Gros déterrage de ce chouette topic auquel je souhaite apporter ma petite contribution.
Shangani Patrol (1970) de David Millin
Co-produit entre la Rhodésie et l'Afrique du Sud, ce film de propagande coloniale relate la bataille menée par 34 soldats de la Patrouille de la Shangani contre 3000 guerriers matabélés lors de la 1ère guerre ndébélé de 1893, un genre de Little Big Horn ou de Camerone glorifié pendant des décennies par l'état rhodésien. Un très bon film d'aventure, bien joué, bien réalisé, avec un thème musical épique et entraînant, et quelques beaux moments de tension dramatique (les Matabélés avançant en tambourinant sur leurs boucliers pour mettre à bout de nerfs les soldats britanniques). On pense beaucoup au "Zoulou" de Cy Enfield (la conclusion est similaire). Le propos ultranationaliste se limite surtout à la toute fin et n'est donc pas gênant. Une œuvre à redécouvrir.
Torn Allegiance (1984) de Alan Nathanson
Modeste production sud-africaine se déroulant pendant la guerre des Boers, ce film se distingue par son pacifisme et sa description sombre de la guerre. 1900 : une famille de fermiers anglo-boers est victime de la politique de terre brulée de l'armée britannique lorsque les Tommies viennent mettre le feu à leur maison et à leurs récoltes et décimer leur bétail. Le film s'intéresse à divers personnages mais s'attache essentiellement à la jeune et attachante Sanna van Elst (jouée par Trevyn McDowell), qui se cherche et ressent ses premiers émois amoureux dans un contexte fort dangereux pour une belle adolescente. Sa mère et un jeune officier anglais tentent de la protéger contre certains soudards en tenue kaki échauffés par cette atmosphère de guerre totale. Pas manichéen, le film se regarde agréablement.
Danie Theron (1983) de Fred Nel
Téléfilm sud-africain consacré à un héros national. Forcément nationaliste, le propos est toutefois tempéré par une mise en scène sobre et un ton assez sombre, l’œuvre s'ouvrant et se concluant sur l’inhumation de Theron par ses hommes suite à sa mort prématuré pendant un combat. Le film est donc un long flashback où le second conflit anglo-boer évolue d'une guerre conventionnelle à une guerre de guérilla suite aux défaites des armées boers et à l'invasion des deux républiques boers par l'armée britannique. Daniel Theron, chef des éclaireurs et du renseignement de l'armée de Piet Joubert, mène alors des opérations de sabotage et de guérilla avec ses kommandos de scouts. Un bon film, avec de bonnes reconstitutions de batailles, étonnamment peu manichéen, offrant plutôt une peinture désabusée de la guerre. A noter pour l'anecdote que Danie Theron, descendant de huguenots français, est l'arrière-grand-oncle de Charlize Theron.
Los ultimos de Filipinas (1945) d'Antonio Roman
1898 : pendant la guerre hispano-américaine, un détachement espagnol est assiégé par des insurgés indépendantistes tagals dans l'église du village de Baler aux Philippines. Durant un an de siège, la poignée d'hommes endurera avec courage la faim, la maladie, la trahison, l'absence de femmes, les raids des insurgés... Tiré de faits réels (ayant fait depuis l'objet de l'excellent roman de Juan Manuel de Prada "Mourir sous ton ciel"), ce film de propagande franquiste possède bien entendu un discours très nationaliste avec ses soldats espagnols à la fois pieux, héroïques et primesautiers et ses méchants Philippins joués par des Espagnols maquillés façon Fu Manchu qui prennent l'air le plus fourbe possible, mais bénéficie heureusement de bons acteurs et d'un récit absolument palpitant, riche en rebondissements et pas trop long. Cette reconstitution du Fort Alamo des Philippines s'avère donc une excellente surprise en dépit de son propos nauséabond.
Amigo (2010) de John Sayles
Comme film de guerre récent peu connu, ce film américano-philippin indépendant est à découvrir. En 1899, dans un petit village philippin, la garnison de la guardia civil ainsi qu'un prêtre espagnol sont faits prisonniers par les partisans philippins. Mais les soldats américains débarquent, libèrent les Espagnols et leurs succèdent en tant que maitres du pays. Le kapitan du village, Rafael Dacanay, homme pacifique, va devoir choisir son camp à mesure que les Américains harcelés par la guérilla instaurent un régime de terreur malgré les réticences du lieutenant Ike Compton. Un film sobre et nuancé qui aborde un sujet tabou de l'histoire de l'archipel, à savoir la brutale guerre de "pacification" américano-philippine qui écrasa dans le sang la jeune République indépendante, tuée dans l’œuf pour satisfaire les appétits colonialistes de l'oncle Sam.
Ceux de Cordura (1959) de Robert Rossen
1916 : durant l'expédition punitive du colonel Pershing au Mexique, le major Thomas Thorn, accusé de lâcheté par ses supérieurs, se voit confier l'humiliante mission d'escorter des cavaliers américains cités pour bravoure suite à un assaut victorieux contre les partisans de Pancho Villa. Film sombre et ambivalent, avec un Gary Cooper à contre-emploi dans un de ses meilleurs rôles et des "héros" aussi courageux face au danger qu'ils sont ignobles le reste du temps, violeurs, escrocs et assassins. A voir.
Cœurs du monde (1918) de David Ward Griffith
1914 : dans un village français, le mariage du beau héros romantique avec l'adorable Lilian Gish est perturbé par la guerre et l'arrivée des troupes allemandes qui se mettent à occuper, piller, tuer, violer et pochetronner à tout va. Malgré son carton d'ouverture qui fait sourire (où DW Griffith montre à nouveau son obsession pour la guerre de Sécession qui a ruiné le Sud même si c'est sans rapport avec le sujet du film), le réalisateur démontre encore son immense maitrise artistique avec cette œuvre de propagande à la gloire de l'Union Sacrée combattant l'hydre prussienne. Ultra-manichéen, le film devait à l'origine être un documentaire réalisé par Griffith mais les États-Unis étant entrés en guerre avant le début du tournage, le projet devint une fiction recyclant des plans tournés pour de vrai dans les tranchées. Erich von Stroheim cumule les fonctions d'assistant-réalisateur, de conseiller technique et de vilain boche ripailleur et mangeur d'enfants à l'écran.
