Le nanar des uns est le navet des autres...
Je trouve que Flic ou Ninja est l'un des meilleurs nanars de Godfrey Ho. C'est l'un de ceux où il a été le plus loin dans sa folie, en cherchant à justifier sa technique de copier-coller par des twists de scénario totalement dingues en partant à la base d'une oeuvre au scénario déjà très tordu et fourmillant de scènes nanardes, que l'incrustation des ninjas occidentaux (censés être les grands responsables de tout ça) sur-complexifie jusqu'au délire. D'habitude il n'essaie que très moyennement de faire illusion avec quelques scènes de téléphone, ou tout au plus quelques champ-contrechamps gweilo/asiat' sporadiques, laissant les éléments hétéroclites du film à leurs propres incohérences, ce qui donne souvent une impression pénible de film compil' fourre-tout, d'autant plus chiant que le métrage asiatique dont les ressorts sont inexpliqués, est mauvais. Dans des films comme l'empire des ninjas ou top mission, on se surprend vite à zapper les parties asiatiques qui sont longues, plus ou moins incompréhensibles remontage oblige et ne forment pas un tout avec les scènes occidentales simplement juxtaposées et qui racontent une histoire parallèle (souvent top nanarde d'où l'intérêt). L'avantage ici, c'est que le film, dans sa structure, forme un grand bloc nanar indissociable à la logique délirante mais sans faille, chaque élément composite se retrouvant justifié dans la fameuse scène finale qui synthétise, en un dialogue extraordinaire, toutes les incohérences du film en même temps qu'elles y apportent une conclusion avec le duel Tremblay/Baron qui est tout de même l'un des plus beaux combats ninja de l'oeuvre de Godfrey (paye ton bouclier en rotin et ta cage à poules !). Je m'étais vraiment éclaté à faire le schéma qui figure sur le site à partir du fameux dialogue. En le faisant, je pensais à cette scène du film de Cédric Kahn où le flic retrace le parcours criminel de Roberto Succo sur une carte pour comprendre qu'il n'y a rien à comprendre que la logique délirante du tueur fou. ça donne l'impression d'un film qui obéirait aux préceptes de la politique des Auteurs ("ne pas faire un plan qui ne serve pas le film dans son ensemble, ne pas introduire d'éléments de fond ou de forme injustifiés, chaque dialogue, chaque travelling est une affaire de morale") mais appliqué au nanar pur jus, celui qui, à force de n'importe quoi, parvient à arriver nulle part . C'est vraiment un grand film. Pour moi du 4/5 voire du 5/5 car je ne me suis pas emmerdé une seule seconde.
Mais c'est vrai que je connaissais le dialogue final par coeur avant de voir le film dans son intégralité et que j'avais le schéma bien en tête. Pour qui se désintéresse de l'histoire, ça peut n'avoir pas beaucoup plus d'intérêt qu'un vague mélo à la sauce "rape and revenge" au scénario embrouillé et donc chiant à la longue. Mais quand on essaie de s'accrocher un peu à l'histoire grâce au dialogue final et qu'on revoit le film, on découvre que tout coïncide miraculeusement avec l'explication et l'on a la satisfaction du gars qui comprend l'incompréhensible, ainsi que la jubilation de découvrir que de nouvelles pièces viennent s'ajouter à ce puzzle dément (l'intervention de Cherry, la soeur jumelle de Rose par exemple).
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