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Visuellement et techniquement irréprochable. Après, j'ai pas accroché à tout niveau scénario, avec parfois le sentiment qu'il faut se dépêcher d'enchainer les passages obligés (le comportement de Colette envers Linguini évolue ttrop vite), mais bon, le film surprend aussi par certains choix osés (Rémi ne parle jamais avec Linguini). En tout cas, ça reste fort sympa à voir.

Par contre, sur le fond, je suis plutôt en opposition avec cette approche de la cuisine. Qu'est-ce qu'on voit là ? Un restau 5 étoiles (ça existe ?) inaccessible à qui n'est pas patron CAC 40, tout ça pour déguster des jolies présentations dans des assiettes vides (la ratatouille, faut pas avoir faim). Et Rémi refuse avec dégoût de participer à l'élaboration d'une gamme de produits surgelés, alors qu'il aurait sûrement pu mettre au point des plats de la mort à pas cher pour toute la famille. Quel élitiste.
Dans l'univers des grands théoriciens de la cuisine, je penche plutôt du coté de Thomas, le Petit Chef.

D'un autre côté, on peut considérer qu'il n'a pas envie de participer à l'établissement d'une gamme de nourriture industrielle façon Tricatel avec un grand nom dessus pour servir d'alibi.

En même temps la French Cuisine c'est l'image qu'elle traîne : du fin gourmet prout-prout, on ne mange pas, on déguste. Et comme la France a une image assez luxueuse, l'histoire d'un rat (l'animal minable et sale par excellence avec le cafard) dans un restau gastronomique rend le contraste plus saisissant que si l'action s'était déroulée à la Brasserie Chez Dédé à La Plaine Saint Denis. Pis le film se serait appelé "Moules-Frites" ou encore "Entrecôte-Salade" et ça aurait été moins vendeur.

Perso j'ai adoré Ratatouille. Ok, on peut être un peu rebuté par l'état d'esprit du rat, mais perso j'ai vu que le côté cinématographique, qui m'a rappelé le bon souvenir des vieux disneys.

Le rat voit tout simplement la cuisine comme un art. S'il avait été passionné de cinéma, il aurait refusé de produire des sitcom AB pour se consacrer à la réalisation du "Citizen Kane" du XXIe siècle.

Ceci dit, à la fin, il ouvre justement le bistro de chez Dédé, manifestement accessible à tous, donc il y a une morale.

Ouais, bah justement, il aurait sans doute refusé de participer à la sitcom Pour Etre Libre, ce qui prouve bien son erreur de jugement.

Sinon je suis d'accord qu'à la fin, le scénar se rattrape de justesse en leur faisant ouvrir un bouiboui où on sert de la grande gastronomie anorexigène. Mais c'est pas pour autant que la nourriture industrielle se doit d'être dégueulasse. Un génie comme Rémi aurait un meilleur impact humanitaire et artistique s'il révolutionnait cette gamme de produit plutôt que de légérement améliorer le manger des richous (qui de toutes façons s'en branlent du goût, jugeant préférentiellement le plat sur son prix).

Tu généralises un peu trop sur "les riches", espèce de sale gauchiste. Ceci dit, la gamme de produits sous-vide est, si ma mémoire est bonne, une idée du méchant, alors que le fils de Gusteau n'a encore aucune marge de manoeuvre : on imagine bien que le méchant ne se serait pas gêné pour servir des cochonneries. Après, si on veut vraiment finasser sur le scénario, le fiston et le rat sont peut-être un peu trop inexpérimentés pour y penser dès le début.

Ceci dit, je suis d'accord pour dire que les plats sous-vide faits selon les recettes de grands chefs peuvent être excellents : je garde un bon souvenir des plats tout faits de la gamme Alain Senderens.

Non mais le projet du méchant, c'était pas seulement de faire du surgelé, c'était aussi de faire des Burgers et des Pizzas destinés au marché américain (et pan, une belle part d'auto-dérision au passage), et le but était par-là de faire de Gusteau une enseigne de Fast-food.

