Encore une bien belle nuit dont la première excentricité est de commencer en plein milieu de l’après-midi par un buffet campagnard en mode citoyen du monde dans un kiosque qui aurait quand même eu besoin d’un petit coup de serpillière. Mais cette micro-gêne (sans parler de la pelouse non tondue...) a bien vite disparu devant l’afflux de nanardeurs venus des quatre coins de France et d’ailleurs (on y apprend plein de trucs, entre autre sur le scrutin électoral belge selon Greyhunter). Entre les fromages radioactifs, le cake aux grattons, le tetrapak en filaments séchés et les Quality Streets, je suis passé tellement souvent d’un extrême de la bizarrerie alimentaire à un autre que je crois que mon estomac n’a toujours pas compris ce qui s’était passé (un peu comme mon cerveau durant la nuit).
Enfin, ça a fait plaisir de revoir un peu tout le monde : Créature en fidèle gardien du kiosque (non, j'ai pas dit statue du temple...), Skunkhead (si tu publies ta thèse, je serais le premier à en acquérir un exemplaire), Snake Void, Kevo (et ses sublimes trouvailles littéraires sur la chasse durant l'occupation et les cybermamans des années 90), Kobal et sa teurgou… (ah, sujet sensible...), Kyra, Jeff Hersson, Siry qui nous (enfin au moins « m’ ») a fait peur en arrivant au tout dernier moment, Captain Beyond qui a fini par abandonner à Oph l’exclusivité de l’excentricité vestimentaire old school qui va bien, Painkiller, Ozy, Sbel, Benoît et kornichon, parmi tant d’autres. Et c’était sympa de faire la connaissance en direct live de Mike Hunter et Mr Maurice qui n’ont pas dû se sentir très accueilli quand on considère le temps que j’ai passé à leur parler de 21 Jump Street et Dallas. Enfin, je regrette de n’avoir pas parlé (ou alors sans le savoir) à Plissken et Jack Tillman...
Quant à la nuit en elle-même, elle a tenu pour moi toutes ses promesses, non pas en diffusant des films au taux de nanardise crevant le taux-de-nanardise-o-mètre mais en nous proposant des films (surtout les deux du milieu) devant lesquels on étoufferait un bâillement poli lors d’une séance en solitaire ou en petit comité non alcoolisé et qui, ici, devienent une expérience autre. Le tout entrecoupé d’interventions irradiantes de classe d’un Jean-François « Dieu » Rauger dont on a pu admirer toute l’étendue de l’élégance cravatière durant ces douze trop courtes heures. Et si un jour il met son pull « archives INA approved » aux enchères, je vends un de mes reins (si je ne me le fais pas voler par Gordon Mitchell avant) pour l’acquérir. Sérieux, cette magnifique initiative de début de NE justifie à elle seule le plan de sauvegarde numérique (ou PSN) mis en place par l’INA (oui, je prêche pour ma paroisse, et alors ?).
Donc, la soirée... Elle fut mémorable entre autre parce que j’étais particulièrement bien entouré, assis entre Skunkhead et Kevo, ce qui était courageux de ma part étant donné le sac de bouffe calé sous son siège tellement chargé en effluves du terroir qu’il aurait normalement dû dissuader une certaine personne âgée de lui piquer sa place entre les deux premières séances. Ladite personne n’a d’ailleurs pas reparu après la projection de Clodo. Un peu plus loin, on trouvait Siry et Kornichon et je crois que je regretterai toute ma vie d’avoir manqué l’occasion de prendre une photo des deux en train de roupiller du sommeil du juste sur leurs sièges entre les 3e et 4e séances. Enfin, je dois ajouter pour mon prestige personnel que MONSIEUR Fabien Gardon avait choisi le dossier de MON siège pour y poser sa veste et que c’est MOI (oui, MOI) qui ai révélé à Kobal l’identité du mystérieux chinois à lunettes de soleil qui débarque dans le métrage hong-kongais à la fin de Black Ninja. Enfin en même temps, j’attends toujours qu’on me prouve que j’avais raison…
Donc, les films...
Ayant en mémoire un Vulcan Dieu du feu qui n’avait pas convaincu tout le monde de par une certaine mollesse, je dois admettre que les premières minutes de Spécial Forces m’ont fait un peu peur par leur côté série B gentillette dont la nanardise se limitait aux sourires des moines et au look foireux des zombies. Et puis, lentement, le film décolle, déjà par le charisme hors norme de Lloyd (aka « Le meilleur d’entre nous »). Quoi qu’il fasse, qu’il paye un verre au lourdeau qui dragouille sa femme, refile ses paquets à sa femme pour aller aux putes, tripote du téton de périprostitupute, attende dans le canot pneumatique gonflé en plein milieu d’un paquebot en flammes, se fasse rétamer lors de sa tentative de prise de pouvoir sur le groupe d’Américains traversant l’île en mode survie, il reste beau, flegmatique, touchant dans sa maladresse, magnifiquement humain au milieu de ses compagnons d’infortune trop lisses.
