Titre original : New York Ninja
Réalisateur : John Liu, Kurtis Spieler
Années : 1984 et 2021
Pays : États-Unis
Genre : Qu'est-ce qui pourrait sauver le nanar (Catégorie : Au delà du nanar)
Durée : 93 min
Acteurs principaux : John Liu, Don « The Dragon » Wilson (voix), Michael Berryman (voix), Cynthia Rothrock (voix), Linnea Quigley (voix)
Nous sommes en 1984.
Michel Platini aide l’équipe de France de football à remporter son premier titre majeur à l’Euro. Alain Prost perd le championnat du monde de Formule 1 face à Niki Lauda pour 0,5 point. Les Celtics de Boston remportent le championnat NBA face aux Lakers dans une dernières manche décisive endiablée. Carl Lewis remporte 4 médailles d’or aux Jeux Olympiques de Los Angeles.
On peut aller voir la première version de Dune au cinéma, les frasques d’un Mozart complètement déjanté dans Amadeus, passer un Noël de folie au côté des Gremlins ou suivre un type du futur si on veut vivre.
Le marché de la vidéo et le monde du cinéma de genre n’est pas en reste. Le cinéma horrifique accueille Freddy Krueger là où Vendredi 13 en est à son soit-disant épisode final. Daniel-San a terrassé son bully Johnny Lawrence grâce à la technique de la grue. Charles Bronson écume déjà les rues pour assouvir ses désirs de vengeance… et les Ninjas ont le vent en poupe.
Sho Kosugi a marqué les esprits avec son « Revenge of the Ninja » et la Cannon embrayera avec « Ninja III: The Domination ». Et tout ça, c’est sans compter avec les huit douzaines de films de Godfrey Ho qui ne cessent d’envahir les bacs.
Les producteurs ne s’y trompent pas. Le mystique de ces personnages ou leur maîtrise des arts martiaux fait vendre.
Revenge of the Ninja (1983)Et puis, il y a John Liu.
Avant les années 80, l’acteur taïwanais a enchaîné les films d’arts martiaux à Taïwan ou à Hong-Kong. Il apparaissait principalement dans des films à petits budgets et les portes de la Shaw Brothers ou de la Golden Harvest ne se sont jamais ouverts pour lui.
Néanmoins, ses talents martiaux étaient reconnus. Et nombre de ses films de l’époque se sont exportés.
On pense notamment à « Secret Rival » qui a eu un succès presque imprévu pour un film de ce calibre aux États-Unis. Certains films de John Liu ont donc alors connu une diffusion dans des cinémas de quartier. Plus particulièrement dans les quartiers asiatiques qui passés nombre de films de kung-fu dans la semaine. Si bien que John avait ses fans et sa petite réputation au pays de l’Oncle Sam.
Et John, lui, de son côté, il sentait bien que les portes des gros studios asiatiques n’allaient pas s’ouvrir pour lui. Ils avaient déjà leurs stars. Par contre, il se rendait compte qu’aux États-Unis ou en Europe, des acteurs avec moins de talent que lui arrivaient à tirer leur épingle du jeu et à se retrouver dans des productions à budget plus conséquent que ce que lui pouvait connaître.
Alors, pourquoi pas lui ?
John Liu tenta alors une carrière à l’international. Les premiers résultats furent mitigés. Si les bastons de Zen Kwon Do strikes in Paris ou Dans les Griffes de la CIA sont de bonne qualité, les films en eux-mêmes ne sont pas des œuvres majeures. Sans doute parce que la production de ces films était plus que sommaire et que John a dû tout faire lui-même.
Jusqu’à ce que le projet « New York Ninja » fasse surface.
Voilà une capture qui résume bien la carrière de John Liu en EuropeJe ne saurais trop vous dire comment John Liu s’est retrouvé dans un projet où la 21st Century Distribution (à ne pas confondre avec la 20th Century Fox) était impliqué. Qui s’est rapproché de qui en premier ? John a-t-il appelé la 21st Century, entreprise située à New York, pour dire qu’il avait un projet de film à New York ? Est-ce que c’est la 21st Century qui a contacté John pour lancer sa carrière aux États-Unis ? Tout autre chose ? Je ne sais pas trop. Mais la rencontre s’est faite.
