Titre alternatif : Roughnecks
Réalisateur : John A. Gallagher
Année : 1990
Avec : Steve James, Reb Brown, Frank Vincent, Tom Wright
Catégorie : Sécuritaire
Genre : Le grand blond contre le vengeur noir
Durée :1H30
Pays : USA
Nous sommes en 1990 et la carrière cinématographique de Steve James patine un peu. Icône de la Cannon dans les années 80, il n’arrive pas vraiment à sortir de son rôle du bon sidekick noir, accessoirement faire valoir de Michael Dudikoff dans la grande saga d’
American Ninja. (Pour de plus amples informations, consultez l’excellente biographie de cette grande figure par notre spécialiste ès ninja, Kobal). Il est pourtant en excellente forme physique, pratique les arts martiaux et plein de bonne volonté. A priori, il a du bon potentiel pour passer au premier plan. Sans doute inspiré par le rôle de Shaft, symbole de la blaxploitation 70’s, il collabore avec John Gallagher à l’écriture d’un film où il tiendrait un bon premier rôle. Pour lui tenir tête, il contacte Reb Brown, grande figure de Nanarland s’étant entre autre compromis dans
Yor,
Space Mutiny,
Robowar pour n'en citer que quelques uns. Le choc entre ces deux stars de Nanarland s’annonçait explosif…dans un certain sens oui.
"
Un film avec Steve James ? Mais comment donc ! J'arrive !"
Logan Blade (Steve James) est un ancien flic. Suite à un procès qui a mal tourné, il a abandonné l’uniforme pour ne plus avoir les mains liées par la procédure dégueulasse qui fait rien qu’à relâcher les coupables. Maintenant il peut hanter les rues de New York dans son ensemble vert au volant de son van (banal au premier abord mais…). Son seul copain, son doberman Munch. Depuis longtemps il essaye de coffrer Angel (John Leguizamo) le leader pitoyable d’un non moins pitoyable gang, les Diablos. Mais voilà que le petit chef fait appel aux services d’un pro de la guerre, un mec qui forme les gars à la dure, un qui en a dans le pantalon, un chien fou de l’armée injustement radié : Le colonel Walsh (inamovible Reb Brown). L’affrontement sera rude !

On se sent tout de suite petit face à ça.
Les festivités démarrent dans un cimetière où Angel et ses lascars planquent de la « dope ». Après avoir pris leur marchandise sous une pierre tombale en mousse étrangement légère, un accrochage survient avec un autre petit loubard qu’on apprendra être le rejeton d’un parrain local. Une fusillade éclate et les hommes tombent sous le regard placide de Steve James qui apparemment est un justicier mais seulement avec une certaine catégorie de gens. En clair, si t’es dans le mauvais camp, faudra pas compter sur lui. Evidemment dès les premières séquences, on se rend compte du budget anémique avec lequel Steve a dû se débattre. L’essentiel de l’action se déroulera dans des lieux publics ou abandonnés, tel un grand hangar, une église n’étant plus de la première fraîcheur, une petite salle transformée en restaurant italien…
Le scénario comme assez souvent tient assez facilement sur un Post-It. Encore que…Une des plus grosses surprises vient en effet du script qui réussit à devenir effroyablement compliqué et inexplicable alors qu’il partait tout simple : Un caïd local fait appel à un pro de la guérilla pour enlever le marché du mafioso déjà en place. Eh ben en fait non on va apprendre par la suite que les Diablos sont en fait manipulés par des Colombiens, après on nous dira qu’ils en font pleinement partie, les hommes de mains d’Angel se déclameront des « Romano » ( ??), Romano étant le nom du parrain... Un scénario Pierre Tremblay approved en quelque sorte.
L'inégalable resto italien, repaire ancestral de la pieuvre ritale.
Outre les bizarreries scénaristiques, on aura droit bien sûr à tout pleins de clichés : Logan est le parfait prototype du flic intègre mais lâché par ses supérieurs, sa nana chante (mal) dans un cabaret, toutes les gonzesses sont folles de lui, il fait la morale aux jeunes délinquants et tatane les moins réceptifs au passage. On aura droit bien sûr au coup du flic pourri-qu’on-croyait-pourtant-loyal, le jeune voyou qui cherche à se faire un nom, des mafieux italiens qui se planquent comme tous les ritals dans un restaurant italien (avec la traditionnelle nappe à carreaux rouge et blanche) dans lesquels on passe de la musique…italienne et des phrases chocs ici et là assénant quelques coups de rhétorique au spectateur qui aurait commencé à perdre le fil de l’action.
Parce que les dialogues, ils valent quand même leur pesant de pralines. On pourra savourer des bonnes piques telles que «
Tu pues l’huile d’olive à cent mètres, sale rital de mes deux. » balancée par un Angel furibond au fiston du Corleone local. Le fait est que certaines réparties frise le racisme ordinaire tel cet officier de police qui balance à un collègue noir qui vient de lui faire une blague :
« C’est de l’humour noir ? ». Il faut se rendre à l’évidence, les noirs ont un sens de l’humour beaucoup plus développé que nous. Ou tout du moins un sens de la répartie assez exceptionnel. Prenez Steve James, alors qu’Angel lui demande d’empêcher son doberman (au demeurant bien dressé) de le mordre :
« Haha….Munch ne mord pas les gens….il les bouffe ! »
Le pompon revient quand même à un pauvre gars débarqué d’une quelconque ANPE à qui ont fait dire « Sale con de blanc » à l’encontre d’un officier. Précisons que le type en question est blanc aussi…Ce type là est sans conteste mon préféré. Il contacte Logan par téléphone (comment il a eu le numéro de son van ?) et lui donne rendez vous dans un vieux cinoche. S’ensuit une bagarre nawak où ce grand couillon essaie tant bien que mal de camoufler son amateurisme foudroyant. Il n’apparaît qu’une dizaine de minutes dans le film et pourtant c’est un bonheur vu sa tête et ce qu’on lui fait jouer. On le relâchera faute de charges contre lui (l’entrée par effraction et la tentative de meurtre ne sont visiblement pas répréhensibles dans l’état de New York, c’est bon à savoir).

