J'ai découvert il y a peu la collection Westerns de légende dirigée par Patrick Brion et parrainée par Bertrand Tavernier. Le but avoué de la collection est de présenter dans des copies généralement restaurées des westerns de série B méconnus mais pas inintéressants. Généralement, ces films sont complétés d'une courte intro de Patrick Brion et d'une analyse plus substantielle (25 minutes) par Tavernier. On a parfois droit à des bonus en prime comme un portrait de Sterling Hayden par Yves Boisset (sur Les portes de l'enfer)...
Donc...

Tornade sur la ville
Un film de Jack Arnold qui, s'il n'a pas le charme et l'inventivité de L'homme qui rétrécit, Létrange créature du lac noir ou même Tarantula, est quand même bien mené et clairement tiré vers le haut par le savoir-faire de son réalisateur. Une histoire assez basique d'homme de loi pris dans un conflit entre deux clans et qui va tenter d'y mettre bon ordre tout en résolvant une affaire d'attaque de diligence. Typiquement le genre d'histoire qui sera repris en inversant les rapports de pouvoir de nuisance dans Pour une poignée de dollars. A part une morale un peu machiste, ça se laisse voir et c'est marrant de voir parfois en arrière plan des cascades à cheval qui ne se déroulent pas toujours comme prévu (genre le cheval qui pile juste devant un abreuvoir et dont le cavalier est sensé finir la tête dans l'eau mais dans son plongeon, il se prend la main dans les rênes donc se rétame contre la barrière avant que son cheval, surpris, tire la tête en arrière ce qui catapulte le malheureux cascadeur en arrière. Bénis soient le zoom et la touche image par image des lecteurs DVD)

Les portes de l'enfer
Pour avoir soigné un braqueur en fuite, un brave vétérinaire (Sterling Hayden) ancien soldat confédéré se retrouve dans une prison à ciel ouvert avec le désert pour seule barrière et des mercenaires indiens en guise de geoliers/pisteurs qui gagnent plus à ramener un évadé mort que vivant. Hayden et les seconds rôles sont excellents et les décors participent vraiment à l'ambiance générale. Malgré une résolution assez simpliste, ça se regarde même si avec quelques scènes en plus, ça aurait pu devenir un excellent film !

L'héritage de la colère
Un marshall fédéral à la légende solidement établie est chargé de retrouver les bénéficiaires testamentaires de l'héritage d'un porspecteur sauvagement abattu. Mais avant de mourir, le prospecteur a laissé entendre que le meurtrier fait partie desdits héritiers...
Une histoire sympa et dont chaque "sketch" dispense quelque chose d'apaisant. Bref, un film au titre français vraiment inadéquat et qui s'amuse pas mal avec les convention du genre, comme ce héros qu'on croirait sorti d'un serial avec ses fringues flashy, ce qui lui vaut une remarque sur l'impossibilité de passer inaperçu avec un accoutrement pareil, ce qui ne va pas l'aider dans son enquête.

La belle aventurière
Le film qui m'a fait tomber amoureux d'Yvonne de Carlo. Dans ce film, elle joue une jeune chanteuse arrivant dans un bled paumé où elle va susciter la convoitise de deux frères ennemis...
Une très agréable surprise, dans une structure en flash-back qu'il est abusif de comparer à Rashomon comme le fait la jaquette mais qui exploite bien cette idée (plus proche de Citizen Kane) du personnage dont la personnalité varie selon le point de vue de la personne qui raconte l'histoire. Ca permet à Yvonne de Carlo de s'éclater à jouer tour à tour une sainte nitouche, une manipulatrice et une soifarde. Et niveau action, on a droit à la fin du film à une sympathique bagarre à coup de poings entre les deux frères où ils réduisent en pièce le mobilier familial. Plaisant.

Le barrage de Burlington
Autre film intéressant avec Yvonne de Carlo qui y joue une patronne de Casino flottant amoureuse d'un bûcheron qu'elle va aider à monter les échellons hiérarchiques de son milieu professionnel. Le voyant tomber dans les bras de la fille de son chef, elle va alors s'employer à détruire ce qu'elle avait aidé à créer.
Très intéressant portrait de femme forte et rancunière, prenant pour cadre l'univers des bûcherons de l'ouest sauvage dans une reconstitution quasi documentaire. Quand on voit ces énormes troncs s'effondrer puis être balancés dans un torrent servant ainsi de radeaux naturels pour les valeureux bûcherons, on se croirait chez Raoul Walsh. Dommage que le final soit aussi expédié !

La corde est prête
Western psychologique centrée sur l'exécution d'un bandit que certains veulent lyncher et d'autre libérer. Beaucoup de personnages dont les rapports sont assez fins ce qui forme un microcosme cohérent. Mamie Van Doren est très jolie et, le temps d'un plan, un aperçoit rapidement Clint Eastwood dans un de ses tout premiers rôles. Dans ce plan, il est principalement de trois quart dos ce qui fait qu'on ne le reconnaît que quand il se retourne pour sortir du champ soit deux secondes tout au plus... Film sympa mais qui souffre d'un vrai manque de montée de tension. Jolie cascade finale où le bad guy chute d'un toit, rebondit sur une rambarde avant de s'écraser dans la poussière, en un seul plan...

Une femme sans loi
Une jeune et belle chanteuse débarque dans une ville pour retrouver les assassins de son père. l'un d'eux étant directeur du casino voisin, elle va ouvrir un établissement concurrent pour le pousser à une confrontation qui fera peut-être aussi sortir de l'ombre son ancien complice, dont la jeune fille, Frenchie, ne connaît ni le nom ni le visage.
Vraiment très très sympa. Les dialogues sont brillants, certaines scènes très drôles (un long combat de saloon entre deux femmes) et le casting excellent, surtout Shelley Winters dans le rôle de Frenchie et Joel McCrea dans celui du shérif. A découvrir !

Révolte au Mexique
La copie est foireuse et les couleurs particulièrement délavées mais le film ne manque pas d'intérêt avec cette histoire de chercheur d'or embarqué dans la lutte armée contre le pouvoir corrompu au Mexique. Le couple Van Heflin et Julie Adams fonctionne très bien. j'imagine que c'est ce genre de film qui a inspiré à la base Il était une fois la révolution.
Sinon ce film propose un super bonus, à savoir un documentaire daté de 1996 sur le tournage chaotique du projet le plus personnel et ambitieux de Budd Boetticher, réalisateur de Révolte au Mexique. Passionné de Corrida, il laissera tomber sa pourtant brillante carrière hollywoodienne pour réaliser un film mettant en vedette son ami, le torero Carlos Arruza. Mais les galères d'argent, les engueulades et les forts caractères des deux protagonistes vont malmener le projet qui mettra dix ans à se concrétiser. Et peu après le tournage et le montage d'une formidable séquence de corrida dans la plus grande arène du Mexique, Arruza meurt dans un accident de voiture.
Un doc super intéressant qui dresse un portrait passionnant d'un cinéaste hors norme, forte tête, alcoolique et gueulard, qui poursuit coûte que coûte son projet jusqu'à en faire une sorte d'
Amants du pont-neuf personnel. Ah oui, il a aussi vécu quelques années avec Debra Paget, l'enfoiré !