JOHN PHILLIP LAW
Même les nanars ont besoin de héros! Et qui mieux que John Phillip Law sut porter sur ses marmoréennes épaules les films les plus souffreteux ? Grand (1 mètre 96), blond, les yeux bleu azur, voilà un acteur qui resplendit à l’image comme une statue grecque, quelle que soit la stupidité du rôle qu’il joue. Qu’il soit défenseur de la veuve et de l’orphelin, anti-héros détrousseur de riches, fourbe capitaine de vaisseau galactique, pistolero sans peur ni reproche, chasseur d’hommes sadique ou ange extraterrestre, l’éternel interprète de «Danger Diabolik » est la classe incarnée, resplendissant comme une gravure de mode !
John Phillip Law (*) est né le 7 septembre 1937, à Hollywood ; lieu de naissance fort classieux pour un futur comédien ! Sa mère, actrice de théâtre et de cinéma, tente d’intéresser ses fils à sa profession, mais en vain. Pour John Phillip, qui tient en rechignant des petits rôles à l’instigation de sa mère, acteur ne semble pas être un «vrai métier ». Sa grande taille (1 mètre 70 à l’âge de 14 ans) lui permet pourtant de jouer dès son adolescence des rôles d’adultes. Mais en attendant, il se voit plutôt caméraman. La vocation de comédien ne viendra qu’à l’occasion de ses études, à l’Université d’Hawaïï : prenant des cours de théâtre pour lutter contre sa timidité, il se découvre passionné par les planches.
Notre ami décroche ensuite son premier rôle conséquent dans un film italien tourné aux Etats-Unis : «Smog », de Franco Rossi. Ce même réalisateur l’embauche ensuite sur ses films suivants, ce qui vaudra à John Phillip une relation privilégiée avec le cinéma italien, source de nombreux rôles mais également, hélas, du futur déclin de sa carrière vers le bis. «J’ai toujours considéré l’Italie comme la terre de mes véritables débuts au cinéma et j’aime beaucoup y retourner pour faire des films » (Interview dans Mad Movies n°157-158)
John Phillip prend l’apprentissage de son métier au sérieux : il suit les cours de l’Actor’s studio à New York et joue ensuite dans des pièces à Broadway. Il décroche en 1966 un rôle dans «Les Russes arrivent », de Norman Jewison, qui lui vaut de se faire connaître aux Etats-Unis. Il obtient l’année suivante l’un des rôles principaux de «Que vienne la nuit », mélodrame anti-raciste réalisé par le grand Otto Preminger, avec Michael Caine, Jane Fonda et Faye Dunaway. Mais ce film de prestige, qui aurait pu signer la mise sur orbite de sa carrière, va être un échec critique et public, sa réalisation « à l’ancienne » et son traitement caricatural des problèmes sociaux ne convainquant pas les spectateurs.
En 1968, John Phillip Law se concentre sur l’Italie, tournant coup sur coup trois films qui vont marquer le public à des degrés divers. Il tient le rôle principal du western spaghetti «La Mort était au rendez-vous », aux côtés de Lee Van Cleef. Jane Fonda, sa partenaire dans «Quand vient la nuit », le recommande ensuite pour le rôle de l’ange aveugle extraterrestre dans le space-opéra kitsch «Barbarella », que réalise Roger Vadim pour Dino De Laurentiis.
Le physique sculptural et les ailes dans le dos de John Phillip Law le rendent aussitôt célèbre. Il enchaîne immédiatement après avec «Danger Diabolik », tourné pour le compte de De Laurentiis par Mario Bava. Dans cette délirante adaptation d’un BD culte, John Phillip Law, d’un hiératisme hallucinant, interprète un super-voleur, sorte de croisement entre Fantômas et James Bond, qui accomplit méfait sur méfait dans une débauche de kitsch psychédélique typiquement sixties.
Devenu quasiment une icône pop, John Phillip Law va hélas rater la même année une nouvelle occasion de s’imposer comme acteur «sérieux » aux Etats-Unis : «Le Sergent », drame sur l’homosexualité où il donne la réplique à Rod Steiger, est un échec. Dans les années suivantes, John Phillip Law continue sur sa lancée, s’imposant comme acteur principal de nombre de films américains et européens, circonscrits cependant au cinéma bis et/ou aux petits et moyens budgets : il est le «Baron Rouge » de Roger Corman, «Michel Strogoff », dans une production italienne, «Docteur Justice », dans un film français de Christian-Jacque inspiré de la célèbre BD de "Pif Gadget".
«Le Voyage fantastique de Sinbad », où il donne la réplique à la belle Caroline Munro, lui donne l’occasion de tenir un rôle de héros populaire. Dans le trop méconnu «La Chasse sanglante », co-production hispano-américaine, il montre de réelles qualités de comédien : Peter Fonda, Richard Lynch et lui y interprètent un trio d’anciens du Vietnam amateurs de chasse à l’homme. Ce thriller angoissant sera totalement interdit en France.
