Après le semi-échec de "Van Helsing", le réalisateur Stephen Sommers prend des vacances bien méritées. Comme la plupart des réalisateurs ayant passé deux ans de leur vie sur un blockbuster, il clame à qui veut l'entendre et avec un peu de malice, que son prochain film serait une comédie romantique à petit budget mettant en scène un couple dans un appartement. Un réel projet dont il n'est ensuite devenu que producteur jusqu'à ce qu'on n'en entende plus parler.
Une fois la période de décompression passée, il navigue entre un remake du "Choc des Mondes" pour Spielberg et celui de "Flash Gordon". De son côté, il essaye de monter un projet personnel, melting-pot de mythologie grecque à la "Jason et les Argonautes" en collaboration avec Mike "Cliffhanger" France dont il partage le goût pour les scènes d'action bigger-than-life (imaginez Stallone au milieu de blocs de glaciers en mouvement... trop cher pour l'époque !).
Finalement, c'est sur "G.I. Joe" qu'il jette son dévolu après avoir réfusé le projet par deux fois. Faire un film à partir d'une figurine de soldat, ça ne l'intéresse pas. Son assistant et son agent s'empressent de lui faire connaitre la mythologie de G.I. Joe au travers des comic-books et Sommers voit là l'occasion de remettre un pied dans le cinéma fantastique, de concrétiser des idées qui lui trottent dans la tête depuis des années (la combi accélératrice au centre d'un scénar jamais finalisé) et de rendre hommage à "Opération Tonnerre" (la séquence sous-marine, le second couteau "freaks"), soit le James Bond ayant donné naissance au blockbuster d'action moderne.
La production travaille sur deux scénarios en même temps quand Sommers monte à bord du projet. Mais dès son arrivée, il fait fi des versions proposées, trop proches de films de guerre "classiques" alors que la thématique fantastique abordée à travers l'utilisation de technologie futuriste permet toutes les excentricités dont Sommers raffole. Et puis cette unité cosmopolite a dû titiller la fibre universaliste du réalisateur (cf la scène dans "Van Helsing" où toutes les religions travaillent ensemble, deux ans après les attentats des tours jumelles, rappelons-le).
Au terme d'une production ne suscitant pas l'enthousiasme (Sommers a sa casserole "Van Helsing"; ainsi, les fans les plus modérés et délicats craignent de se faire violer leur enfance sans vaseline), les images sont diffusées au compte-goutte et un teaser/trailer à la masse tarde à pointer le bout de son nez (sfx à finaliser ?) à quelques mois de la sortie (bravo l'équipe marketing en mousse !).
Pire, la production ne projette le film qu'à des critiques triés sur le volet, ce qui n'est jamais bon signe et jamais une bonne chose à faire de toute façon. Surtout après les rumeurs de renvoi du réalisateur après une projection-test catastrophique. Sommers tord le cou à cette rumeur en rappelant qu'il a eu le final cut comme son contrat l'exige et par conséquent qu'on ne pouvait pas le virer (ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait jamais eu d'embrouilles avec la production ceci dit).
Bref, les bonnes critiques commencent à pululer au grand étonnement de tout le monde, faisant du film LE vrai blockbuster de l'été. Alors qu'en est-il exactement ?
Le métrage commence sur une séquence étonnante au Moyen-Âge, à se demander si on ne s'est pas trompé de salle, jusqu'à l'évocation de conflit d'intêret (?) dans une vente d'armes de guerre, dont on se doute qu'elle trouvera un écho dans notre présent. A noter la présence sympathique de Jacques Frantz qui se double lui-même pour l'occasion (au début je me disais "tiens, il ressemble vachement à l'acteur qu'il double !"

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A partir de cette introduction plutôt calme, c'est de l'action quasi-non-stop qui vous attend. Trop ? Pourquoi trop ? Reproche-t-on à une comédie trop de gags ? A un film d'horreur trop d'horreur ? A un thriller trop de suspens ? Quand Sommers promet, Sommers fait. Dans ce cas-ci, de l'action pendant deux heures. Efficace, instantanément jouissif. Si j'étais pigiste chez Mad Movies, je rajouterais "viscéral". Et pour faire plaisir aux copains de Zonebis, je rajouterais "généreux".
Sommers est sûrement le seul à maîtriser l'équilibre délicat du développement minimal nécessaire de l'intrigue (ici un McGuffin trimballé d'un camp à un autre) afin de développer une action maximale.
On notera que même le développement des personnages se fait dans l'action (depuis quand c'est un défaut ?), soit par des flashbacks... de séquences de combats (!), soit par des idées visuelles qui flattent la pupille (les hologrammes, la salle de sport, ou tout simplement une conversation en marchant donnent du mouvement à une scène, d'où cette impression constante d'action). Le parcours de notre héros (interprété par l'acteur le plus fadasse du film, dommage) prend alors une ampleur plus émouvante (la demande en mariage, j'y ai crû !) et plus personnelle. La rivalité entre les deux ninjas est également explicitée. Là encore avec peu, Sommers parvient à donner un peu plus de consistance au combat final.