La grande parade (1925) de King Vidor
Un jeune et riche Américain s'engage par bravade et tombe amoureux d'une fermière française avant d'être envoyé combattre sur le front. Le premier grand film américain pacifiste sur la Der des ders. Finis le patriotisme belliciste et les vilains Huns, place au quotidien morne des soldats en campagne, à la dure réalité des tranchées et aux vétérans traumatisés par cette expérience. Un peu long mais intéressant.
Les quatre fils (1928) de John Ford
Nouveau pamphlet pacifiste (symptomatique de l'isolationnisme ambiant) mis en scène par un grand réalisateur avec ce film s'intéressant au destin d'une famille bavaroise avant, pendant et après la Grande Guerre. L'ennemi d'hier devient le héros de l'histoire et le film fait preuve d'un bel humanisme, parfois un peu naïf mais finalement assez touchant. On saluera tout particulièrement la prestation émouvante de Margaret Mann dans le rôle de la mère qui perd ses fils à la guerre.
Le tigre du ciel (1976) de Jack Gold
Durant la 1ère Guerre mondiale, un jeune officier totalement inexpérimenté (le jeunot Peter Firth) débarque sur une base de pilotes du front ouest, où il prend vite conscience du peu d'espérance de vie des combattants du ciel. Excellent film d'aviation militaire britannique avec un Malcolm McDowell à contre-emploi dans le rôle d'un jeune officier vieilli avant l'âge qui se réfugie dans l'alcoolisme pour surmonter sa peur panique de partir au combat. On saluera aussi l'interprétation de Christopher Plummer en "vieil" officier paternaliste et follement attachant ainsi que celle de Simon Ward en pilote sombrant dans la folie. Un film humain et sombre à classer avec "Le crépuscule des aigles" parmi les réussites du genre.
La cavalerie héroïque (1936) de Goffredo Alessandrini
Attention ! Faux film de guerre mais vrai mélo ringard produit par Cinecittà. Umberto Solaro, un officier de cavalerie, perd l'amour de sa vie, Speranza, lorsque la jeune fille est contrainte d'épouser un baron autrichien. Le cœur brisé, Umberto quitte la cavalerie pour rejoindre l'aviation et devenir pilote de chasse lors de la Première Guerre mondiale. Point de cavalerie héroïque donc, mais les marivaudages d'un grand niais à fine moustache rejeté par la bonne société italienne. Seule la fin consacrée à la Grande Guerre nous intéresse, avec sa conclusion étonnamment amère. Le reste a terriblement mal vieilli et est à la limite du ridicule tant il compile les poncifs du mélodrame. La même équipe fera nettement mieux par la suite avec le célèbre "Luciano Serra, pilote".
Les hommes contre (1970) de Francesco Rossi
L'un des films les plus sombres et réussis sur la Première Guerre mondiale d'après le récit autobiographique d'Emilio Lussu. 1916 : sur le front alpin, un jeune lieutenant idéaliste réalise l'absurdité du conflit tandis que l'impitoyable général Leone envoie sans état d'âme ses soldats à la mort par ses décisions militaires ineptes et son recours massif aux pelotons d'exécution (le personnage s'inspire du sinistre général Luigi Cadorna). Un très grand film pacifiste et antimilitariste sur lequel plane tout du long une ambiance de mort et de désespoir. Cette coproduction italo-yougoslave fera l'objet en Italie d'un procès pour "dénigrement de l'armée" qui se terminera par un acquittement.
A l'ouest rien de nouveau (1979) de Delbert Mann
La première version de Lewis Milestone est excellente mais ce téléfilm américain du génial Delbert Mann est beaucoup plus sombre et sobre. Sans doute un des meilleurs films sur la Der des ders, avec un casting de première bourre.
Le faubourg (1933) de Boris Barnet
1914 : un vent de patriotisme souffle sur une petite ville russe frontalière de l'Empire allemand. Pour les soldats des deux côtés, la fièvre belliciste cède toutefois la place au découragement dans la boue des tranchées. La preuve que lorsque le contexte de l'époque le permettait, le cinéma stalinien pouvait accoucher d’œuvres pacifistes touchantes. On est ici loin des futures envolées ultranationalistes du génial "Alexandre Newski", les ennemis sont dépeints comme de très jeunes hommes qui ont aussi hâte de rentrer chez eux que nos braves moujiks. Bien sûr, à la fin, la révolution éclate et on n'évite alors pas la propagande mais la qualité de la mise en scène demeure.
Les derniers jours de Saint-Pétersbourg (1927) de Vsevolod Poudovkine
A la veille de la grande guerre, un ouvrier de Saint-Pétersbourg est recruté par la police du Tzar pour jouer les briseurs de grève. Pris de remords, il se révolte et est jeté en prison, avant de partir pour le front. Un autre chef-d’œuvre méconnu du cinéma soviétique récemment ressorti en DVD chez Bach Films. Toute la maitrise de Poudovkine rappelle qu'Eisenstein n'était pas le seul réalisateur visionnaire du cinéma de propagande, on est encore loin des tâcheronnages serviles (et nanars) d'un Mikhaïl Tchiaoureli.
Le lion du désert (1981) de Moustapha Akkad
Le réalisateur du "Message" (également avec Anthony Quinn et Irène Papas) signe à nouveau une grande fresque avec ce film dédié à la lutte de Omar Al-Mokhtar et ses bédouins contre les troupes du général Graziani lors de la "pacification" extrêmement brutale de la Libye par l'Italie fasciste en 1929. Dénonciation implacable des crimes de guerre fascistes, le film est toujours interdit en Italie. Bien sûr, on ne perd pas de vue qu'il s'agit d'un film de propagande directement produit par Muammar Kadhafi mais la volonté de réalisme et de véracité historique évite tout grand-guignol nationaliste. Les acteurs sont tous excellents, d'Anthony Quinn dans le rôle de Mokhtar à Oliver Reed dans celui de l'implacable Rodolfo Graziani ou Rod Steiger en Duce aussi cabotin que l'original.
