LE GUERRIER D’ACIER
SOLO
Norberto Barba
La carrière de Mario Van Peebles est résolument tournée vers le gros nanar malgré quelques détours plutôt sympathiques (
New Jack City,
Full Eclipse). Et après
Exterminator 2,
Les Dents de la Mer 4,
Deux Doigts sur la Gâchette et
Highlander III, ce n’est pas ce
Guerrier d’Acier qui va faire une différence. Adaptation du roman
Weapon de Robert Mason dont seul le concept général aura été retenu, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une simple série B d’action bête et bourrine.
L’histoire nous présente Solo, guerrier androïde conçu par l’armée américaine. Solo est une bête de guerre, une arme destructrice qui pourra amplement remplacer le soldat normal sur un champ de bataille : il est 15 fois plus fort et 10 fois plus rapide que n’importe quel homme, il possède une structure polymère qui l’immunise contre les petites armes à feu, des senseurs infrarouges, une vision nocturne, peut reproduire des voix, et s’il est détruit, un autre sera construit à sa place. Il n’y a qu’un problème : son concepteur l’a doté d’une conscience humaine, ce qui perturbe grandement sa première mission. Car après avoir fait des papouilles à une araignée en pleine jungle, il refusera de faire sauter les charges explosifs mise en place pour détruire une construction des rebelles latino-américain : d’innocents villageois sont exploités par ses derniers et Solo refuse de les laisser périr. Le Colonel Madden fera quand même exploser l’objectif, endommageant alors l’androïde. Le général responsable du projet décide d’envoyer Solo en révision et de lui effacer la mémoire, mais ce dernier capte la conversation et, suivant sa directive prioritaire (à savoir préserver son existence) il s’enfuit. Pour Madden, chargé de le récupérer, voilà une bonne occasion pour détruire l’androïde déjà affaiblit. Solo de son côté sera recueilli par les villageois et les aidera à lutter contre les rebelles…
Classique ? Déjà-vu ? Ce résumé n’est rien en comparaison de ce que l’on verra tout le long du film. A la manière d’
Universal Soldier, Solo s’humanise et doit faire face à sa Némésis qui elle pète de plus en plus les plombs (huhu), et devra se battre contre un autre super-soldat semblable à lui. Mais cela renvoie bien entendu à de plus célèbres films sur le sujet. Le principe même du film est évidemment reprit à
Terminator et
RoboCop et de nombreux détails renvoie à ces deux films : quand Solo affronte un autre modèle d’androïde, impossible de ne pas se souvenir du combat entre RoboCop et son modèle supérieur dans
RoboCop 2 de même que les empoignades entre le T-800 et le T-1000 dans
Terminator 2. L’humanisation de Solo et sa découverte progressive de la nature humaine renvoie autant à celle de
Terminator 2 qu’à la recherche d’identité de Alex Murphy dans
RoboCop… Et pour continuer dans la lancée, on verra carrément Solo effacer de ses programmes sa directive prioritaire (sauver sa peau plutôt que d’aider les autres) pour devenir plus proches d’un être humain, exactement de la même manière que le fait Murphy dans
RoboCop !
Les films de cyborgs ne sont cependant pas les seuls emprunts.
Le Guerrier d’Acier parle de jungle, de traque et de combats brutaux, alors pourquoi ne pas lorgner du côté de chez
Predator ? Quelques visions thermiques, un camp de rebelles en pleine jungle et un groupe de bidasses choisis spécialement par Madden pour traquer Solo qui arriveront au QG habillés en civiles. Une vieille mexicaine ira même assimiler l’androïde au Yacayo, l’esprit de la forêt, de la même manière que le Predator était perçu par les villageois comme un démon… Mais le thème de la bête de guerre dans la jungle ne fait-elle pas non plus penser au personnage de John Rambo, qui après un premier film réussi est devenu le cliché par excellence de ce type d’histoire ? Qu’à cela ne tienne, Solo déambulera avec sa musculature massive dans la jungle tel Sylvester Stallone dans
Rambo II, avec un couteau high-tech et même un foulard rouge sur la tête en guise de bandeau pour marquer le coup. Enfin, il aurait été trop simple d’éviter les clichés et d’offrir un brin d’originalité à l’histoire, et on reprend donc la vieille recette des gentils paysans persécutés qui trouveront en Solo un sauveur avant de le rejeter dès qu’un pépins leur tombe sur la tronche. Bien évidemment, notre robot américain réussira quand même à gagner la sympathie du pasteur, l’admiration d’un petit garçon et l’amour (oui enfin…) d’une jeune femme. En clair, Mario Van Peebles nous refait donc
Les Sept Samouraïs à lui tout seul.
