Je m'attendais à plus hilarant mais finalement, ce n'est pas plus mal que j'ai eu cette impression de film "juste" rigolo car cela m'a permis d'apprécier "Clerks", non pas comme une grosse comédie qui tache, mais plutôt comme un délire fait entre potes. C'est plein de bons mots, de situations absurdes mais ça ne fait pas artificiel, ça sonne "vrai". Du coup, ça prend un peu la même valeur que des anecdotes qu'on peut se raconter entre amis, qui sont parfois plus mémorables qu'un gros fou-rires dont on aura oublié l'origine et même l'existence quelques jours plus tard. Après, je rejoins l'avis de certains, l'enchainement des scènes est effectivement un peu bancal, on lance une idée, on la dénoue, on passe à autre chose mais c'est surtout le principe d'avoir voulu raconter une journée de ces employés modèles qui pose ce vrai problème de continuité. Parce qu'avant de me rendre compte que tout les événements se passaient à la même date, ça ne m'avait pas gêné plus que ça, je l'avais ressenti comme différentes tranches de vie, indépendantes et là, ça paraissait cohérent, sur le même principe de l'anecdote justement. Un peu comme si Dante nous racontait, qu'un jour, il avait vu un mec chercher la douzaine d'oeufs parfaite, une autre fois, qu'il avait fermé le magasin en douce pour aller faire du hockey sur le toit du batiment... . Or le fait que tout arrive le même jour, effectivement, donne l'impression que ça manque de liant.
Mais à côté de cela, c'est un film qui a pas mal de scènes et de dialogues marquants. La veillée funèbre, Dante et Randal qui font le tour de leurs clients chiants ou débiles ("ooohhhh Navy Seals!"

) le décryptage étonnant du "retour du Jedi", le remake des "Dents de la mer", l'engueulade entre Dante et Veronica concernant leurs nombres de conquêtes et justement, l'interprétation subjective de ce qu'est une conquête, de ce qui compte ou pas... . Et puis Randal dans ses oeuvres qui passe des commandes de films pas forcément tout publics devant une mère de famille médusée, insulte les clients, mate des pornos transsexuels en tenant la boutique... mais qui en plus, à un don incroyable pour mettre son meilleur pote dans la merde pour ensuite, trouver une phrase qui viendra lui expliquer que ce n'est pas de sa faute, mais celle de son ami... . Finalement, on est presque étonné de voir que ce sont Jay et Silent Bob qui sont les personnages les plus équilibrés du lot, le duo passant son temps à glander mais en ayant conscience de leurs statuts et de leurs états, ce qui n'est le cas d'aucun des autres protagonistes. En tout cas, on retrouve beaucoup de passages où le comique de situations et les répliques sont à l'honneur au point de se dire que, plutôt qu'une série animée ou un nouveau film, "Clerks" aurait peut être le meilleur des écrins sous la forme d'une sitcom un peu trash.
Quoiqu'il en soit, dans sa façon d'aborder des thèmes parfois sérieux tout en ayant l'air de se foutre de tout, "Clerks" est assurément un film qu'on dirait fait par des éternels adolescents. Un divertissement assez régressif mais qui n'abuserait pas de la vulgarité ou alors, s'en servirait comme d'un outil pour être un peu plus subtil dans son message et son humour. Le genre de trucs finalement pas si lourd qu'il en a l'air et suffisament bien écrit pour se regarder plusieurs fois sans se lasser.