En soit, ce n’est pas étonnant que ce projet ait existé. La Cannon avait utilisé la notoriété d’un acteur asiatique pour faire des films de ninja ayant lieu aux États-Unis. Ce n’est pas étonnant que, devant le succès de la trilogie d’un concurrent, une autre boîte de production tente l’aventure avec un autre acteur.
Donc, John Liu arrive New York pour tourner son « New York Ninja » épaulé par la 21st Century. Attention, entendons-nous bien, le film restait quelque chose à très budget. Un film « guérilla » comme on aime les appeler aux États-Unis. À savoir que le film a été filmé sans demander aucune autorisation à la mairie de New York et qu’on n’était pas sur une super-production.
Toujours est-il que des producteurs ont fait confiance à John Liu et l’ont épaulé financièrement pour que le film se fasse.
Le cast a été réuni. On engage quelqu’un pour le maquillage bien compliqué du film (on y reviendra). Le tournage se fait.
Et puis… plus rien…
Pourquoi la production s’est arrêtée ? On ne sait pas trop. Mais après le tournage, plus personne entendit parler du film… et la carrière de John Liu ne décolla jamais.
à peu prèsNous sommes en 2021.
Karim Benzema aide l’équipe de France à remporter sa première Ligue des Nations. Max Verstappen remporte le championnat du monde de F1 après un final digne des grandes tragédies grecques. Giannis Antetokoumpo porte les Bucks pour remporter la finale NBA devant les Suns. Allyson Felix monte pour la 11e fois sur un podium olympique et dépasse Carl Lewis au palmares.
On peut aller voir la seconde version de Dune au cinéma, les nouveaux Vigilante portent des collants et nous poussent à regarder des génériques de trois quart d’heure en entier pour savoir qui va rejoindre l’univers dans le prochain film. Freddy Krueger et Jason Voorhess sont devenus des guest dans des jeux comme Dead By Daylight ou Mortal Kombat. Le Terminator, quant à lui, se demande pourquoi le Xénomorphe est armé d’un fusil à pompe dans Fortnite. Et les plateformes de VOD se demandent quelle vieille licence ils vont remettre au goût du jour pour ravir les nostalgiques. Ils ont déjà fait « La Fête à la maison » et « Karate Kid ». Exit les vidéo clubs, un algorithme vous recommande en quelques clics quel film va vous plaire.
Et Vinegar Syndrome annonce la sortie de « New York Ninja ».
Euh… whaaaaaat ?
Vinegar Syndrome, c’est ce genre d’entreprise qui refuse de vivre avec son temps et qui repousse, encore et toujours, l’inévitable. Elle restaure et resort des films, et souvent des films de genre, que l’on croyait perdu. Elle refuse de les enterrer, de faire son deuil et de passer à autre chose.
Au tout départ, ils ont retrouvé, restauré et resorti des films de l’âge d’or du porno aux États-Unis. Et petit à petit, ils se sont mis à restaurer d’autres genres, particulièrement le film d’horreur.
Pour ce faire, ils achètent les assets de boîte de production. Souvent des boîtes ayant fermé ou sur le point de fermer.
Courant 2020, ils ont acheté des films et des assets provenant de feue la 21st Century. Et là, ils tombent sur une boîte (la légende raconte que c’était même une palette) étiquetée «New York Ninja ».
Les membres de Vinegar Syndrome se regardent circonspects. Parce qu’il faut bien comprendre que ces gens sont des passionnés. Les films des années 60,70 ou 80, ils les connaissent bien. Je suis sûr que chez Nanarland, certains membres sont capables de réciter par cœur la filmographie de Paul Préboist ou de donner plus d’une cinquantaine de titres de slasher sortis entre 1973 et 1987.
Donc, imaginez la réaction de Vinegar Syndrome devant une étiquette qui leur pose une colle. Les films de ninja, ils connaissent. Ils ont vu tous les Godfrey Ho. Et là, ils sont devant un titre qui ne leur dit rien du tout. Un truc daté de 1984 dont personne n’a jamais entendu parler.