Ze number one guy
Penchons nous donc sur le casting. En ce qui concerne Steve James, on le sent donner son maximum pour s’impliquer dans l’affaire. Il rosse les infâmes, conduit à vive allure – enfin pas trop non plus, c’est un van – bref prend son rôle très au sérieux. Mais voilà c’était sans compter Reb. Eh oui, faudrait pas oublier qu’il y a le grand blond dans cette histoire aussi ! Autant Steve est relativement crédible autant Reb Brown est une vraie catastrophe. Faut le voir ce grand chef de guerre, ce meneur d’hommes, déblatérer des philosophies de comptoir sur Napoléon, César, Bénédict Arnold, Benjamin Franklin et dessouder ses subordonnés pour une raison X ou Y avec un sérieux imperturbable. Faut le voir vider des chargeurs en toutes occasions sur des figurants qui ne lui ont rien fait avec sa tête benoîte.
Au passage signalons que jamais l’expression « balle à blanc » n’eut tant de signification. La clique à beau tirer à douze à trois mètres d’un fourgon, aucun impact de balles. Un mec tire à même pas un mètre au travers d’un rideau de douche, le rideau est montré intact en quasi gros plan juste après…Le reste du casting est à l’avenant. Outre Angel qui a plus la tronche d’un VRP de boîte provinciale que celle d’un chef de gang – et qui est en plus nanti d’une bague franchement ridicule - et ma tête de winner préférée, nous avons des sbires moustachus en pagaille, arborant fièrement le look blouson noir et bandana, un parrain tout droit sorti de
Police Academy plus d’autres intermittents du spectacle venus boucher les trous.
Les sbires cachetonnent...
autant que les étudiantes...
...et le parrain parraine.
Bien sûr il y a des longueurs, des passages où on s’ennuie gentiment dans l’attente d’un moment où on pourra relever le nez en se disant « Tiens il se passe quoi là ? ». Mais il y a aussi des séquences fantastiques notamment celle où deux sbires discutent sur leur avenir et ce qu’il compte faire de leur fortune malhonnêtement gagnée. Regardez, ça se passe de commentaires. Au moment où on s’y attend le moins, Steve nous sort des gadgets high-tech sortis on ne sait d’où mais qui provoque à chaque fois un éclat de rire tant le résultat se voulait spectaculaire. Notamment le passage où il se sert d’une sorte de lance-pieu en plastoc qu’il camouflait adroitement dans sa manche, ou encore le moment où il nous dévoile les secrets de son van en mettant un coup de turbo pour avoir l’air d’aller plus vite (en fait quelques flammèches rejetées par le pot d’échappement).

Van 2000, une exclusivité des garages Steve James.
La grande scène sera bien entendu l’affrontement final entre Steve et Reb. Et c’est véritablement là que l’on affiche un air navré. Steve est balèze aux arts martiaux, ça je crois que ce n’est plus un secret pour personne. Mais Reb se ridiculise littéralement en alignant des petites manchettes et en levant la jambe à peine au niveau de la cuisse de son adversaire. Ce dernier est toujours obligé de garder un tant soit peu la tête baissée pour qu’il puisse lui aligner des kicks dans la face. Effarant de voir un « colonel » tueur d’hommes être d’un niveau clairement au dessous de tous ces figurants incarnant ses subordonnés.
Steve James s’est véritablement impliqué dans ce film, on sent bien qu’il lui tenait à cœur. Il a quand même co-écrit le scénar avec le réalisateur afin d’avoir son grand film à lui. Malgré tout ce n’est pas encore ça. Il a dû faire jouer ses relations pour pouvoir maintenir son film sur les écrans et dans un sens ça se comprend. On trouve parfois le temps un peu long mais pour peu qu’on soit attaché à ce sympathique personnage de la blaxploitation et à ce grand dadais ineffable de Reb Brown, on gardera un bon petit souvenir de ce film.
So long Steve.
Note : 1.25/5
Vidéo :
Belle-île en Suisse, racailles galantes : où comment deux sbires taillant une bavette discutent de leurs projets d'avenir. A ne pas en croire ses oreilles !
http://dl.free.fr/mo7ASHj1J
Rareté :
5 Pièce de collection
Il semblerait qu’il n’y ait pas de galettes à l’horizon pour ce film. Il faudra vous rabattre sur les VHS de chez Partner & Partner ( ???) ou de chez Fil à Film, au visuel similaire. Ah et ne faites pas trop attention au résumé fumeux derrière.
