karon a écrit:
Est-ce que je peux te demander ce que tu aimes dans "Silent Hill" et dans "Resident Evil"? (sans vice caché)
Je vais essayer de ne pas m'éterniser, la question étant à moitié hors sujet.
************ /!\ Attention, ce post contient des morceaux de spoilers /!\ ************
Personnellement je n'ai pas trouvé Resident Evil si raté que ça. Le film est construit de manière efficace et pêchue, l'amnesie temporaire d'Alice même arrivant un peu comme un cheveu sur la soupe permet une initiation en douceur du néophyte par flashbacks.
La tension ambiante va crescendo, la phase d'exploration permet de poser le décors tout en permettant de faire monter le suspense. Les personnages sont sûrs d'eux, après tout ils font partie de l'élite. A ce moment là le spectateur qui se doute qu'à un moment où un autre des zombies vont débarquer de toutes parts se dit que ça va défourailler sévère dès qu'un de ces rigolos va pointer le bout de son nez putréfié.
Puis il y a cette scène où la moitié du commando se fait déssouder comme de la bleusaille qui fait que d'une part le spectateur ne se sent plus aussi rassuré qu'avant et en plus que les lieux ne sont vraiment mais alors vraiment pas catholiques du tout.
Suivi du lâcher de zombies plutôt réussis pour l'époque (2002). J'en ai vu des zombies dans ma vie, ben ceux là ils nous changent vraiment des gugusses peints en bleu ou en vert auxquels on était habitués. Ca vire dans le bourrinage le plus jouissif tout en respectant les codes du genre. La ficelle "je suis amnésique" nous reserve encore quelques surprises sympathiques qui ne gâchent rien au film. Quand au rythme il est on ne peux plus efficace, après une entrée en matière musclée qui reveille le spectateur en lui disant clairement qu'il est pas là pour dormir, ensuite la tension monte doucement pour s'accélerer brutalement et toujours plus jusqu'au final explosif.
Certainement pas le film du siècle mais un bon ptit film de zombies efficace qui a su en quelques sortes renouveler le genre du film de zombies tout en restant fidèle à ses préceptes de base.
A coté de ça on a Silent Hill, qui commence molassonement avec une intro gnangnan au possible. Une mère de famille qui décide de kidnapper sa gosse adoptive pour la traumatiser en la confrontant à un bled qui hante les cauchemards de la petite (incroyable d'être aussi bête!). Un mari qui attend qu'elle soit partie pour finalement se lancer à sa poursuite et lui lancer les keufs aux trousses (va savoir pourquoi...). Brefle on a une gentille mère de famille qui part avec sa gamine de 9 ans sur les routes pour aller dans une ville fantôme paumée au beau milieu de nulle part, tout ce qu'il y a de plus logique.
Je saute directement à l'arrivée en ville, mis à part le coté nawakesque de la situation et le jeu peu convainquant et convaincu des acteurs jusque là tout va bien. Gans aurait tout aussi bien pu nous faire le coup du raccourcis qu'elle ne trouva jamais qu'on en serait au même point mais c'etait ça où jeter à la poubelle plus de la moitié du contenu dramatique du film (dramatique au sens où y a du jeu d'acteurs et des choses qui se passent).
On se retrouve donc avec maman "je suis blonde mais c'est pas ma faute", paumée dans une situation merdique qu'elle a elle même provoqué en décidant d'agir en dépit du bon sens (enfin bon, maintenant qu'on est arrivés le film va peut etre pouvoir commencer...). Nous voici donc dans une ville complètement deserte à première vue et baignée dans une lumière spectrale due à la pluie de cendres perpetuelle provoquée par un incendie de mine sous la ville. C'est chouette, c'eut même été original si ça n'avait pas été directement copié/collé du jeu - Brefle, valeur ajoutée = 0.