« New York Ninja » ? C’est quoi ce truc ? Ça existe ?
Sans tarder, ils ont pris les bobines et ils les ont regardées. Et devant leurs yeux ébahis, ils se rendent compte qu’ils sont devant un film abandonné. Un truc pas fini. Pire encore, les pellicules n’ont pas été conservées de manière la plus optimale, et le son a complètement disparu. Aucun dialogue, aucun effet sonore, aucune musique. Et pas de script sous la main.
Ils reconnaissent John Liu quand même. C’est des as, je vous dis. Et ils se rendent compte du potentiel incroyable du bousin… pour un public comme nous. LE film de Ninja des années 80 que vous n’avez jamais vu. Parce qu’il n’est jamais sorti. Et que son tournage était confidentiel et quasi secret.
Et alors là, dans la tête des membres de Vinegar Syndrome, cela ne fait plus aucun doute. Il faut finir le film et le sortir.
Attention ! Parce que là, le boulot est différent de ce qu’ils font d’habitude. Généralement, Vinegar Syndrome restaure des produits finis. C’est ça leur spécialité. Mais ils ne font pas des films eux-mêmes.
Et là, ils se retrouvent devant des heures de rush non exploitées et sans son. Certaines scènes ont des début… mais pas de fin. C’est très inégal. Des combats commencent sans se terminer. Il y a des dialogues de plusieurs minutes sans que l’on puisse comprendre ce qu’il se dit. Le truc, mis bout à bout, ne fait aucun sens. Qu’est-ce que ça raconte ? Qu’est-ce que les personnage se racontent ?
Surtout quand le personnage principal a un truc devant la bouche les 3/4 du film. Ca facilite pas la lecture sur les lèvres.L’équipe n’avait pas le script d’origine. Et très vite une décision s’est imposée. S’ils voulaient sortir le film, il allait falloir qu’ils fassent LEUR version du film, et non pas celle que John Liu avait imaginé. Il manquait trop de choses pour comprendre ce que John avait exactement en tête. Et surtout, beaucoup trop de choses étaient incomplètes. Il allait falloir faire avec ce qu’ils avaient sous la main. Le projet semblait fou, mais avec la magie du montage et du cinéma, tout est possible.
Il a donc fallu en écrire un qui correspondait aux images qu’ils allaient eux-même monter. Soit, tout le contraire de ce que l’on fait généralement pour faire un film. On commence par avoir un script, et ensuite on tourne les images. Là, on avait des images, et il fallait écrire un script, un scénario, des dialogues qui pouvaient correspondre à ce que l’on voyait à l’écran.
Alors, vous, je ne sais pas ce que vous avez fait pendant votre confinement. Personnellement, j’ai énormément joué à Animal Crossing. Et bien sachez qu’il y a une personne aux Etats-Unis qui a passé son confinement à se passer et repasser des rushs d’une qualité très médiocres d’un film non fini des années 80, à les couper, à les monter et à écrire un script et des dialogues qui pouvaient coller aux situations.
Et après deux ans de travail, nuit et jour, week-end compris à travailler sur ce support, le bousin commençait à prendre tournure. Y avait un truc qui ressemblait à une intrigue. Des dialogues. Un runtime qui semble pas dégueu pour ce genre de film. Mais ce n’était que le début de l’aventure. Parce que là, ce n’était que la première étage. Le film était encore muet. Il allait falloir habiller tout ça.
Et qui pour faire les voix ? Retrouver le cast d’origine ? Avec 30 ans d’écart ? Prendre de nouveaux comédiens experts en doublage ?
Michael Berryman va doubler le Plutonium Killer. Aussi bien l’acteur d’origine que sa voix s’en donneront à cœur-joie pendant le métrageSurtout que le projet est très particulier. Le support d’origine est et reste un film à petit budget des années 80, avec tous les défauts que cela comporte. À savoir des acteurs tantôt over-the-top ou tantôt trop inexpressifs, et cela devait se ressentir dans la voix des comédiens.