Luciano Serra, pilote (1938) de Goffredo Alessandrini
Superproduction italienne glorifiant la sanglante invasion de l’Éthiopie, supervisée par le fils du Duce Vittorio Mussolini, Coupe Mussolini à la Mostra de Venise 1938. Malgré sa triste idéologie, ce film de propagande est une épopée grandiose à la mise en scène virtuose et à la musique épique signée Giulio Cesare Sonzogno, avec un Amedeo Nazzari habité par son rôle. Vétéran de la Première Guerre mondiale, le pilote Luciano Serra disparait au cours d'un vol transatlantique Rio de Janeiro-Rome. Son fils, qui idolâtre son père, s'engage dans l'aviation. Le père disparu et le fils se retrouveront durant les mortels combats contre les "sauvages" abyssiniens...
Le dernier train de Madrid (1937) de James P. Hogan
Pendant la Guerre Civile espagnole, un groupe de réfugiés tente de fuir Madrid, alors que la capitale sous contrôle républicain est bombardée par le camp adverse. Parmi eux, un prisonnier franquiste libéré par un ami loyaliste, un déserteur de l'armée républicaine, un journaliste américain, une jeune fille dont le père est mort fusillé par les troupes gouvernementales... Sous une apparente neutralité, il s'agit là d'un film hollywoodien pro-franquiste, les dirigeants de la Paramount soutenant financièrement les putschistes à l'époque. Le message pacifiste a donc pour but de prôner l'isolationnisme et la non-intervention. A part ce propos malhonnête, c'est un très bon film sobre et bien construit, passant habilement d'un destin individuel à l'autre.
Raza (1941) de José Luis Saenz de Heredia
Une curiosité. Film produit, écrit et secrètement coréalisé par Francisco Franco d'après son roman semi-autobiographique du même titre, lequel titre est dédié à la race espagnole, pure, aryenne et supérieure. On n'a pourtant pas affaire à un nanar comme les films de Mikhaïl Tchiaoureli à la gloire de Staline car Franco y crée un héros fictif, double ultra-idéalisé de lui-même mais portant un autre nom. Point de modestie, c'est juste dû au fait que le Caudillo était un être semi-divin et immatérielle qui ne pouvait être incarné par un acteur...
L'aspect biographique est cependant bien là, de son enfance élitiste dans une base navale de la marine espagnole à son mariage avec Carmen Polo, même si le parcours est fort lifté. D'un père minable et adultérin, il fait un héros mort à Cuba, de son double il fait un patriote romantique qui survit sans séquelle au peloton d'exécution républicain. Le film se veut une fresque s'étalant de la perte de l'empire (avec force soupirs nostalgiques) en 1898 à la victoire du Bien sur le Mal en 1939 (avec images d'archives de défilé des troupes franquistes en guise de happy end) sur le modèle des films de propagande soviétiques et nazis. L'essentiel du film est consacré à la Guerre Civile, valeureux militaires phalangistes et pieux ratichons contre hordes rouges de soudards mal rasés, rigolards, pochtrons et grimaçants. Distrayant quoique franchement longuet sur la fin, le film ambitionnait de créer un style franquiste mais s'avère quand même très vieillot sur la forme (les batailles font très pétard mouillé) malgré la scène de l'exécution des prêtres sur la plage qui possède de superbes cadrages et une certaine ampleur. Bien sûr, l'idéologie putride est omniprésente (ultranationalisme, glorification de la guerre, saluts fascistes à tout va, bondieuserie à tous les étages) mais ça fait partie du charme...

A noter que Franco en était tellement fier qu'il se faisait des projections privées du film toutes les semaines au cours desquelles il fondait systématiquement en larmes d'émotion.

Le réalisateur torchera vingt ans plus tard un autre film hagiographique à la gloire du tyran, "Franco ese hombre" (= "Franco, cet homme"

).
Un pilote revient (1942) de Roberto Rossellini
1941 : durant la guerre contre la Grèce, un pilote italien est abattu en vol et fait prisonnier par les troupes britanniques. Soigné par une ressortissante italienne dont il s'éprend, notre héros, bien décidé à s'évader à la première occasion, prend néanmoins le chemin de la captivité tout en constatant les ravages de la guerre et des bombardements sur les populations civiles au sol. Film étonnant, considéré comme le plus réussi de la "trilogie de la guerre" de Roberto Rossellini. Presque un film pacifiste produit par la propagande fasciste ! Bon, bien évidemment, à la fin, le discours a un sursaut de nationalisme avec la conclusion triomphaliste quand les troupes italiennes victorieuses chassent les Alliés du territoire hellénique (même si en vrai ce sont les Allemands qui ont conquis la Grèce mais ça c'est une vérité humiliante qu'on ne verra évidemment pas dans un film fasciste italien).
L'homme à la croix (1943) de Roberto Rossellini
"Dédié aux aumôniers militaires morts en croisade contre les "sans Dieu" pour défendre la patrie et apporter la vérité à l'ennemi barbare." Propagande fasciste mastodonte se déroulant sur le front d'Ukraine, où un aumônier tête à claques parvient même à convertir le très méchant commissaire politique ressemblant à une momie couvert de pustules cutanés (les stigmates du communisme !). De bonnes scènes de bataille mais une morale catho ultra-lourdingue et omniprésente.
Jours de gloire (1944) de Jacques Tourneur
Film de propagande américain pro-soviétique qui accommode l'enfer du front de l'est aux codes hollywoodiens. Pour que le public ricain se sente proche de l'allié du moment, le film insiste bien sur la foi chrétienne des partisans russes (Staline avait certes rouvert les églises pendant le siège de Stalingrad mais tout de même !). Une curiosité avec la Russe blanche Tamara Toumanova en danseuse de ballet se joignant à la guérilla communiste

et le déjà très sobre et talentueux Gregory Peck dans son tout premier rôle.
