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Un gratte-ciel en otage
Titre original: Skyscraper
Année: 1997
Durée: 1h35
Catégorie: Pur et dur
Genre: Die Hard Discount
Producteur: Joseph Merhi et Richard Pepin
Réalisateur: Raymond Martino
Avec: Anna Nicole Smith, Charles M.Huber, Calvin Levels, Jonathan Fuller, Deron McBee... .
Il faut savoir persévérer. Voilà sans doute la devise de PM Entertainment, grande productrice de films à petits budgets qui, si elle reste plus friquée que d'autres, n'en reste pas moins l'une des firmes les plus prétentieuses de la série B, tentant vaille que vaille de copier ses voisins fortunés malgré une certaine incompétence. De ce fait, il apparaissait peu raisonnable de vouloir calquer le cultissime "Piège de Cristal" en confiant le premier rôle à une actrice élue pire révélation de l'année aux Razzie Awards à peine trois ans plus tôt. C'est pourtant bien ce que le duo Mehri/Pepin, toujours loin de la Comté, s'est obstiné à faire avec ce "Gratte ciel en otage".
Pour mettre en place ce projet, les responsables se sont basés sur un scénario sans grande imagination. Celui-ci nous parle d'une bande de terroristes cherchant à mettre la main sur une arme de haute technologie. Après avoir commis diverses exactions à la cohérence parfois obscure, notre troupe de zouaves débarque à l'intérieur d'un building où se trouve un processeur indispensable à leur projet. Néanmoins, une personne va se retrouver par hasard sur place et dès lors tout tenter pour libérer les otages présents sur les lieux.
Allo la police ? Passez moi McClane, on est dans la merde.
Hélas pour eux, ce n'est pas Bruce Willis et son marcel qui vont débarquer mais Anna Nicole Smith et son sous-tif. Quoique, quand je parle de sous-tif, j'extrapole un brin car c'est souvent dans son plus simple appareil que nous admirerons notre l'héroïne. Et peu importe la gratuité de la chose d'ailleurs, puisque si l'alibi de prendre une douche tient la route, il n'en est rien d'un autre passage où, en pleine séquence "dramatique", la demoiselle se mettra à rêvasser d'une de ses cabrioles avec son fiancé. Un moment qui donnera d'ailleurs lieu a un beau bagage de clichés propre au cinéma érotique. En même temps, vous allez me dire, quitte à embaucher une playmate dans un rôle titre, autant rentabiliser le matériel.
Oh oui, faisons l'amour tout habillés dans les champs… .
Anna Nicole Smith: ceux qui l'aiment prendront l'arrière train.
Néanmoins plus que cette prédisposition à montrer ses atouts pour oui ou pour un non, le défaut majeur d'Anna Nicole réside surtout dans ses qualités d'actrice, oscillant entre le très limitée et le particulièrement exécrable. Semblant ignorer qu'il existe un gouffre entre prendre la pose pour des magasines et jouer la comédie face à une caméra, Anna Nicole affiche devant l'objectif les mêmes petites moues boudeuses que sur papiers glacés. De ce fait, la voir jouer les pin-up au beau milieu d'un gunfight, aura tôt fait d'anéantir le peu de crédit que l'on pouvait accorder à sa prestation. Et comme le scénario lui demande aussi de faire autre chose que dessouder du térro, la moindre scène de ménage avec son chéri devient vite un numéro de grimaces involontaires particulièrement ridicules, nous faisant constater qu'il y a un monde, que dis je une galaxie, entre notre héroïne et le métier d'actrice.
La minute blonde.