Tout l’enjeu était de prendre des acteurs qui n’allaient mettre trop de sérieux dans leur jeu pour respecter le ton d’origine, sans que cela tombe dans la dérision ou le ridicule. Pour Vinegar Syndrome, le choix a été vite fait de sortir un film qui respecterait au maximum le matériau d’origine et de ne pas faire une parodie. John Liu n’était pas le meilleur des acteurs pour exprimer des sentiments. Cela se ressent dans ses expressions faciales et dans ses intonations. Et donc, tout cela, le comédien choisi pour faire le doublage devait faire ressentir cela.
Et cela allait devoir être le cas pour l’intégralité du casting. Que ce soit pour les sidekicks, les personnages féminins, les loubards qui allaient prendre des coups de tatane, le grand méchant, les sbires du méchant, etc.
Tous les comédiens de doublage allaient devoir coller à cette ambiance particulière.
Et qui de mieux pour ce projet que des acteurs et actrices ayant connu cette période et ce genre de films ?
Le choix a été fait de confier le doublage à des acteurs et actrices de série B. Beaucoup d’entre eux ayant officié dans les années 80. Don Wilson, Linnea Quigley, Cynthia Rothrock, Michael Berryman,… si vous connaissez cette époque ou si vous traînez souvent sur Nanarland, vous les connaissez sûrement déjà. Du héros au simple punk qui n’apparait que 2 secondes, les voix sont des voix connues du monde du cinéma de genre et de la série B. Certains ont même repris du service après des années de retraite tant le projet les bottait.
Si le procédé semble faire très fan service et peur, le résultat final est assez époustouflant.
Oui, on se rend compte par-ci par-là que les intonations sont exagérées. Mais si le doubleur en fait trop, c’est souvent parce que l’acteur dans les images en fait trop. Il y a bien une ou deux situation exagérée. Mais cela reste charmant et ça apporte plus un cachet au film que cela ne lui nuit. On dit que les États-Unis n’ont pas une culture du doublage ? La bande de seconds couteaux réunis ici, ces Expendables du doublage, semble prouver le contraire.
De même pour la musique, elle a été confiée au groupe Voyag3r avec pour consigne : « vous faites une BO d’un film des années 80 ». Ce qui est différent d’un : « vous faites une BO pour un film où on va rendre hommage aux années 80 ».
Elle marche parfaitement. Elle n’est pas trop actuelle ni trop sophistiquée. Elle colle super bien à l’ambiance et chaque musique colle bien aux personnages et à l’ambiance.
Ce « New York Ninja » est le « New York Ninja » de Vinegar Syndrome. C’est indéniable. Et non pas le « New York Ninja » de John Liu. Cependant, la version de Vinegar Syndrome reste un film des années 1980 sortis en 2021… et non pas un film de 2021. Si quelqu’un qui n’est absolument pas au courant du projet tombe sur ce film, il se dira sûrement « Punaise, je viens de voir un film des années 80 complètement dingue que je ne connaissais pas et dont je n’avais jamais entendu parler ». Et peut-être qu’il ne se doutera aucunement que le film a connu un énorme traitement en 2021. Bon, sur la restauration des images, quand même, il le devinera. Mais je ne serais pas surpris qu’on pense que ce film soit un film intégralement fait dans les années 80, puis restaurer récemment.
Du générique à la bande-son, en passant par les dialogues, tout respire le cinéma de genre des années 80 et ses excèsMais la question maintenant est de savoir si ce « New York Ninja » est un nanar ?
La moustache est naturelleLa question n’est pas si évidente. Mais il semble que l’on puisse supposer une chose.
Si « New York Ninja » était sorti en 1984, sous l’impulsion de John Liu et de la 21st Century, ça aurait été un nanar. Ou du moins, il y a de grandes chances qu’il en soit devenu un.
Il y a trop de choses dans les images que l’on peut voir qui nous fasse penser le contraire. Les expressions faciales et les réactions de John Liu sont risibles. Les costumes des loubards des rues de New York sont hyper caricaturaux. La perruque blonde de la sidekick principale est flagrante. Y a des scènes d’action déjantées dont un Ninja qui punit le crime en roller. Le grand méchant du film est sorti d’un grand esprit dérangé.