Chetniks! The Fighting Guerrillas (1943) de Louis King
Curieux film de l'effort de guerre hollywoodien dédié à la lutte des Tchetniks contre les forces de l'Axe, alors que les Alliés n'allaient pas tarder à abandonner la guérilla monarchiste et nationaliste panserbe aux griffes de Tito après avoir constaté que les Tchetniks étaient plus occupés à combattre les Partisans et les Oustachis mais aussi à génocider les populations croates et bosniaques en général (avec l'accord des Allemands et des Italiens), avec les armes fournies par l'Ouest, qu'à lutter contre les occupants. Philip Dorn fait du général Draza Mihailovic (auquel il ne ressemble pas du tout) un héros romantique dans la pure tradition hollywoodienne. Après la guerre, le film fut retiré des circuits suite à l'exécution du général Mihailovic pour crimes de guerre hourdie par son ennemi juré Tito, qui s'appliqua à faire des Tchetniks des grands méchants encore pires que les nazis dans sa propagande. Aujourd'hui, les Tchetniks et leur chef sont bien entendu glorifiés par le régime nationaliste d'Aleksandar Vucic.
49ème Parallèle (1941) de Michael Powell et Emeric Pressburger
Pendant la Seconde Guerre mondiale, un U-Boot traqué à travers les régions polaires est finalement repéré et coulé dans la Baie d'Hudson. Six membres rescapés de l'équipage se retrouvent seuls sur l'immense territoire canadien. Ensemble, les marins nazis tentent de traverser le pays afin de rejoindre les États-Unis encore neutres dans l'espoir de regagner l'Allemagne... Ce chef-d’œuvre du duo Powell/Pressburger est un film de propagande britannique qui adopte tout du long le point de vue d'un groupe d'Allemands ! En effet, alors qu'on s'attendait à ce que le trappeur québecois joué par Laurence Olivier (qui en fait joyeusement des tonnes) soit le héros de l'histoire, celui-ci disparait finalement au bout de peu de temps et on suit donc la cavale de ces matelots (dont un seul membre n'est pas 100% nazi) qui tentent sans succès de soulever une communauté allemande du dominion contre le pouvoir britannique. Le regard porté sur l'ennemi du moment est donc très ambivalent et loin de la caricature.
Colonel Blimp (1943) de Michael Powell et Emeric Pressburger
1942 : le major-général Clive Wynne-Candy, chef de la Home Guard, supervise un exercice de défense de Londres. Humilié par de jeunes recrues, le soldat vieillissant se souvient d'un temps où régnait la discipline et où les lois de la guerre était respectées... Cette fresque remarquable à la mise en scène virtuose est découpée selon un long flashback en trois époques : 1902, la guerre des Boers; la Première Guerre mondiale; puis enfin la Seconde. Le film raconte donc la vie de ce soldat de métier, son amitié avec un officier allemand, son amour secret pour la femme de son ami, dont il épousera le sosie. Du duel à l'épée de sa jeunesse à la guerre totale et déloyale menée par les nazis, le héros comprend peu à peu avec grande réticence que son pays doit s'adapter s'il veut triompher de ce nouvel ennemi implacable. L'interprétation de Roger Livesey est d'une grande modernité et son évolution physique est bluffante, du jeune homme athlétique à la vieille baderne à moustache surnommée avec dérision "Colonel Blimp" par ses hommes. Le triple rôle de Deborah Kerr est également à saluer. Mais le plus surprenant pour qui n'est pas accoutumé au cinéma de propagande anglais et à sa représentation toujours nuancée et respectueuse de l'ennemi reste Anton Walbrook en Allemand d'abord tenté par le nazisme pour venger l'humiliation de 1918 avant de prendre conscience de son horreur et d'émigrer au Royaume Uni pour se réconcilier avec son vieil ami. Un film antinazi mais germanophile en somme.
La bataille du Rio de la Plata (1956) de Michael Powell et Emeric Pressburger
Œuvre mineure dans la brillante filmo du tandem britannique, ce film reconstitue la première grande bataille navale de la Seconde Guerre mondiale qui eut lieu dans l'estuaire du Rio de la Plata entre l'Argentine et l'Uruguay non loin du port de Montevideo, lorsque la Home Fleet affronta le cuirassé de poche allemand l'Amiral Graf Spee le 13 décembre 1939. La marine royale y montre ses gros muscles et ces messieurs les officiers veillent au grain avec leurs jumelles, jamais perturbés par les explosions qui pleuvent autour d'eux en surimpression. Outre l'apparition de Christopher Lee en barman uruguayen, le principal intérêt du film est le Capitaine Hans Langsdorff commandant l'Amiral Graf Spee, corsaire qui nous est montré comme un Capitaine Nemo complexe et insaisissable baladant secrètement à travers l'Atlantique les équipages prisonniers des navires qu'il a coulé, un personnage à la fois épique et tragique incarné par Peter Finch.
Candlelight in Algeria (1944) de George King
En Algérie vichyste, une sculptrice américaine aide un aviateur anglais à échapper aux nazis et à préparer le débarquement des troupes alliées en Afrique du Nord (occasion de caser des stock-shot sur la musique triomphaliste de rigueur). Un bon petit film de propagande britannique, entre film d'espionnage et film d'aventure sur fond de Seconde Guerre mondiale avec un James Mason qui a la classe impérial.
Crépuscule (1941) de Henry Hathaway
Au Kenya, pendant la Seconde Guerre mondiale, une petite garnison britannique affronte un soulèvement de rebelles kenyans armés par les Allemands. Curieuse production que ce film de propagande hollywoodien dans lequel la débutante Gene Tierney incarne une métisse africaine ! Sacrément plaisant cela dit, pour qui apprécie le mélange des genres entre aventure exotique et film de guerre. La fin puritaine où Cedric Hardwicke nous fait un sermon à l'église est vraiment très étrange et semble rajoutée car elle fait très artificielle vis à vis du reste de l'histoire. A noter que Bruce Cabot, héros de "King Kong" et de ce film anti-nazi, était en fait un agent double au service du Troisième Reich et passera la fin de la Seconde Guerre mondiale détenu dans une base militaire avant de poursuivre comme si de rien n'était sa carrière hollywoodienne et de devenir l'un des meilleurs potes de John Wayne (sans doute que le racisme, ça crée des liens...).