Bien sûr que le vil chef moustachu s'en serait mis plein les fouilles en exploitant le nom de Gusteau, mais il n'empêche qu'il demandait à Rémi de lui fournir des recettes excellentes, donc sur le fond, y'aurait eu une amélioration de la qualité pour le plus grand nombre. Bien entendu, je pinaille à mort dans ces considérations très extrapolées par rapport au film.
Concernant la nourriture de riche, je dois dire que depuis que je touche moi-même un salaire un poil plus décent que mes anciens 200 € mensuels, je suis allé à l'ocasion manger dans des restaurants plus huppés. Et le constat s'est imposé que c'est pas parce que c'est cher au menu que c'est forcément bon, voire c'est c'est carrément décevant. Et pourtant, ce genre de taverne continue à faire salle pleine, d'où mon interrogation (et ma conclusion totalement et volontairement expéditive).

Edit : si Rémi se met à faire des burgers comme chez Dolly's (un restau de Caen pas cher mais très bon ), je signe tout de suite.

Je suis d'accord pour dire que certains restaurants chics (mais pas seulement, hélas) servent une cuisine honteusement peu abondante si l'on tient compte du prix. Mais faut pas non plus confondre les riches et les snobs : il y a des riches qui aiment manger bien et à leur faim !

Et puis de toutes façons, je suis encore traumatisé par ça :



Alors, Ratatouille, à côté, ça ne peut être qu'un très bon film.

Bon ben vu hier soir et je profite d'une insomnie pour taper quelques lignes: c'est peu dire que j'ai été déçu.

Ratatouille, c'est une histoire plate, convenue et mécanique à l'extrême. Tout est prévisible, et donc, ce qui est plus ennuyeux, les ressorts dramatiques (la romance, le critique...) tombent complètement à côté de la plaque quand ils ne sont purement et simplement torpillés (le testament, subplot mal foutu dans sa résolution). C'est moche à dire, mais Pixar, sur ce film, ne parvient plus à se démarquer du tout-venant de la production Disney. Les personnages sont complètement stéréotypés et fades. Le seul moment qui donne un peu de profondeur au film est lorsque le père de Rémy montre à son fils la vitrine du dératiseur.

Si l'aspect technique est incroyablement réussi, il n'est jamais, comme dans un Cars ou un Indestructibles, mis au service de l'histoire. L'inventivité visuelle est réduite à peau de chagrin: il y a bien ce moment de poésie où les goûts sont "traduits" graphiquement dans la tête de Rémy puis de son frère. Il y a bien le thème de la marionnette qui permet une répétition de gags de mime. Mais c'est tout. Même le thème de la cuisine - et par-là même, celui de la création - n'est pas bien exploité: les animateurs auraient pu jouer avec la nourriture, montrer plein de choses, organiser une vraie farandole d'ingrédients, bref profiter de la 3D pour nous montrer la cuisine sous toutes ses textures ! Ben non: la cuisine dans ce film n'est vue que de loin, de façon informe, une omelette par-ci, une tomate par-là... Les deux précédents Pixar poussaient beaucoup plus loin l'imagination graphique offerte par un monde de voitures ou l'élasticité d'une super-héroïne. Plus loin dans l'humour, aussi.

Là où l'univers de 1001 pattes, Toy Story 2 ou les Indestructibles comportaient une dimension parodique qui renouvelait de vieux schémas, Ratatouille présente le même Paris américanisé représenté au cinéma américain depuis les années 1930, les mêmes clichés, sans aucun recul, mis à part de se mettre à hauteur de rat. Et contrairement à un Toy Story qui orchestrait une réconciliation entre l'ancien (Woody) et le futuriste (Buzz), Ratatouille n'est finalement que conservatiste.

On ne peut plus dire, comme à l'époque de Toy Story, que le postulat de la 3D suffit à son propre exploit. Pixar a passé la barre de plus en plus haut et arrive désormais à une phase cruciale: le renouvellement.