Nous voici donc sur les traces de la petite Sharon, qui non content d'être somnembule s'est mise en tête de partir explorer la ville toute seule. Nous voici donc en train d'explorer une ville desertée de toute vie, Gans a du voir "28 days after" et se dire que c'etait vachement cool et flippant de voir un gusse se balader à moitié à poil dans un picadilly circus vide de monde en pleine journée, on a donc droit à de looooongues minutes de balades où on peut admirer Silent Hill sous toutes les coutures. Malheureusement, autant ça peut faire bizarre de voir Picadilly ou Leicester Square désertés de leur population, autant les décors en carton-pâte/CGI (aussi jolis soient-il) d'un bled qui n'existe pas ça laisse un peu dubitatif.
Et là c'est un festival, Gans a envie de faire plaisir aux gamegeeks et il leur en donne pour leur argent. La ville il nous la montre en long, en large, en travers, et sous toutes les coutures, s'attardant sur toutes les devantures, les poubelles, les panneaux d'affichages où on peut voir écrit en gros "Silent Hill", c'est à la limite du matraquage subliminal: pour ceux qui n'avaient pas compris, plus aucun doute n'est possible on est à Silent Hill, t'entends ! Silent Hill!! (ouéééé promizoulin!).
C'est pas tout ça mais même les fans vont finir par trouver ça lourd au bout d'un moment. Il doit absolument se passer quelque chose. Ce qui est pratique avec Silent Hill, c'est qu'à chaque fois que tu veux qu'il se passe quelque chose c'est bien simple, t'as qu'a éteindre les lumières... Je vais pas me plaindre c'est un des gimmick du jeu dont l'effet n'est plus a démontrer. Gans l'a bien compri. Il décide donc de faire sonner la sirène une première fois et notre héroine se retrouve alors dans le noir.
C'est sans compter sur son Zippo magique longue durée capable d'éclairer un stade de foot pendant des heures sans jamais se brûler. C'est sans doute ça la qualité américaine, on a pas des trucs comme ça chez nous...
N'ayant sans doute rien de mieux à faire, maman commence donc l'exploration d'une cave grillagée de plusieurs kilomètres carrés à la recherche de sa somnambule de fille. C'est beau, on y croit presque et puis Gans nous sort ses monstres. Enfin ses bébés monstres parce qu'il faut commencer raisonnablement, ils sont petits mais il en arrive de partout. ça commence très très fort, maman est acculée elle est sur le point de se faire dévorer, eviscérer, déchiqueter voire priver de dessert pendant trois semaine, tout semble perdu quand la lumière se rallume et *pouf* plus de monstres. On a eu chaud.
On a eu chaud mais pour le coup on y croit plus. C'etait beau, on en a pris plein les mirettes, on se serait presque crus dans un clip de Marilyn Manson. Mais pour le coup, les monstres qui disparaissent en fumée juste au moment où ça allait saigner c'est un peu facile monsieur Gans.
Je ne vais pas non plus raconter le film mais c'est à partir de là que ça devient carrément du remplissage, on enchaine les phases de chasse au trésor dans la ville (allez Passe-partout! arrête un peu de chanter et aide moi à trouver le prochain indice!), les phases de chat perché et de cache-cache (Sharon! Sharon!), les phases de monstres (bouh je suis le méchant monstre copié/collé du jeu qui ne peut même pas te tuer parce qu'on a besoin de quelqu'un pour finir le film) qui apparaissent de ci de là pour disparaitre à jamais sans qu'on ait eut le temps ni même l'envie de savoir ce qu'il foutaient là. On enchaine des séquences de plus en plus molassonnes, où l'effet de surprise passé seule persiste la qualité indéniable des effets spéciaux.
Pendant ce temps, Sean Bean, dans la partie asia^M¨M¨M¨M"réelle" du film cachetonne vaguement, en hurlant du "Rose" à tue tête pour nous changer des "Sharon" ; découvre des informations pas vraiment cohérentes sur ce qui va nous amener à la méga super revelation à 30 eurocents finale.