La pagode en flammes (1942) de Henry Hathaway
En Chine, le photographe américain Johnny Williams parvient à s'évader des geôles japonaises avec deux autres fuyards. Ils se réfugient à Mandalay où se trouve la base des "Tigres volants" américains combattant pour le compte des Chinois. Là, notre héros tombe amoureux d'une jeune patriote chinoise luttant contre l'envahisseur nippon... Après avoir été Africaine, la belle Gene Tierney est maintenant une Chinoise pure souche dans ce nouveau mélange des genres très sympathique signé Hathaway, entre film de guerre, film d'espionnage, film d'amour... Quelques scènes marquantes comme lorsque nos héros traversent un charnier pour échapper aux Japonais, le crash de l'avion ou le final apocalyptique.
13 rue Madeleine (1947) de Henry Hathaway
Film hollywoodien centré sur la résistance française et l'action des services secrets américains en France occupée en vue du débarquement en Normandie. Bon divertissement où James Cagney démasque un espion nazi au sein de son réseau et localise le siège de la Gestapo au 13, rue Madeleine. Assez cocasse tout de même la représentation exotique des maquisards français qui font très guérilléros mexicains.
OSS : Les héros dans l'ombre (1946) de Irving Pichel
Durant l'été 1944, des officiers de l'OSS sont parachutés en France occupée avec pour mission de détruire le tunnel de Corbet-Mallons, en préparation du débarquement. Un suspense très agréable avec Alan Ladd en héros macho et John Hoyt en mémorable méchant de la Gestapo.
Passage pour Marseille (1944) de Michael Curtiz
Pour voir un journal français appelé "La vérité française" écrit en Anglais !

Film jumeau de "Casablanca", ce film méconnu n'a pas très bonne réputation mais se révèle un excellent divertissement. Le film est découpé en trois époques, avec de multiples flashbacks. La partie la plus faible est celle où l'on découvre Humphrey Bogart en aviateur FFL lançant des petits mots à sa femme depuis son bombardier. Les deux autres parties sont plus palpitantes : journaliste envoyé au bagne de Guyane pour avoir dénoncé les accords de Munich, Jean Matrac n'est plus que rancœur et individualisme lorsqu'il s'évade soi-disant pour rejoindre l'effort de guerre contre l'Allemagne. Recueilli en mer par un navire français, le patriotisme de notre héros finira par se réveiller pour empêcher les officiers pétainistes de livrer le bâtiment à la marine nazi. C'est cette partie aventure qui retient l'attention, la romance Bogart-Michèle Morgan n'arrivant pas à la cheville de son tandem avec Ingrid Bergman.
Prisonniers de Satan (1945) de Lewis Milestone
Librement inspiré de faits réels. Les pilotes d'un bombardier américain abattus au-dessus de la Corée sont livrés aux Japonais par le félon gouverneur de la province. Jugés par une cour martiale japonaise, tous sont torturés un à un pour les forcer à signer des aveux... Sans doute le film le plus abject produit durant l'effort de guerre hollywoodien. Le réalisateur de "A l'ouest rien de nouveau" n'y va pas de main morte et accouche d'un film fascisant pour dénoncer le fascisme japonais. Les Japs et leurs alliés coréens sont caricaturés ici avec un racisme virulent tandis que les aviateurs américains WASP sont des blocs d'héroïsme dont l'idéologie ultranationaliste triomphera des sévices niakoués. Tout du long, ces aviateurs américains nous font l'effet de robots aussi fanatisés que les méchants Japs qu'ils affrontent. Le titre original "The Purple Heart" donne le ton et on hallucine devant notre écran lorsque les héros, condamnés à mort, marchent tous d'un pas résolu direction l'échafaud, un sourire radieux sur le visage, comblés de bonheur à l'idée de mourir en martyrs pour la patrie... A voir ne serait-ce que pour connaitre un équivalent hollywoodien des films de propagande nazis.
Okinawa (1951) de Lewis Milestone
Excellent film consacré à la fameuse bataille, en partie centré sur la capture et l'interrogatoire de prisonniers japonais. Mise en scène sobre et interprétation superbe (Richard Widmark, Karl Malden...).
Guérillas aux Philippines (1950) de Fritz Lang
Printemps 1942 : l'équipage d'un navire de la marine US coulé par les Japs est recueilli par des villageois philippins. Ensemble, ils tentent de rejoindre l'Australie à bord d'une frêle embarcation et font naufrage pendant un typhon. Errant à travers la jungle, nos marins sont bientôt recruté afin d'organiser la résistance sur l'ile de Leyte en prévision du débarquement des troupes de McArthur... Un bon petit film d'aventures et de guerre, certes mineur dans la filmo de Fritz Lang, mais qui reconstitue de façon divertissante et limpide cette page de l'Histoire avec un Tyrone Power en grande forme, en rompant au passage avec le manichéisme anti-Japs, ici peu appuyé.
Captives à Bornéo (1950) de Jean Nebulesco
Derrière ce titre français un peu kitsch se cache un très bon classique adapté des mémoires d'Agnès Newton Keith, "Three came home". 1942 : la vie de civils européens vivant à Bornéo bascule lorsque la marine impériale japonaise envahit l'ile. Les colons sont faits prisonniers et internés dans des camps, les femmes et les enfants séparés des hommes. Mariée à un fonctionnaire colonial britannique, la romancière américaine Agnès Newton Keith est détenue avec son petit garçon, subissant divers sévices jusqu'à la défaite du Japon...
Au lieu du discours raciste et revanchard qu'on était en droit d'attendre de ce type de films en 1950, on a la bonne surprise de découvrir un film humaniste et nuancé avec un beau portrait de femme forte, indépendante... et très ouverte d'esprit, le film ne travestissant jamais les opinions libérales de l'écrivaine. Ici prime le drame humain vécu par les prisonnières, leur volonté de s'organiser pour survivre et protéger leurs enfants malgré la dureté des conditions de détention, l'incertitude du sort de leurs maris et le sadisme de leurs geôliers... Beau passage où l'ambigu colonel Suga (Sessue Hayakawa) "kidnappe" trois enfants blancs pour leur offrir à manger dans sa villa après la mort de ses trois enfants victimes du bombardement de Hiroshima.