Mais John Phillip Law, ne trouvant pas de rôles ni de films suffisamment marquants, peine à s’imposer comme un acteur sérieux. A la fin des années 70, sa carrière est sur le déclin : on le voit dans nombre de projets hasardeux comme «Tarzan l’homme-singe » de John Derek (il y joue un explorateur), où la vedette est en fait prise par Jane, que joue Bo Derek, l’épouse du réalisateur. Dans les années 80, ses rôles s’espacent et se font de plus en plus médiocres : on le voit dans des navets et nanars poussiéreux comme «La Forêt explosive » et l’impensable «Night train to terror : Train express pour l’enfer », délirant mélange de trois films d’horreur minables, mixés n'importe comment au montage pour en faire un film à sketches. (Godfrey Ho et ses 2 en 1 sont battus à plate couture!)
La série noire continue ensuite pour John Phillip Law : «Space Mutiny » avec Reb Brown, «Thunder III » avec Mark Gregory, « Blood delirium » avec Gordon Mitchell et autres «Alienator », c’est la panade artistique la plus complète. On le voit même dans une saison des «Feux de l’amour » !
Nullement dégoûté de son métier, John Phillip Law continue son bonhomme de chemin et connaîtra, après une période d’oubli, une certaine réhabilitation en tant qu’acteur-culte avec la redécouverte de «Barbarella » et «Danger Diabolik ». En 2001, il tient un second rôle dans «CQ », hommage au cinéma kitsch des sixties, où sa présence a valeur de symbole.
Ayant superbement vieilli, John Phillip Law aborde les années 2000 en passant du statut peu enviable de has-been carbonisé à celui d’acteur symbole d’une époque heureuse du cinéma. A défaut d’avoir crevé le plafond du vedettariat ou interprété de grands rôles shakespeariens, John Phillip Law aura su laisser le souvenir d’un acteur classieux et séduisant, dont la hiératique froideur lui aura permis d’incarner quelques-uns des héros -et des méchants- les plus mémorables du cinéma bis ! Nanars ou pas, il y a des destins moins enviables !
Nikita.
*: A noter que de nombreux génériques orthographient son nom avec un seul L à "Phillip".
Filmographie :
1950 :
The Magnificent Yankee
1951 :
Show boat
1962 :
Smog
1964 :
Tre notti d’amore
Haute infidélité (Alta infedeltà)
1966 :
Les Russes arrivent (The Russians are coming, the Russians are coming)
1967 :
Que vienne la nuit (Hurry sundown)
L’Harem (The Harem)
1968 :
Danger Diabolik (Diabolik)
La Mort était au rendez-vous (Da Uomo a uomo)
Barbarella
Skidoo
Le Sergent (The Sergeant)
1969 :
Certo, certissimo, anzi probabile
1970 :
Le Maître des îles (The Hawaiians)
Michel Strogoff
1971 :
Le Baron rouge (The Red Baron / Von Richtofen and Brown)
The Love Machine
The Last Movie
1973 :
Poussière d’étoiles (Polvere di stelle)
1974 :
Le Voyage fantastique de Sinbad (The Golden voyage of Sinbad)
La Chasse sanglante (Open Season / Los Cazadores)
1975 :
Your God, my hell
La Nuit de la peur (The Spiral staircase)
Docteur Justice / Halte à l'organisation
1976 :
Target of an assassin
Un sussuro nel buio
Le Pont de Cassandra (The Cassandra crossing)
1977 :
Voyeur pervers (L’Occhio dietro la parete)
1978 :
Der Schimmelreiter
Tod im November
1979 :
Les Vierges damnées (Un’ombra nell’ombra)
The Best place to be
1981 :
Tarzan l’homme-singe (Tarzan the Ape-man)
1982 :
Attaque force Z (Attack force Z)
Scream your head off / The Case of Harry Billings
Marylin : alive and behind bars
(NB : remontage du film précédent avec de nouvelles scènes)
1983 :
Tin Man
1984 :
La Forêt explosive (No time to die)
1985 :
Rémission pour un voyou (L.A. Bad)
American commandos
Night train to terror : Train express pour l’enfer (Night train to terror)
(NB : utilise les scènes de "Scream your head off")
1987 :
Striker
Moon in Scorpio
Una grande storia d’amore
Johann Strauss le roi sans couronne (Johann Strauss der König ohne Krone)
1988 :
Thunder III
Space mutiny
Blood delirium
Colpo di stato
American Heroes 1 (A Case of honor)
1989 :
Quattro piccole donne
Gorilla
Cold heat
Alienator
1990 :
Nerds of feather
Little women of today
1991 :
Alaska stories
1992 :
Shining blood
Marylin alive and behind bars
Europa mission
Day of the pig
1993 :
Angel eyes
Alaska kid
1995 :
Burning heart
1996 :
Hindsight
1997 :
Ghost dog
1999 :
Vic
Wanted
2000 :
Citizens of perpetual indulgence
2001 :
CQ
2003 :
Curse of the forty-niner
2004 :
I Tre volti del terrore
Ainsi que divers rôles dans des séries télé.