C'est à partir de l'église que le film bascule vraiment dans le cauchemard. On découvre que l'univers de Silent Hill est en fait une annexe de l'enfer où sont bannis pour l'éternité les plus mauvais figurants et petits rôles de l'histoire du cinéma. A l'instar d'Alice au pays des merveilles, maman se retrouve confrontée à une reine de coeur vaguement motivée dont le hobby et de brûler les gens. A ce moment là, je ne vois que deux hypothèses : soit un assistant est venu dire à Gans "heu... Chef. Je suis désolé chef mais on en est déjà à plus de 90 minutes de remplissage chef... si on boucle pas rapidement on va bientôt être obligés de faire un téléfilm en 2 parties..." ; soit Gans s'est rendu compte qu'il avait déjà claqué tout son bugdet en effets spéciaux et que si il continuait comme ça il lui resterait pas assez pour boucler la post prod.
Quoi qu'il en soit, on passe d'une heure et demie de molassonerie chiadée à une demi heure de molassonerie brouillone et précipitée.
Notre insupportable reine de coeur va donc tout faire pour mettre fin au film le plus rapidement possible (bien sûr que je vais te dire où se trouve le boss de fin de jeu, tiens je t'ai même dessiné un plan, et puis y a mon beau frère qu'a un 4x4 il va t'aider à démenager...). En deux temps, trois mouvement maman est plongée au coeur même du cauchemard, dans les méandres infernaux de l'hôpital souterrain de Silent Hill (spécialité locale), un endroit tellement horrible, tellement effrayant, tellement indicible que même Gans a du avoir peur de s'y aventurer et pour preuve il nous a torché ça en 5 minutes chrono. Hop! 5 minutes de révelations express, nous sommes enfin prêts pour un final digne d'une sous production australo-canadienne.
Alors le final, c'est un vrai bonheur. Entre la montée du lit d'hôpital dont on voit les cables suivie de 5 minutes de gens qui courrent en hurlant avec des incrustations de barbelés CGI en gros plan et des gens qui explosent de loin c'est la totale, j'aurais presque touvé ça rigolo si je n'avais pas été assommé (c'est le mot qui convient) par les deux heures précédentes. Le tout enchainé par une rapide scène "si vous êtes pas sages, je tourne la suite". Je ne parlerai même pas du neuneutissime "Mother is god in the eyes of a child"...
Ca peut paraître caricatural expliqué comme ça mais c'est probablement de cette façon qu'aurait réagi quelqu'un ne connaissant pas le jeu vidéo, où pire ne jouant pas aux jeux vidéos du tout.
Bien sûr, Gans a tout fait pour satisfaire les fans. C'est ce qui transpire tout le long du film, brosser les fans dans le sens du poil, c'est tellement plus simple: après tout un fan une fois que tu lui a donné ce qu'il veut ça perd tout sens critique par définition. Pourquoi s'emmerder à essayer de faire un bon film?
Les autres réalisateurs n'ont rien compris, quand on a adapte un jeu, a fortiori un jeu où l'histoire n'est pas prépondérante voire inexistante, la priorité numéro 1 c'est en premier lieu de montrer au fan qu'on le comprend, qu'on est comme lui, qu'on est pas là pour saloper ses bon souvenirs vidéoludiques. Pas besoin de montrer des trucs intéressants, il suffit de montrer des trucs auxquels il pourra se raccrocher et par simple transfert, transposer le plaisir qu'il a eu à jouer au jeu au résultat filmique.
C'est complètement ce qu'à fait Gans dans son film, avec ses plans de caméra limite caricaturaux, ses clins d'oeil en veux-tu, en voilà. Le fait que quoi qu'il se passe, il n'est pas un instant où l'on doute d'être dans Silent Hill (ces deux mots étant placardés sur la moindre parcelle de surface disponible, et prononcés au moins une fois par dialogue), rajoutant de ci de là des jingles Silent Hill au piano bien sentis à la "hé les copains, vous vous souvenez hein on est dans Silent Hiiiiiiiiiiiiiiiiill" à chaque fois qu'il y a un semblant de vie à l'écran.
Pour moi, Gans a joué la carte de la facilité pour ce film. Le pire dans l'histoire c'est qu'en fait je suis carrément bon public, je suis même allé voir le remake que "Fog" la semaine d'avant, qui lui est un gros navet des familles et pourtant je me suis bien marré. Mais comme je l'ai dit plus tôt, j'ai vraiment beaucoup de mal avec les films suintant l'autosatisfaction.