Pourtant, l'honnêteté m'impose de souligner qu'elle n'est pas la seule à jouer comme un pied. A peine meilleur, on ne peut pas dire que le reste du casting brille par sa légèreté et pour un peu, on se demanderait si la présence sur le plateau d'Anna Nicole Smith n'a pas totalement désinhibé l'ensemble des acteurs, se disant que de toute façon, ils ne pourraient pas être plus mauvais même en faisant n'importe quoi. Le premier à pâtir de ce relâchement est sans aucun doute Charles M.Huber, interprète de Fairfax, le chef des preneurs d'otages, lequel semble incapable d'aligner une réplique sans se décrocher la mâchoire. Surjouant comme un diable sorti de sa boîte, notre grand méchant prend son devoir très au sérieux pour motiver ses troupes, alignant rictus, rires sardoniques et crises de colère outrancières avec une conscience professionnelle proprement admirable. Certes, on a vu cabot plus régulier mais ses poussés de surjeu atteignent des sommets. D'autre part, les amateurs d'armoires à glace seront ravis de voir apparaître au générique le nom de Deron McBee. Inusable second couteau dans pas mal de téléfilms et séries télé, l'ami Deron profite comme toujours de ses passages à l'écran pour en rajouter des tonnes dans le registre du gros baraqué qui frappe sans réfléchir. On regrettera tout de même que le réalisateur n'est pas cru bon de mieux l'utiliser, faisant de son rôle l'une des prestations les plus discrètes du film. Enfin quand je dis "discrète"… .
Deron McBee donne tout ce qu'il a pour garder son titre de cabotineur numéro un…
…mais ne peut rien contre son boss en plein état de grâce.
Dans un registre différent, on retiendra aussi la performance de Jacques, l'informaticien du commando, lequel poussera le vice jusqu'à baragouiner quelques répliques dans notre langue, au point d'apparaître aussi crédible que Dolph Lundgren en ambassadeur du Togo. Plus que la prononciation, on se demande surtout si l'acteur qui incarne ce rôle comprend un traître mot de ce qu'il dit car si certains moments font vaguement illusion, pour d'autres, c'est du pur charabia que nous proposera ce personnage ajoutant un crédit supplémentaire au film, pour peu que vous le regardiez en VO. A noter d'ailleurs que si la transcription française zappe totalement cette particularité, les quelques bêtises assénés par nos amis doubleurs durant le film, contrebalancent un peu cet oubli. Enfin, ne reste plus qu'à évoquer les cas des seconds rôles qui se trouvent être tous plus à la ramasse les uns que les autres, notamment les autres acolytes de Fairfax qui forme une des escadrille les plus bigarrés de l'histoire des films d'Action.
Jacques (Jonathan Fuller) dans l'un de ces moments crédibles. Et pour cause, il ne parle pas.

Des sbires au top de la discrétion.
Malgré cela, le jeu des acteurs n'est pas la seule justification de cette chronique. Ainsi, comme nous le disait la chronique d'Hologram Man, chez PM Entertainment on aime les explosions, mais pas seulement. En général, c'est l'action spectaculaire qui semble le moteur de cette firme, le vrai souci de cette débauche d'adrénaline apparaissant lorsqu'on n'a pas un budget à la hauteur de ses prétentions. De ce fait, alors qu'on nous promet un building l'espace d'un plan, le contenu de ce dernier laisse pour le moins songeur lorsqu'on découvre terrifié une pièce meublée par un chef décorateur dépressif, ne cherchant même plus à cacher qu'il n'a eu que cinq dollars pour aménager une salle d'interrogatoire. Peu avare en petites économies, les gars de chez PM n'hésiteront pas non plus à nous resservir plusieurs fois les mêmes séquences durant le film ou à sacrifier par le feu un mannequin, dont la rigidité laisse supposer qu'il n'est même pas en mousse.
Alors crapule avoues: où t'as planqué les meubles ?
Ceci est un laboratoire high-tech. Si je vous assure, mettez-y un peu du votre ou on va pas s'en sortir.
Cette envie de toujours en faire trop avec peu de compétences et de moyens se remarque également lors de certaines scènes d'actions, tellement excessives qu'on les dirait sortie d'une parodie. La plus marquante interviendra lorsqu'un des protagonistes tentera d'échapper aux terroristes suite à un échange de mallettes foireux. Ainsi, après avoir essuyé divers rafales de coups de feu, échappé à plusieurs tirs de lance-roquettes à bord d'une auto en flammes, puis balancé son véhicule à travers un camion avant de se faire percuter par une autre voiture, c'est assez naturellement qu'il prendra ses jambes à son coup pour escalader quatre à quatre tout les étages d'un immeuble pour finalement se faire tuer de trois balles et finir sa course plusieurs mètres en contrebas. Le plus redoutable étant qu'on s'attendra alors à le voir se relever pour appeler de l'aide avant de se dire que toute résistance surhumaine mise à part, on est vraiment bien peu de chose face aux dures lois de la gravité. Si par dessus le marché vous ajoutez à toutes ces séquences une musique toujours trop prétentieuse pour la misère qui défile devant nos yeux, on peut dire que la moindre scène d'action se vautre assez rapidement dans la nullité.