A défaut d’une histoire originale,
Le Guerrier d’Acier contient t-il des éléments bien à lui ? Et bien on pourra parler de cette scène où, pour trouver un visage humain, notre robot craquera sur celui de Michael Jordan qu’il a vu à la télé (pourtant Van Peebles et Jordan ne sont pas très ressemblant mais bon…), ou encore lorsqu’il découvre le rire, s’entraînant alors avec une maladresse qui fera fuir les oiseaux. Apparemment content de son gag, le réalisateur n’hésitera pas à nous le servir une nouvelle fois lorsque, en fin de film, Solo ira rassurer ses amis qu’il est bien vivant en riant très fort dans la jungle, faisant à nouveau fuir les oiseaux… Sans parler de l’incohérence absolue : des robots qui grognent sous l’effort ou crient de douleur durant leur combat ! On pourra aussi signaler une amusante transition de langue lorsque Solo traduit l’espagnol en anglais pour comprendre les villageois. A partir de ce moment, plus d’espagnol sous-titré, tout le monde parlera anglais ! C’est quand même super pratique un androïde. Heureusement quelques bonnes idées subsistes, comme la brève rencontre entre Madden et son double, ou encore le fait que le général du projet Solo, la grosse enflure de l’histoire, s’en sortira impunie à la surprise général (dans l’espoir d’adapter
Solo, la suite de
Weapon ?).
Mais oublions ce fond pathétique digne d’une production Nu Image comme on en trouve à la pelle, et attardons nous sur la forme. Là c’est tout de suite un peu mieux et on sent que
Le Guerrier d’Acier possède plus de moyens que les productions de ce type. On le ressent dans le décors et aussi les scènes d’actions, bien plus dynamiques que dans le petites séries B direct-to-video. C’est d’ailleurs sûrement pour cette raison que
Le Guerrier d’Acier aura eu droit à une petite exploitation cinéma, où il se sera royalement planté par ailleurs. Evidemment on évite pas les effets spéciaux un peu raté, notamment lors de la « blessure » de Solo, qui sent bon le maquillage fait à la va-vite et qui n’hésite pas à disparaître entre deux plans par instant ! A côté de ça, il faudra surtout se raccrocher au casting, qui lui possède un atout majeur.
Cet atout ce n’est pas Mario Van Peebles, qui fait l’effort de ne pas cabotiner comme un malade et incarne sobrement un personnage qui est évidemment tout en retenu et pas très bavard, mais bel et bien William Sadler. Acteur énergique et impressionnant, capable de jouer aussi bien un héros sombre (l’excellent
Le Cavalier du Diable) qu’un taulard sympathique (le très beau
Les Evadés, alias
The Shawshank Redemption) ou plus souvent les ordures brutales (
58 Minutes pour Vivre) comme il le fait ici encore. Cette fois il s’en donne à cœur joie en incarnant un colonel timbré et revanchard qui fait craquer les os de son coups dès qu’il commence à disjoncter (huhu - bis). Possédant les plus belles répliques («
Il est pas mort tant que j’ai pas dis qu’il l’est. »), tuant sans sourciller et possédant évidemment son regard glacial et son visage sévère hautement charismatique, il se met le spectateur dans la poche en moins de deux malgré un rôle bien évidemment sur-caricatural de salaud. Et comble du comble, il revient par la suite en second androïde de combat, vêtu d’une tenue noir qui le rend éminemment sexy, en dernière partie de film. A l’aide d’un canon dévastateur, il termine son travail pour ensuite mettre la pâté à Solo. Pour faire simple, on avait pas vu aussi efficace depuis Robert Patrick dans
Terminator 2. A côté de lui, Van Peebles fait évidemment pâle figure et on regrette presque que Sadler n’ai pas incarné Solo à sa place. On pourra aussi signaler la présence de Adrian Brody, alors en début de carrière, dans le rôle du scientifique s’occupant de Solo. Un petit rôle où le comédien se révèle par ailleurs assez fade.
Le Guerrier d’Acier n’est rien d’autre qu’un direct-to-video comme il en existe à la pelle, un ersatz de film de cyborg qui mange un peu à tous les râteliers, à la manière des
Shadowchaser,
Cyborg Cop,
A.P.E.X. et autres
Digital Man. Une petite série B donc, mais avec un peu plus de moyens qu’à l’accoutumé, ce qui permet de soigner un peu plus visuellement la chose, et la présence d’un William Sadler lors d’une mauvaise passade (on le retrouvera l’année suivante dans le navrant
RocketMan) qui sauve la mise à chaque apparition malgré son rôle excessif. Et puis il y a évidemment le potentiel nanar plutôt élevé tant les repompages sont fait avec finesses et discrétions, permettant de mieux faire passer la pilule. Parfait pour se divertir une soirée en somme, mais il ne faudra pas chercher plus loin.
Le Guerrier d’Acier
Solo (USA / Mexique, 1996), réal : Norberto Barba, scén : David Corley (David L. Corley), d’après le roman de Robert Mason, mus : Christopher Franke, avec : Mario Van Peebles, William Sadler, Barry Corbin, Adrian Brody…
Genre : sous-
Terminator
Catégorie : SF
Note : 2/5
Côte de rareté : 1
Trouvable en dvd z2, vf / vo, sous-titres, bande annonce et making of promo...