Mais si Lloyd porte tout le capital sympathie du film sur ses solides épaules surplombant un torse puissant et velu, petit à petit, le film s’élève à son niveau. Ca commence avec une réplique anthologique du capitaine (dit « droit devant ») quand il se fait agresser dans les chiottes : « je croyais que c’était un pédé, et puis j’ai vu son couteau », ça continue avec notre beau héros qui attaque un camion à coup de pied (et au ralenti encore) et ça explose carrément lors de l’attaque du bateau par des méchants aux looks totalement improbables qu’il s’agisse du gus coiffé d’un casque nazi au Superman au T-shirt hyper-ventilé en passant par le sabreur efféminé… (au passage, le meurtre à la hache du responsable de la radio amène au film un petit côté gore sympa...). Une scène qui s’étire en longueur, notamment lors du « sport de chambre » avec fille à poil ligotée au lit mais ne prenant pas la peine de tenter de se libérer pour finir par taper sur son agresseur avec un bidon d’essence vide qui fait boing boing.
Et une fois arrivés sur l’île, c’est un vrai festival (au passage, je doute de la stratégie consistant en tirer en direction d’un avion pour attirer son attention). J’ai adoré l’attaque sortie de nulle part au cimetière. Six mecs armés jusqu’aux dents (mitraillettes, bazookas) et bénéficiant de l’effet de surprise s’attaquant à autant de naufragés armés d’un seul flingue pour finalement repartir avec la moitié des effectifs en moins et sans aucune arme, c’est quand même très fort ! Et cette séquence de réveil des morts (« SORTEZ DE VOS SEPULCRES !!!!!!!!! »), ces zombies aux looks improbables (faisant écho à la B.A. « Village People killers ») qui avancent au ralenti entourés de moines excités comme des gosses à Noël, ce happy end où on est contents parce qu’on a sauvé l’américaine et laissé les filles autochtones sur l’île... Et ce triple combo On emballe les filles/clin d’œil complice à la caméra/To be continued. La salle rugissait de plaisir, c’était grand, c’était beau, c’était la N.E. dans toute sa splendeur ! Et bravo au membre de la Team qui a reconnu Le Parrain sous son costume de moine !
J’étais aussi un peu réticent par rapport à Clodo et Les Vicieuses. Même nanar, mater du porno aurait peut-être fini par mettre tout le monde un peu mal à l’aise. Et ce ne fut finalement pas (trop) le cas, déjà parce que les premières scènes de sesque sont très brèves et tombent comme un chev… comme un brin de paille sur un chibre. Et même quand elles s’éternisent, il y a toujours un petit détail naze qui empêche le malaise. C’est sans doute pour ce film que l’apport du public a été le plus bénéfique. Outre les scènes vraiment WTF comme la fille qui pisse presque debout dans un champ, la technique de traite des vaches par musicothérapie ou la scène de baston de resto la plus molle de l’histoire du cinéma (venue de nulle part et s’achevant dans une amnésie générale), on n’était pas trop de 400 pour relever tous les calembours foireux du film (et encore, je suis sûr qu’on en a laissé passer), faisant de cette projection l’événement exceptionnel qu’elle devait être.
Comme le signalait Skunkhead, ce qu’on retiendra de ce film, c’est finalement son illustration de l’exode rural faisant d’un petit gros un rien benêt un sex-symbol à la Sam Bot, après qui courent toutes les filles même quand il se trouve en concurrence avec le fameux Johnny Holliday (fraîchement arrivé de Comargue). Enfin, si Bourvil est « heureusement » mort avant d’avoir vu le sort réservé à sa dernière apparition ciné, qu’ont dû penser ceux qui restent, comme ce jovial et sémillant chanteur de kermesse entonnant avec enthousiasme un air dont les paroles illustrent une partouze se déroulant sous une table extrêmement haute de plafond ? Au final, Clodo et les vicieuses est un film qui m’aurait sans doute ennuyé si je l’avais vu seul mais qui devient ici exceptionnel tant le métrage est rare. Jusqu'au dernier moment, à savoir sa présentation par monsieur Rauger, j'ai pensé qu'on aurait droit à une version soft.
En effet, quelle autre institution que la Cinémathèque, quel autre démiurge de la cinéphilie que JFR auraient osé diffuser ce film ? Dans quel autre cadre que la N.E. cela aurait-il été possible ? Cette projection restera comme la séance la plus barrée de toute ma vie. Parce qu’on parle - D’une comédie pas drôle - Remontée avec des inserts pornos - Par le réalisateur lui-même - Avec des plans de Bourvil - Dans son tout dernier rôle au cinéma
Si l’on part du principe que comme pour une catastrophe aérienne, la nanardise d’un film est toujours la combinaison de plusieurs facteurs, Clodo et les vicieuses est une œuvre passionnante par son ratage nous amenant à nous poser nombre de question sur l’histoire de son tournage, sur lequel on voudrait tout savoir (au passage, je crois que la voix off du chien, c’est Jacques Jouanneau…)
Bon, j’ai déjà pondu une bonne tartine, la suite et fin plus tard...
_________________ Lawrence Woolsey, précédemment connu sous le pseudonyme de deathtripper21...
"Godfrey Ho a beau avoir trouvé des Kickboxeurs américains, le duel entre la mariée et la robe restera LA baston du film." Plissken
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