crêper le chignon donne un bon aperçu de la profonde crétinerie des dialogues, lesquels semblant tous avoir été écrits par un sous Audiard défoncé à la colle.
L'ex d'un loubard va nous parler d'atmosphère. Pourtant, ces voix ne servent en fait qu'à magnifier le jeu des différents intervenants, à commencer par les loubards. Que dire de cette fine équipe, si ce n'est qu'on a du mal à la prendre au sérieux. Maquillés comme les Village People, nos filous auraient peine à effrayer des élèves de maternelle et on pourrait les laisser gentiment cuver leurs bières s'ils n'avaient pas des mœurs aussi douteuses, nos lurons n'hésitant pas à abuser des femmes qu’ils croisent sur leur route. Dit comme ça, c'est plus sordide qu'autre chose mais il faut voir comment les événements s'enchaînent. Parce que franchement, lorsqu'on décide de suivre de son plein gré des voyous aux bonnes têtes de vicelards dans une cabane au milieu de la forêt, faut bien se douter qu'ils veulent faire autre chose qu’un Pictionnary. Ladite séquence vire d'ailleurs au surréalisme complet lorsque
Richard Clayderman s'invite à la fête et balance en fond sonore un solo de piano, à mille lieues de l’ambiance malsaine que l'on aurait pu attendre.

Ils n’inspirent pas la confiance nos séducteurs ?

Ah bah quand même ! Elle aura mis le temps.


Une certaine idée de la classe.
Le reste du casting brille aussi par sa nullité, chaque protagoniste faisant tout leur possible pour s’auto saborder. Il y a déjà le père de Katie et Penny, joué par Brad F. Grinter lui-même, lequel semble se foutre complètement du destin de ses filles en mettant un point d'honneur a ne jamais paraître paniqué. Mais à mon avis, le bonhomme ne tournait pas qu'à la cigarette russe, ceci expliquant beaucoup de choses. Puis viennent ensuite la mère et le petit ami, qui l'un comme l'autre font preuve d'une absence de justesse à tomber à la renverse. Il suffit d’admirer la pauvre femme pleurer à chaudes larmes la disparition de sa progéniture et
se disputer avec son époux pour mesurer l’étendue des dégâts. L'absence de conviction du judoka reste aussi à montrer dans toutes les écoles de cinéma, pour avoir une vraie idée du niveau zéro, voire moins un, de l'actor's studio mais à sa décharge, on pourra se dire que comédien n’était pas son vrai métier.

Brad F. Grinter et sa tronche de démarcheur en produits stupéfiants.
Pourtant, on est loin, très loin d'avoir trouvé le plus mauvais interprète du film. Car dans le genre, notre détective va s'avérer être un véritable épouvantail, faisant fuir autour de lui toutes traces de justesse et de talent. En gros, qu'il se retrouve dans un chambre avec une prostituée ou qu'il se fasse torturer, ça ne fait aucune différence et notre brave homme semble se moquer totalement de ce qui passe et contemple le film comme une vache regarderait passer un train. D'une inexpressivité qui confère à l'indicible, sa seule preuve d'implication réside dans un petit sourire en coin qui semble vouloir nous dire que notre homme n'en a décidemment rien à cirer. Ou alors, c'est pour faire privé détaché, à la Bogart. N'empêche qu’avec le charisme d'un bulot mort, c'est pas un truc à tenter. On dégagera aussi de sa prestation un sens de la ruse proprement sidérant, notre coincé en costard tentant d'infiltrer le gang de bikers avec un déguisement de carnaval. En même temps, lorsqu’on voit comment les autres sont fringués, ça aurait tout aussi bien pu marcher… .

Le privée. Niveau physique, un peu de Joe Pesci et un "je ne sais quoi" de Jack Nicholson. Par contre pour les talents respectifs, on repassera.


Le même dans son look "né pour être sauvage".


Les motards les plus dangereux d’Amérique !!
Niveau réalisation, nous ne sommes pas mieux lotis. Si on ne le connaissait pas, on pourrait même se demander si Brad Grinter n’était pas en fait le cousin dégénéré de la famille d’Alan Smithee, celui qu'on planque dans la cave parce qu'on en a honte. Bien sûr, on se dira que l'on peut toujours faire pire mais il est clair que le bon Brad aligne avec classe tout ce qu'il ne faut pas faire en matière de mise en scène. Acteurs sous-exposés, cadrages foireux, gros, voire très gros plans, cadence léthargique ou au contraire hyperactive… c'est un festival de n'importe quoi prenant toujours le spectateur à contre-pied. Mention spéciale à l'une des séquences finales où notre détective, attaché à un arbre, voit plusieurs bikers se lancer sur lui armés de bâtons. L'idée de base paraît déjà ridicule à première vue, plus aucun doute n’est permis lorsque
la réalisation apocalyptique désamorce avec perte et fracas le semblant de dramaturgie de cette scène. Toutefois, cela représente bien l'un des gros soucis de Devil Rider, à savoir sa gestion du rythme. Car passé quelques changements de plan dignes d'un clipeur de MTV détraqué au speed, ce qui marque avant tout c'est cette façon de meubler le vide par du creux et il faut voir notre privé, encore lui, retrouver Penny et la raccompagner chez elle, EN TEMPS RÉEL, pour se faire une idée de la lenteur du métrage. Evidemment, c'est le genre de détail qui rebutera peut être une partie des spectateurs. Mais si vous adhérer au concept, vous serez alors captivé par cette mollesse frénétique venant vous happer pendant un peu plus d'une heure.




Après le non jeu, la non mise en scène. Au moins Brad va au bout de ses idées.
Devil Rider est ainsi le genre de fiasco complet qui peut laisser sans voix. Evidemment, certains vous diront peut être que le tempo infernal les a fait lâcher en cours de route et que même en se focalisant sur un doublage étincelant, on atteint jamais les proses démentielles d'autres références. Mais ne vous arrêtez pas à ces futilités, car si vous avez envie d’une équipée sauvage, vous n’aurez plus qu’à enfourcher votre harley et filer, droit devant, sur les routes de la folie. L’aventure n’attend plus que vous.
Wolfwood 3,5/5
Grand merci à André, nanar-addict et Kobal.
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Cote de rareté
Pièce de collection
Oublié de tous à l'exception de quelques chineurs de l'impensable, Devil Rider est sortie dans nos contrées sous les noms de "Barrow Street" chez A.V.L Production et de "Riders Killers" chez America. Certains prétendent qu’il pourrait exister une édition dvd, mais en l’absence de preuves, nous resterons prudents.


La jaquette de chez America avec son résumé fantaisiste et son image même pas tirée du bon film. Ne cherchez pas non plus les cow boys squelettes, ils n'ont rien à faire là.

Une VHS américaine.
Bonus:
Le thème principal.