Ce "Commando" du troisième millénaire malgré sa relative longue durée (le Schwarzy ne durait qu'1h20) et une violence graphique modeste (PG-13 oblige malgré des maquillages "sympathiques" à la fin), n'ennuie jamais grâce à des scènes d'action spectaculaires, une inventivité technologique de tous les instants et une absence de blabla inutile (à défaut de punchlines qui tuent). Le "Poil de Carotte commence à me courir" m'a bien fait sourire néanmoins. On regrettera juste des dialogues et flashbacks parfois trop explicatifs voir facultatifs.
Les effets spéciaux passent beaucoup mieux sur grand écran (projection numérique) que compressés en flash, les doublures numériques sont mieux intégrées, surtout dans la séquence parisienne. La seule véritable faute de goût est ce premier plan entièrement en 3D sur le "pit" en plein désert égyptien manquant singulièrement de photo-réalisme. ça la fout mal venant du réalisateur des deux "Momies". ça devait pas coûter bien plus cher d'amener une seconde équipe filmer quelques plans d'ensemble sur place... Le masque du Commander est aussi limite que celui du Bouffon Vert dans le "Spider-Man" de Sam Raimi. ça passe mais de justesse !
Par contre, du point de vue de l'intensité de l'action, dès la première demi-heure on a l'impression d'assister au climax (la Sommers touch) de n'importe quel autre film d'action lambda (les foreuses !!!!!). Aucune progression dramatique certes, mais qu'est-ce que c'est fun !!! La séquence parisienne au milieu du film, tout simplement énorme, est pourtant pulvérisée par celle du troisième acte, hallucinante scène sous-marine à la Star Wars avec ses gros vaisseaux, ses lasers, ses combats d'arts martiaux et le sauvetage de la princesse (pour le coup baronne) en montage parallèle avant que tout ne finisse par exploser !!!
Les accessoires et les engins utilisés par les G.I. Joe toutes les 30 secondes donnent la banane tant ils sont "funs" jusqu'à l'improbable, mais qu'importe, on se voit à nouveau à 10 ans en train de jouer avec ses figurines ! Les méchants usent aussi des progrès de la science à des fins plus tragiques mais tout autant divertissantes !
La musique de Silvestri est à l'avenant comme on peut l'imaginer, plus axée action qu'aventure, moins lyrique que celle de "La Momie 2" ou "Van Helsing", avec une présence accrue de motifs plutôt que de thèmes sur la majeure partie du métrage, genèse oblige. Malheureusement, elle est souvent couverte par les effets sonores alors que Sommers jusque là apportait un soin tout particulier à la mettre systématiquement en valeur. La première arrivée dans le "pit" est symptômatique à un point tel que s'ils n'avaient pas mis de musique, on aurait pas entendu la différence ! La chanson du générique de fin, diffusée en boucle sur fun radio est complètement hors-propos. J'ai même crû que dans mon cinéma, ils avaient coupé le son pour mettre la radio !
Reconnaissons que le casting féminin constitue un atout supplémentaire dans le plaisir éprouvé à la vision du film. Sienna Miller n'a jamais été aussi attirante qu'en brune (raaah, cette première arrivée résolument iconique ! C'est pas du McT mais ça fait son petit effet !) et Rachel Nichols (vive les tapis roulants !) est amusante dans son rôle de botteuse de cul maquillée en toutes circonstances. Pour les amateurs (et Dieu sait qu'ils ne sont pas nombreux !), le doublage français leur rend bien justice avec une voix légérement cassée pour Miller, rendant bien son côté "sexy bitch" et celle d'Alexandra Garijo pour Nichols.
Le doublage du savant fou par la voix française de Fry dans "Futurama" (il prend pas la même voix de débile non plus hein) peut paraître incongru pour qui ne sait pas qui se cache sous le masque. J'étais persuadé depuis les premiers clichés qu'il s'agissait de Robert Carlyle, je sais pas pourquoi !
Le caméo de Fraser est sympathique et les apparitions de deux-trois vieilles connaissances de Sommers (dont Arnold Vosloo) donne l'impression que le film a été fait dans un bon esprit, résolument communicatif.
Le terme de "ride" aurait pu être inventé pour ce film. Et comme j'ai évité de manger avant, je n'ai pas eu la nausée mais la banane pendant deux heures. Sorti du manège qui nous promet clairement une suite (le plan final est propice à tous les fantasmes), les plus fragiles diront stop. Moi je dis, encore !
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