Feux dans la plaine (1959) de Kon Ichikawa
Philippines, 1945. Vaincus, les soldats japonais tentent de survivre dans la jungle de l'archipel, traqués par les Américains et les guérillas qui veulent leur faire payer leurs crimes de façon sanglante. Un film nippon absolument désespéré et nihiliste, rempli d'images fortes : les Japonais maigres et déguenillés avançant en rampant sur le sol sous les bombardements, la scène de cannibalisme, la peur qui fait commettre de nouveaux crimes à des soldats nippons déboussolés, fantomatiques et en loques, qui les fait s'entretuer... Le traumatisme de guerre vu du point de vue japonais avec une mise en scène magistrale.
L'homme qui aimait la guerre (1962) de Philip Leacock
Comme son titre l'indique, Steve McQueen joue dans ce film un véritable psychopathe accro à la guerre, avide de destruction, le personnage est en outre très arrogant et sans scrupules. Belle performance pour McQueen, un contenu quasi-documentaire sur la vie des pilotes de bombardiers américains stationnés en Angleterre en 1943 et de belles scènes aériennes utilisant de vrais B17 d'origine, le film étant par ailleurs tourné en noir et blanc afin de recycler quelques stock-shots du film "Un homme de fer" (1949) ainsi que des images d'archives du conflit.
La proie des vautours (1959) de John Sturges
Curieux film, qui mélange mélo à l'eau de rose et film de guerre viril. La romance Sinatra/Lollobrigida occupe bien trop de place (on se fait un peu chier devant ces diners-cocktails mondains et la femme fatale jouée par Gina n'est pas particulièrement attachante) mais la partie guerrière relève le niveau de la seconde moitié lorsque Franky termine enfin sa permission à Calcutta et retourne au casse-pipe dans l'enfer de la jungle birmane infesté par les forces nippones. L'ennemi change de nationalité lorsqu'une unité de l'armée nationaliste chinoise massacre des troupes anglo-birmanes pour s'emparer d'un stock d'armes et de matériel. Frank Sinatra désobéit à ses supérieurs et franchit alors la frontière chinoise avec son commando. Ayant fait prisonniers les militaires chinois, il ordonne à Steve McQueen d'exécuter sommairement tous les captifs, un passage assez marquant bien que le massacre ait lieu hors-champ. Au final, un film bancal mais avec quelques bons passages et un chouette casting. On appréciera toutefois l'absence de condescendance occidentale vis-à-vis des "indigènes" (sans doute grâce aux convictions de Sinatra). Ah, et sinon j'adore le bouc de Frank Sinatra dans la séquence d'intro. On a du lui dire qu'il avait l'air ridicule pendant le tournage car il apparait glabre durant le reste du film.
La flamme pourpre (1954) de Robert Parrish
Chef-d’œuvre britannique méconnu, "La flamme pourpre" est un film remarquable à plus d'un titre, rompant totalement avec les clichés habituels de l'époque. Gregory Peck y est un aviateur américain stationné en Birmanie en 1945. Homme brisé par la mort de sa femme dans un bombardement, le pilote Forrester recherche la mort dans chacune de ses missions et est détesté de ses collègues. Sa rencontre avec une jeune birmane va peu à peu lui redonner le gout de vivre. Au cours d'une mission, son avion s'écrase dans le désert birman et Forrester, l'individualiste suicidaire, fait alors tout pour sauver ses compagnons et rejoindre son amoureuse. L'immense acteur livre une belle performance à l'unisson de celle de sa partenaire la très belle Win Min Than, dont le jeu d'un naturel étonnamment moderne fait regretter qu'il s'agisse de sa seule apparition à l'écran, la carrière de cette jeune mannequin birmane ayant été stoppée net par la jalousie malsaine de son mari. Il s'agit donc d'un des premiers films montrant une idylle interraciale dans lequel la femme "indigène" n'est pas jouée par une actrice blanche grossièrement maquillée. Rien de gnangnan dans cette romance qui pour une fois parvient à émouvoir et ne parasite pas le film, étant au contraire un de ses points forts. Les amoureux de survival savoureront aussi la traversée du désert et sa forte parabole du désert existentiel du héros, traumatisé de guerre à la limite de la psychose au début du film. La conclusion est aussi étonnamment sobre, pas du tout dans la tradition grandiloquente des happy-end hollywoodiens.
Le vent ne sait pas lire (1958) de Ralph Thomas
Film jumeau du précédent, ce métrage britannique est à la fois un excellent film d'amour et un excellent drame de guerre. 1942 : la Birmanie est envahie par les Japonais. Une colonne de réfugiés et de soldats britanniques en guenilles traverse le désert et la jungle harcelés par les Japs pour tenter de rejoindre l'Inde. 1943 : rescapé du mortel exode, le jeune lieutenant Michael Quinn est affecté à Delhi pour apprendre le japonais, afin de faciliter les interrogatoires de prisonniers japonais. Il tombe amoureux de sa professeure, la belle Susuki San. Mais alors qu'il est envoyé en mission, il est capturé par les troupes japonaises, qui les torturent lui et ses deux compagnons d'arme… Voilà encore une romance interraciale ni nunuche ni kitsch puisque l'actrice Yoko Tani apporte sa fraicheur, sa tendresse et son naturel au coté d'un Dirk Bogarde lui aussi d'une extrême douceur qui était alors à la croisée des deux parties de sa carrière et allait rompre avec ses rôles de jeune premier pour aborder des personnages autrement plus sombres. Le thème du racisme est abordé de front et le film est aux antipodes de la condescendance de l'horrible "Le barbare et la geisha" du pourtant génial John Huston.
Intelligence Service (1957) de Michael Powell et Emeric Pressburger
On retrouve Dirk Bogarde en héros dans ce petit film sympathique du tandem Powell-Pressburger relatant l'enlèvement d'un major général allemand par les services secrets britanniques en Crète en 1941. Avec un petit rôle d'officier nazi pour Christopher Lee.