Un compositeur qui ne vaut pas bien cher.
Cependant cette surenchère n'est en fait qu'un leurre visant à masquer la vraie carence de ces instants de bravoure, à savoir leur absence totale d'originalité. S'il a déjà été fait cas du véhicule transperçant un obstacle, il faut ajouter à cette liste bien d'autres éléments récurrents. Copain du héros mourrant au bout de cinq minutes, homme torche, défenestrations sauvages… c'est tous les clichés les plus usés du cinéma burné qui resurgissent ici, singés avec une absence de créativité proprement désarmante. On serait même tenter de se demander si les auteurs du script n'avaient pas en tête de faire une poursuite en plein convoi de vitriers, parce que c'est bien le seul stéréotype qui semble avoir été oublié dans le lot. Qui plus est, il reste flagrant que le film ne cache nullement ses références, se permettant de copier presque plan par plan certaines séquences de "Piège de cristal", comme lorsque notre Anna Nicole préférée, après avoir sautée du haut de l'immeuble avec un filin pour seul sécurité, atterrira plusieurs étages plus bas et tentera de se détacher pour ne pas se faire emporter par le poids de l'objet auquel elle s'était reliée. Ceci n'est bien sûr qu'un exemple, mais pour peu que vous ayez le premier Die Hard et ses suites en tête, nul doute que le film prend encore une autre dimension, tant il s'avère incapable de ne pas recopier comme un malpropre ce qu'il vient de reluquer sur la copie de son voisin.

Chef, il y a quelqu'un dans le conduit d'aération, qu'est qu'on fait ?
Hum, sans doute ce pourri de scénariste qui essaye de se tirer. Balancez-y une grenade, il ira pas loin.
Yipikai!!
Pas toujours désopilant, "Un gratte-ciel en otage" est le genre de petite idiotie qui permet rétrospectivement d'apprécier davantage d'autres œuvres plus consistantes. Mais avec son lot d'action riche en énormités, ses acteurs lamentables ou son décalque grossier du chef d'œuvre de John McTiernan, il serait malvenu de jeter le tout aux orties sans au moins y jeter un oeil. En plus, il permet de mettre à jour une autre facette de la starlette Anna Nicole Smith, décédée en février 2007, et dont on arriverait presque à regretter qu'elle n'ait pu poursuivre sa carrière dans le cinéma. Proie facile des tabloïds jusque dans ces derniers instants, elle démontre ici des capacités qui lui auraient sans doute permis de devenir une égérie du mauvais cinéma sympathique. Sans doute pas la consécration après laquelle elle semblait courir, mais être aimé, même pour ses défauts, ce n'est jamais rien.
Alors dans le fond, on peut tout de même remercier PM Entertainment. Car si ce film permet au moins de se souvenir d'elle pour ses talents limités d'actrice plutôt que pour ses frasques, l'effort n'aura pas été vain.
Wolfwood 2/5
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Cote de rareté
4/Exotique
Diffusé en son temps dans la collection "Hollywood Night" de TF1, "Un gratte-ciel en otage" n'a semble t'il pas connu de carrière par chez nous ni en VHS ni en DVD (ou alors, ils sont aussi bien planqués que les missiles de Rambo III). Cependant, vous pourrez tout de même le retrouver en VF sur certaines chaînes de la TNT et du satellite qui le rediffuse régulièrement.
Pour un support numérique, il faudra aller voir du côté des américains qui l'ont sortie à l'unité ou regroupé avec d'autres œuvres de madame Smith, comme "To The Limit" un autre petit film d'action que l'on ne devine guère plus fin.
Liens bonus:
Des rushes trouvés sur Youtube qui donne un bon aperçu du "jeu" d'Anna Nicole Smith.
http://www.youtube.com/watch?v=rl799B3rHKo
Un bref exemple de répliques franco-nawak.