Même avec la meilleure relecture du monde, un « Samuraï Cop » continuerait à nous faire rire à bien des occasions. Il en va de même pour « New York Ninja ». Et ce n’était d’ailleurs pas l’intention de l’équipe de 2021 de cacher les choses risibles et cheesy. Ca fait partie intégrante du métrage et de ces films. Ils le savent. Ils voulaient les conserver.
On peut toujours compter sur John Liu pour être over-the-top dans ses interprétationsLE ROUGE ! ! !Les punks des rues de New York sont tous plus risibles les uns que les autres. Ils sont souvent grimés de masque. Mention spéciale à celui qui passe son temps à se promener dans les rues en tenue de Kendo. Mais si ces acteurs portent des masques ou des choses qui cachent leur visage, c’est surtout pour cacher la misère et le fait que ce sont les mêmes figurants que le Ninja bat en boucle dans le film.
John Liu a forcé l’actrice Adrienne Meltzer a porté une perruque dans le film, parce que, d’après lui : « les Européens adorent les blondes ».
Notons également que le Ninja de New York passe une bonne partie du film à secourir des gens qui se font agresser dans la rue. Je dis des gens ?
Non ! En fait, John Liu sauvera encore et encore cette même actrice des griffes des loubards des rues. La pauvre se fait agresser tous les jours.
Encore une fois, sans doute leur était-il impossible de caster d’autres actrices pour se faire kidnapper ou agresser. Alors on fait en sorte que la même se fait kidnapper 4 fois, et on la sauve tout autant de fois.
Et essaie pas de noyer le poisson, John, je te vois.Et puis il y a le méchant, le Plutonium Killer.
À noter que parmi les personnages, mis à part John (parce que John Liu s’appelle toujours John dans ses films internationaux), c’est l’un des seuls dont on sait le nom, car son sobriquet apparaît dans un journal.
Vu que la bande-son était muette, impossible d’être sûr du nom de tous les autres. Si bien que Vinegar Syndrome va continuer sur cette lancée et donner des noms originaux aux autres. Rat Tail, Freddy Cufflinks, Switchblade. Des surnoms qui sentent bons les années 80.
Mais… revenons au Plutonium Killer…
Je l’ai sans doute déjà trop dit. Mais je rappelle que Vinegar Syndrome ne bénéficiait pas du son. Et là, dans leurs rushs… ils se rendent compte qu’il y a un personnage qui hypnotise des femmes pour les tuer, qui craint la lumière mais pas toujours, qui est capable de faire saigner les photos, qui empoissonne les gens avec un stylo-sarbacane, qui peut changer de visage, qui semble décrépir de temps à autre, et j’en passe…
Mais que Diable est passé par la tête de John Liu pour pondre un tel personnage. Qui est-il ? Quel est son projet ? Pourquoi a-t-il ces facultés et ces problèmes ? Tout cela, c’est impossible de réellement le savoir. Seul le créateur de ce personnage aurait pu répondre à ces questions, et encore...
Et pourtant… pourtant. Si ce personnage est sans aucun doute affreusement nanar dans le métrage d’origine, il sera ici de loin celui qui va crever l’écran et piquer la vedette à John Liu. Absolument rien n’a de sens avec ce personnage… mais la magie du cinéma en fait un personnage qui pourrait devenir culte si « New York Ninja » le devient.
C’est en cela qu’il est difficile de déterminer si la version de 2021 est nanar ou non. Parce que le Plutonium Killer reste ridicule. Mais son traitement le rend immensément sympathique et même intriguant. J’envisage d’écrire une fanfic sur son passé une fois que j’aurais terminé cette chronique.
Et il y a la séquence en roller. Elle est très symptomatique des choix qu’a pu faire Vinegar Syndrome dans le film.
Dans les rushs d’origine, il y a un faux raccord flagrant.
Le ninja fuit en roller une horde de loubards des ruesUne voiture lui coupe la route, il saute par dessus. Les rollers ont disparuPOUF ! Ils réapparaissent à l’atterrissageLe monteur a fait le choix de laisser ce faux raccord. Parce que, pour lui, ça fait partie des choses fun que l’on peut trouver dans ce genre de film. Oui, c’est une erreur flagrante. Il aurait pu la faire disparaître. Mais ce n’était pas le but du projet.