L'aigle de Guam (1962) de Richard Goldstone et John Monks Jr
L'histoire vraie de George Tweed, marin américain qui se cacha pendant trois ans dans les montagnes de l'ile de Guam occupée par l'armée Japonaise. Bon film pacifiste et anti-raciste avec un héros Robinson au discours internationaliste et universaliste surprenant et une vraie actrice asiatique dans le rôle de son love interest.
Le sable était rouge (1967) de et avec Cornel Wilde
"Beach Red" est un film remarquable et inhabituel. Ouvertement pacifiste, il donne une vision crépusculaire de la guerre du Pacifique. La façon dont la caméra scrute les pensées de chaque personnage (Américains comme Japonais), passant individuellement de l'un à l'autre, préfigure beaucoup "La ligne rouge". Une réussite.
La bataille de Bloody Beach (1961) de Herbert Coleman
L'américain Craig Benson est envoyé par sous-marin aux Philippines pour évacuer des civils. A la recherche de sa femme disparue, il la retrouve au sein d'un groupe de partisans philippins mais réalise qu'elle est devenue la maitresse du chef des maquisards... Bon petit film de série B avec un Audie Murphy comme toujours excellent.
Back Door To Hell (1964) de Monte Hellman
Afin de préparer le débarquement des troupes de MacArthur, trois marines sont envoyés afin de joindre la résistance philippine. Cette modeste production Roger Corman tournée aux Philippines est à redécouvrir pour son ambiance très moderne et son réalisme. Le très fade chanteur pop Jimmie Rodgers (n'est pas Frank Sinatra ou David Bowie qui veut) se fait carrément voler la vedette par le débutant Jack Nicholson (également coscénariste) ainsi que par l'excellent Conrad Maga qui joue le chef de guérilla. Anabelle Huggins est également convaincante en combattante philippine, le script nous épargnant pour une fois la romance rasoir. La noirceur voulue par Monte Hellman et Nicholson est un peu gâchée par le remontage sauvage des distributeurs qui ont rajouté un final triomphaliste avec stock-shots à donf de troupes ricaines victorieuses, mais ça n'empêche pas le reste de conserver son atmosphère amère.
Patrouilleur 109 (1963) de Leslie H. Martinson
Car les dictateurs ne sont pas les seuls à s'être offerts des biopics hollywoodiens à leur gloire, voici l'adaptation à l'écran des exploits du président John Fitzgerald Kennedy pendant la WWII, sortie à peine cinq mois avant son assassinat. Premier biopic américain d'un président en fonction, ce petit film est en tous cas fort plaisant et sympathique. L'odyssée du futur président figurait d'ailleurs dans le Reader's Digest tant tout était réuni pour un film d'aventures : lorsque le patrouilleur lance-torpilles P.T.109 est coupé en deux par un destroyer japonais, les survivants échouent sur une ile déserte. Le lieutenant de marine JFK prend alors la situation en mains afin d'alerter les secours... JFK déclarera par la suite avec ironie avoir été décoré pour avoir perdu son navire.
The Camp on Blood Island (1958) de Val Guest
1945 : un camp de prisonniers en Malaisie. Possédant une radio et sachant que le commandant du camp veut les exécuter si le Japon est vaincu, les prisonniers s'efforcent de cacher la nouvelle de la fin de la guerre à leurs gardiens... Très bon film produit par la Hammer dans la foulée du "Pont de la rivière Kwaï".
Un caïd (1965) de Bryan Forbes
1945 : L'enfer du camp de prisonniers de guerre de Changi à Singapour où chacun tente de survivre. A la tête d'un trafic, un prisonnier américain, le "Caïd", s'est pourtant bâti un train de vie très confortable... POW movie particulièrement pessimiste et psychologiquement dense qui évite bien des clichés du genre grâce à un héros franchement cynique et ambigu. Sans doute LE rôle de George Segal, comédien méconnu déjà à l'affiche de l'excellent "Le pont de Remagen" et du génial "Qui a peur de Virginia Woolf ?". Il parvient à rendre humain et attachant un rôle qui a à priori tout d'une enflure. A ses cotés, on remarque les puissantes prestations de James Fox (doublé en VF par Dominique Paturel, la classe) et de Tom Courtenay. Le réalisateur tire vraiment son film vers le haut, en faisant l'un des meilleurs représentant d'un genre très codifié. Ici, pas de cavales rocambolesques, pas de vilain maton tourné en bourrique par ses prisonniers farceurs, pas de bons sentiments, le thème reste la débrouille pour survivre, discipline dans laquelle le héros est passé maitre, ce qui on s'en doute devrait lui valoir quelques ennuis à la libération...
Trop tard pour les héros (1970) de Robert Aldrich
1942, aux Nouvelles Hébrides. Une patrouille britannique est chargée de neutraliser un émetteur radio dans la partie nord de l'île occupée par les Japonais. Film plein d'ironie du Gros Bob qui ridiculise toute la gloriole militaire dès le générique d'intro sur fond de drapeaux japonais, britannique et américain tombant en loques sur une musique de parade.
La Septième Aube (1964) de Lewis Gilbert
Un communiste malais, une Eurasienne et un Américain combattent ensemble les Japonais pendant la guerre. Quelques années plus tard, l'Américain est devenu un planteur, l'Eurasienne est institutrice et le Malais dirige la guérilla pour chasser les Anglais de son pays. Ce métrage britannique, un des rares à aborder l'insurrection malaise de 1948 (une guerre occultée tant en Grande-Bretagne qu'en Malaisie), est un très bon film, étonnamment nuancé, qui ne montre pas vraiment les troupes d'occupation de Sa Majesté sous un jour très flatteur (on les voit incendier un hameau de pauvres paysans). L'amitié entre William Holden et l'insurgé communiste (personnage très ambigu) est aussi inhabituelle.
