Comme l'écrit Inkizitor, la plupart des amateurs de nanars sont avant tout des cinéphiles. C'est donc tout naturellement que j'ai découvert l'existence des nanars... en allant au cinéma. La seule différence, c'est que çà se passait dans les années cinquante. Mes premiers nanars furent des films français, ceux que René Chateau eut la bonne idée de reprendre en vidéo dans sa série "Les excentriques du cinéma français". La différence entre ces nanars et ceux habituellement encensés par les membres de ce Forum, c'est-à-dire des films plus récents, c'est que ces "vieux films" étaient en général interprêtés par des "pointures", des gens qui n'avaient rien à prouver au niveau du talent, et qui avaient aussi illustré de leur présence des chefs-d'oeuvre absolus du cinéma français: Pierre Larquey, Noël Roquevert, Saturnin Fabre, Pauline Carton, Jeanne Fusier-Gir, Marguerite Pierry, Jean Tissier, Raymond Bussières et Annette Poivre, etc. Avec eux, on passait sans douleur du "Corbeau" de Clouzot au "Congrès des belles-mères" de Couzinet, c'était bien le même Pierre Larquey, mais ce n'était certainement pas le même film !
Plus tard, en 1962, lors d'un voyage à Londres, j'ai découvert le cinéma d'Edward D. Wood Jr. avec, coup sur coup, "Plan 9 from Outer Space" et "Bride of the Monster". Là encore, c'est le nom de Bela Lugosi qui m'avait guidé vers ces films, de lui je n'avais alors vu que des oeuvres comme "La marque du vampire", "White Zombie", ou même "Ninotchka". Puis, la lecture de "Famous Monsters" m'apprit l'existence de milliers de films allant du nanar absolu au chef-d'oeuvre impérissable, de "The Giant Claw" à "La fiancée de Frankenstein"...
La seule chose qui m'ait frappée, c'est que même en matière de nanars, beaucoup d'entre nous ne sommes pas d'accord, sur pas mal de films, même lorsque nos critères sont les mêmes. Par exemple, les Lugosi tournés pour la firme Monogram sont en grande partie des nanars, mais l'acteur lui-même garde sa dignité et reste un acteur, tandis qu'un Tor Johnson, par exemple, même si on a de la sympathie pour lui, c'est avant tout un gros balèze dont la carrure impressionne; pour certains, Tod Slaughter serait "un mauvais acteur", dont il convient de se gausser, alors que c'est tout au contraire un extraordinaire comédien, formé au théâtre, et totalement maître de son jeu, jusqu'aux plus infimes détails, la manière de retirer un gant, par exemple, en ayant l'air à la fois menaçant, sournois, distingué, méfiant, et tout çà avec un zeste d'humour. Allez donc demander à Chuck Norris de faire çà !!!
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