Dans le film de 1984, le faux raccord aurait été une erreur. Dans la version de 2021, le laisser est pour moi un bon choix.
Par contre, pour d’autres scènes. Le choix inverse a été fait. C’est notamment le cas des scènes de baston.
On l’a dit, John Liu est un artiste martial accompli. Il sait faire de belles bastons… si en face il y a du répondant.
Dans « New York Ninja », les ennemis de John Liu ne sont pas des artistes martiaux, et cela se ressent. Les combats sont plus que téléphonés. Pire encore, certains sont maladroits. Le monteur, dans les bonus, nous raconte une scène où un assaillant se prend une branche d’arbre et trébuche en pleine scène d’action. Il a trouvé cela trop ridicule et a préféré l’enlever.
Pour le film, il a voulu que les scènes d’action soient de belles scènes d’action. Et qu’elle ne soit pas risible. La magie du montage nous donnera des combats très nerveux (et expédiés très vite) pour masquer la pauvreté et l’amateurisme du film sur ce point. Ce qui fait que si les combats du métrage sont plus qu’acceptables et à l’allure maîtrisée, la plupart manque d’âme et se résumé à un coup de tatane de John Liu dans la tronche pour y mettre fin.
Fallait-il laisser les maladresses et les barres de fer en fait en caoutchouc et qui se plie sous nos yeux dans le film ? L’équipe a jugé que non. Cela nuirait trop au film.
John va assurer le contingent martial du métrage. Le film manque cruellement de star power de ce côté làKudos tout de même à Rat Tail. Personnage mystérieux et silencieux, même avec une bande son, qui nous offrira un beau petit duel Rapière VS KatanaLe film n’est par contre pas avare en cascadeIci, un simple bout de carton a été placé au sol pour que le dos de John ne prenne pas trop trop cher après avoir été traîné sur plusieurs mètresUn passage que n’aurait pas renié notre Bébel nationalCes exemples montrent bien les difficultés et les choix que Vinegar Syndrome ont du faire sur le film. C’est un film des années 80 avec ses défauts, et il faut donc en laisser, mais il ne faut pas tout laisser. Il a fallu se mettre dans le mindset d’un producteur/monteur/réalisateur de film de genre des années 80. Qu’est-ce que John Liu aurait gardé ? Qu’est-ce qu’il aurait jeté ?
C’est pour ces différentes raisons que je ne considère pas « New York Ninja » comme un nanar. Ça a l’odeur du nanar, la couleur du nanar et le goût du nanar, mais ce n’est pas un nanar.
Tout le travail sur le doublage, sur le montage, sur le script pour faire une intrigue qui tienne la route avec les scènes non terminées à disposition et l’amour mis dans le projet par ces passionnés sauve, pour moi, le métrage. Et même si on a laissé des erreurs dans le résultat final, ce sont pour moi de bons choix. Parce que c’est exactement ce dont je m’attend (et ce que j’ai envie) de voir quand je regarde un film d’action petit budget des années 80.
De l’aveu du monteur/dialoguiste, ce personnage n’apparaissait que trop peu souvent dans les rushs pour connaître sa réelle implication dans le métrage d’origine.Il va alors prétexter une histoire d’enquêtes internationales. Parce que vous savez… Interpol et film de ninja… ça fait généralement bon ménageEspérons que cela ne nuise pas à sa cote de filleJe ne peux pas dire que le monde entier va apprécier le film et crier au génie. Peut-être que certains ou certaines n’adhéreront pas à la démarche. Ce n’est certainement pas un film qui sera fait pour tout le monde.
Mais personnellement, tout ce qui englobe le projet et tout l’amour qui a été mis a fait que j’ai avalé tout le contenu du double blu-ray en un week-end… et que comme je n’en avais pas assez, j’en ai écrit une chronique.
Et de toutes façons, le Ninja de New York a déjà des alliés de tailleNote : Pas de note
Cote de rareté :Ce projet bien particulier est en vente sur le site de Vinegar Syndrome :
https://vinegarsyndrome.com/products/new-york-ninjaIl en reste encore en stock mais je doute que le stock soit illimité. Peut-être deviendra-t-il rarement dans un futur proche.