Baïonnette au canon (1951) de Samuel Fuller
Corée, 1951. Les troupes américaines sont contraintes de se retirer sous la pression des forces communistes. Pour masquer ce repli de 15000 hommes, une escouade de 48 hommes est chargée de faire diversion avec ordres de tenir coute que coute... S'accommodant à merveille de la censure, Samuel Fuller profite de ce petit film de guerre pour décrire avec son réalisme habituel le quotidien des GI's, qu'il connait par cœur. Une œuvre qui a bien vieilli (mis à part le personnage du Mexicain, stéréotypé à mort, qui met aujourd'hui un peu mal à l'aise).
China Gate (1957) de Samuel Fuller
En Indochine, un commando de la Légion Étrangère est envoyé faire sauter un dépôt d'armes communiste avec l'aide d'une Eurasienne... Ca a franchement mal vieilli. Sans doute le plus mauvais film de guerre de Fuller. Même en fan du réalisateur et avec toute la bonne volonté du monde, ce film sur la guerre d'Indochine est à des années lumière de "La 317ème section" et manque cruellement de réalisme. Intro dédié à la "mission civilisatrice" de la France en Indochine avec commentaire pontifiant qui d'un coup de baguette magique fait des Viêt-Minh les envahisseurs de leur propre pays (et qui omet soigneusement de préciser que les Américains soutenaient au départ la guérilla Viêt-Minh), Nat "King" Cole qui est là pour pousser la chansonnette entre deux cassages de cocos, scènes "comiques" lourdaudes, manichéisme ultra-simpliste du propos, l'héroïne qui s'appelle "Lucky Legs"

, scénario parsemé de coïncidences vraiment hénaurmes... Pourtant, le talent du réalisateur affleure ça et là, de la scène de la mort du légionnaire après sa chute du haut d'un ravin au passage du piège de jungle ou celui du crash de l'avion (avec ces petits détails qui sentent le vécu et font toute la différence), en passant par les thèmes du racisme et des personnages féminins forts si chers au cinéaste. Les prestations de Angie Dickinson et Lee Van Cleef en Vietnamiens (!) font aujourd'hui sourire. Lee Van Cleef est un méchant infiniment mieux élevé et plus sympathique que le héros américain qui est vraiment un sale bourrin antipathique et malsain. A noter que ce film "dédié à la France" ne parut pas assez dithyrambique aux autorités françaises, qui prétendirent qu'il ne donnait pas une image assez bonne de la guerre menée dans notre ex-colonie.
Les canons de Batasi (1964) de John Guillermin
La vie d'une base militaire anglaise dans un état africain nouvellement indépendant est perturbée par une révolution. Lorsque les sous-officiers sont assiégés dans leur mess par des soldats rebelles, le sergent major Roderdale décide de contre-attaquer... Petit film de guerre très anglais, plein d'autodérision et d'humour pince-sans-rire, avec un show irrésistible de Richard Attenborough.
La dernière grenade (1970) de Gordon Flemyng
Curieux film de guerre britannique, à la frontière entre série B et série A, mélangeant violence brute à l'ambiance spaghetti et mélo pure. Congo: 1960. Le mercenaire Harry Grigsby est trahi par son frère d'arme et ami Thompson, qui massacre son commando à la mitrailleuse (superbe séquence générique avec la grandiose musique de John Dankworth). 1970 : Londres. L'état-major envoie Harry à Hong Kong afin d'éliminer Thompson, qui a offert ses services aux communistes et provoque des troubles à la frontière chinoise. Au début on croit que ça va envoyer de la chique et du mollard cette vengeance entre mercenaires et puis la romance prend le pas sur l'action virile. On savourera quand même la punchline "Je ne me dérangerais pas pour te pisser dessus même si tu avais le feu au cul !"
Le putsch des mercenaires (1979) de James Fargo
Film assez médiocre au casting cinq étoiles sur un sujet très peu traité au cinéma (la guerre civile rhodésienne) d'où son relatif intérêt. Scénario confus et propos douteux qui fait preuve d'une complaisance embarrassante vis-à-vis de l'apartheid rhodésien. Le faiseur James Fargo ("L'exécuteur de Hong Kong" avec Chuck Norris) ne nous montre exclusivement que des exactions commises par la guérilla noire nationaliste, quand l'immense majorité des horreurs du conflit furent perpétrées par l'armée rhodésienne et ses escadrons de la mort. Sur le fond, le film colle un peu trop au discours de l'officier rhodésien joué par Richard Harris, selon qui le régime suprémaciste blanc de ce qui n'était pas encore le Zimbabwe était un rempart contre le communisme, Richard Roundtree étant le seul rebelle humain du film car désabusé par son engagement ! Malgré quelques bonnes scènes, jamais le film ne montre vraiment la violence de la dictature et la virulence de son racisme. Certes, il annonce par son pessimisme les lendemains qui déchantent du régime de Mugabe mais s'avère quand même bien malhonnête. Le fait que ce film britannique ait été tourné en Afrique du Sud, seul allié d'un régime unanimement reconnu comme illégal et criminel par toutes les nations du monde, n'y est sans doute pas étranger...
Afghan Breakdown (1991) de Vladimir Bortko
Après la propagande et la censure d'état pré-1985, le regard que le cinéma russe porta sur la brutale invasion de l'Afghanistan commença à se scinder avec la Perestroïka, quelques œuvres pacifistes parvenant à faire entendre une voix discordante (un film soviétique de 1991 vu sur Youtube dont je n'arrive pas à trouver le titre m'avait aussi marqué par ses spetsnaz déboussolés exécutant sommairement leurs prisonniers afghans). C'est à la deuxième catégorie qu'appartient ce film de guerre italo-soviétique très sombre et réaliste. Réquisitoire implacable contre l'absurdité d'une boucherie sans nom, ce film surprenant a visiblement eu les moyens de ses ambitions et se conclue par le massacre de tout un village moudjahidine par l'Armée Rouge (à ce moment, on songe un peu au "Requiem pour un massacre" d'Elem Klimov). Une vision de la guerre qui pue la charogne avec un Michele Placido incarnant dans son visage tiré tout l'épuisement moral d'un officier désabusé par une décennie de bain de sang.