donc oui, les kadjars sont la dynastie précédant celle des pahlevis, ceux qui ont été virés en 79. En termes d'image, les pahlevis ont traîné une réputation de gros ploucs arrivés, le fondateur de la dynastie dans les années 20 étant un général cosaque, par rapport à leurs prédécesseurs qui ont le prestige d'avoir été la dynastie face à l'empire ottoman, avec tout l'épanouissement artistique et culturel des XVIII et XIX°s, en gros. Marjane est issue de cette famille, qui a pu profiter aussi de l'ouverture sur le monde du pays pendant le XX°s, révolution constitutionnelle de 1906, intérêt pour l'expérience soviétique à partir des années 20, observation et mise en pratique partielle des réalisations kémalistes par les pahlevis, etc... Pa vraiment des bobos, mais un milieu plutôt aisé, ouvert sur le monde, fortement intellectualisé, par opposition au dernier chah, et aux gens plus modestes. Le chah représentait la modernisation autoritaire, sans débat, et assez vulgaire. Ce qui l'a perdu, c'est de se retrouver face à une alliance entre les religieux, les intellectuels, les bazars, et la jeunesse, qui détestaient respectivement son manque de respect pour la religion, son autoritarisme, sa gestion économique, et les coups de botte de la SAVAK (la police politique). Dans le processus révolutionnaire, les intellectuels ont été rapidement dépassés par les religieux, soutenus par les perdants de la modernisation des années précédentes (soit, beaucoup de monde). Marjane Satrapi vient de ce milieu qui a vu un autoritarisme remplacé par la république rigoureuse des religieux, en y perdant la relative libéralisation des moeurs autorisée par le chah, et sans y gagner le bol de soupe que la république a accordé aux plus démunis. C'est triste, mais à l'époque, ça ne représentait pas tant de monde. La suite du roman graphique et du film, après son retour en Iran, sont un retour dans ce milieu, qui s'est adapté tant bien que mal aux nouvelles règles, en profitant des espaces de contournement laissés par le régime. Grossièrement, ça correspond aux quartiers nord de Téhéran, le sud de la ville étant plus modeste, et soutenant bien davantage le régime. Et surtout, il faut prendre en compte le fait qu'il s'agit de regard de "retour". Entretemps, les Iraniens ont vécu l'agression de Saddam, qui, sauf partiellement dans ce milieu, a réveillé un puissant sentiment national. Les conséquences ont varié entre le désespérant et l'atroce, comme elle le montre très bien, l'Iran étant très démuni sauf en hommes face à un Irak surarmé, mais il y a bien eu un profond engagement dans la guerre. J'arrête là, j'ai déjà été trop long et puis ça risquerait de dévier. Pour "les beaux gosses", je ne l'ai pas vu, donc je ne sais pas ce que ça donne. Après, si elle pense que c'était intéressant qu'elle apparaisse dans le film, pourquoi pas ? C'est du travail d'actrice, après tout, pas forcément sa vie.
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