Bach Films a sorti récemment en Dvd le « Casino Royale » télévisé par CBS le 21 octobre 1954. La mythique première adaptation de James Bond à l'écran, huit ans avant Sean Connery dans « Dr. No ».
Qu'en dire, après l'avoir longtemps attendu ? Le téléfilm est conforme à ce que j'en avais lu. Tourné en direct, extrêmement statique, mais très bref (50 mns), il est surement l'adaptation la plus fidèle jamais faite d'un roman de Ian Fleming, ce qu'explique très bien Jacques Zimmer dans un des passionnants bonus du DVD. Comme dans le livre, tout tourne autour de la longue partie de cartes entre Bond et Le Chiffre, occupant presque entièrement l' « Acte II » précédée d'un « Acte I » présentant les protagonistes et suivie d'un « Acte III » où Le Chiffre cherche à récupérer son argent avant d'être châtié. Châtiment occasionnant par ailleurs une fin étonnamment abrupte, bien loin des climax qui allaient devenir plus tard une des marques de fabriques de la série.
En parlant de la série telle que tout le monde la connait, ne vous attendez pas à vous trouver en terrain connu. Il n'y a pas de M, pas de Miss Moneypenny, pas de Q. Et d'ailleurs pas de gadgets. Oubliez aussi le pré générique et les James Bond Girl. Il n'y a qu'un personnage féminin, c'est Valérie Mathis, et non pas comme dans l'œuvre originelle, Vesper Lynd. Car si j'ai parlé plus haut de la fidélité au roman, il y a quand même là quelques belles entorses au canon bondien. De façade et de circonstances quand Vesper devient Valérie, et n'est plus une traitresse mais un agent du Deuxième Bureau (n'oublions pas que « Casino Royale » se passe en France), plus étonnantes quand le récurrent Felix Leiter, agent de la CIA ami et complice de 007, devient Clarence Leiter, agent des Services Secrets Britanniques. Mais ce changement de statut et de nationalité est surement du au fait que, dans le film, James Bond est présenté comme... américain ! Ce qui, ajouté au fait qu'il se fait fréquemment appeler Jimmy au fil de intrigue, ne manque pas de désarçonner le puriste.
Quand à l'interprétation, si Linda Christian est tout à fait anonyme, Michael Pate fait un Leiter très convenable. Barry Nelson, lui, est un Bond tout sauf Bondien. Il n'en a ni la prestance, ni le style, mais garde quand même une présence virile assez impressionnante, et est extrêmement convaincant dans l'Acte III, lorsqu'il reprend le dessus après avoir été violemment torturé (hors champs, quand même, on est à la télévision et en 1954), manifestant plus de douleurs et se montrant plus mal en point qu'aucun de ses successeurs ne le sera en 21 films. Reste le méchant de l'histoire, Le Chiffre, qui est lui interprété par le talentueux Peter Lorre. En très peu de scènes, Lorre parvient à imposer une silhouette de félon cauteleux, suintant le vice, qui reste très impressionnante. Au point qu'on se prend à rêver ce qu'il aurait su donner s'il avait pu tourner un « vrai » James Bond.
En définitive, avec ses défauts et ses atouts, « Casino Royale », version 1954, reste un témoignage précieux que tout Bondophile doit avoir dans sa DVD thèque.
PS : le DVD coute 5€90. Ceux qui ne l'achêterons pas sont donc impardonnables.
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