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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 28 Déc 2012 22:05 
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Ce qui me choque le plus ?

Une réal' qui s'appelle Bosch et qui fait un film sur les Juifs...et puis Gad Elmaleh et Jean Reno au casting...c'est Chouchou qui croise le flic de "Wasabi" non mais dans quel monde on vis je vous le demande...


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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 30 Déc 2012 13:15 
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Bon Pote de Godfrey Ho
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C'est comme La traversée de Paris... Le corniaud qui partage la vedette avec Le tatoué et le gendarme de St Tropez, c'est sûrement naze...

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"Godfrey Ho a beau avoir trouvé des Kickboxeurs américains, le duel entre la mariée et la robe restera LA baston du film." Plissken


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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 07 Fév 2013 1:14 
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Bon Pote de Godfrey Ho
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Petite critique à froid mais je dois dire que même plusieurs mois après le visionnage, le souvenir de ce film reste un supplice, peut-être le plus mauvais film - sérieux au budget permettant d'aller au bout de son idée - que j'ai pu voir sur la Shoah (mais en même temps, je n'ai pas vu The day the clown cried de Jerry Lewis qui traîne une sale réputation chez les très très rares personnes qui ont pu le voir). Pour qu'il soit réussi, il aurait fallu que ce film, par son scénario et sa réalisation, nous fasse prendre conscience d'une souffrance, d'une cruauté et d'une injustice qui ont eu lieu dans des rues que nous arpentons tous les jours et dont nous n'avions jusque là pas conscience. La Rafle, c'est presque l'inverse : si on est parfois émus, c'est pas grâce au film mais malgré lui, c'est parce que parfois, en dépit d'un travail d'écriture et de réalisation ratés et grâce à une vraie documentation et un professionnalisme technique qui sauvent quelques scènes, parfois donc, on se souvient que tout ça, ça a vraiment existé. Mais c'est un sentiment indépendant de l'histoire du film et pour quelques moments de prises de conscience, beaucoup de maladresses qui, s'accumulant, nous amènent peu à peu à rejeter ce film après quelques minutes passées à se dire "oui, c'est un peu maladroit mais le sujet est important...". Au bout d'un moment c'est trop et on devient furieux contre un film inattaquable quant à son sujet mais indéfendable quant à son traitement. Parce que ça fait bizarre de descendre à ce point un film qui montre la mort de milliers de personnes mais un événement aussi tragique ne peut se contenter d'un film aussi médiocre, quitte à passer, en le disant, pour un individu amputé de l'empathie et donc pour un nazi potentiel selon les propres termes de la réalisatrice du film.


Alors qu’est ce qui ne fonctionne pas dans La Rafle ? Commençons par les dialogues, d’une platitude confondante quand ils ne constituent pas un catalogue de plaisanteries particulièrement éculées parce que oui bon c’est un drame mais ces petites plaisanteries permettent d’humaniser les personnages principaux, ce qui ne rendra que plus horrible le sort qui leur est réservé. Nous relèverons donc dans le genre blagues carambar :

- Hitler y croit que c’est notre peuple qui a coulé le Titanic ! « Iceberg, encore un juif ! »
- L’épicière, elle n’aime que les bon aryens (jeu de mot !)
- « Je peux pas venir avec toi, j’ai une hernie » « ben elle a qu’à venir avec nous » (était-ce bien la peine de caser cette réplique dix minutes avant que les enfants montent dans les convois de la mort ?)

Ajoutez à ça un passage où on entend un enfant dire le mot "pestacle" et on comprend que dialoguiste, c'est un vrai métier, qui n'est pas à la portée de n'importe qui.

Notons ensuite que si l’idée de raconter heure par heure le calvaire enduré par les juifs de Paris n’était en elle-même pas mauvaise et même vraiment bonne, Rose Bosch annihile elle-même toute escalade dans l’horreur en parsemant ça et là de courts passages mettant en scène Pétain, Laval et même Hitler dans la désormais fameuse scène du gâteau avec figurine de pâte d’amande en forme de lui. Encore une fois, idée pas mauvaise de confronter la réalité dure et sale des juifs opprimés à l’univers aseptisé des puissants complètement déconnectés de l’extérieur, pour qui ces hommes, femmes et enfants ne sont que des chiffres mais cette idée est complètement contre-productive face au parti-pris scénaristique principal. Principe de base d’écriture scénaristique : une idée n’est bonne que par rapport à la stucture dans laquelle elle est sensée s'insérer. Et puis, il faut que la réalisation suive et donne à ces scènes une froideur et un cynisme moins caricatural que "seulement X milliers? C'est pas assez !".

Puisqu’on parle du scénario, rappelons la façon dont il est traité : du point de vue des enfants. On comprend l’intention de la réalisatrice qui est avant tout de mettre en face de la plus grande barbarie les êtres les plus purs, les plus innocents, qui ne COMPRENNENT PAS mais dont la candeur et la naïveté les rend parfois, tel le mythe du bon sauvage, beaucoup plus adultes que les adultes eux-mêmes dans leur façon de poser les vrais questions et de dénoncer l’absurdité du monde dans lequel ils vivent. Là, vient s’ajouter aux blagues carambars évoquées plus haut une tendance à ressortir des vérités fondamentales qui non seulement sont à la limite de la brève de comptoir mais en plus sonneraient déjà faux dans une comédie familiale américaine des années 80. Ainsi, si nous est épargné le discours bien connu « Eh, eh les gars, j’ai réfléchi à un truc les mecs. Hitler, y voulait que tout l’monde y soye grand, blond aux yeux bleus, alors que... Attends attends... Alors que lui, tenez-vous bien... Lui en fait il était petit... brun... et aux yeux noir ! Ben... ben ça veut dire qu’il est con, non ? » (revoir Le dictateur pour une version plus subtile de ce discours), on a quand même droit à « Ouais mais tu vois, les chrétiens y veulent nous tuer pasqu’on est juif, mais y a un truc auquel y z’ont pas pensé, C’EST QUE JESUS, IL ETAIT JUIF ! » Truc de ouf.

Donc, les enfants sont innocents. Dans les mains de Rose Bosch, cette idée, surexploitée, devient une sorte de justification scénaristique extrêmement lourdingue, qui tient plus de la paresse scénaristique que du parti-pris narratif et on nous rappelle tellement souvent que « voyez-vous, c’est parce qu’ils ne comprennent pas » qu’on finit par les voir plus comme des gros boulets que comme de pauvres petites choses perdues dans un monde de brutes. Là on se trouve clairement dans la situation où je me sens assez mal à l’aise d’écrire quelque chose comme ça parce que par exemple la scène où une voisine tente de sauver des enfants juifs en les faisant passer pour les siens avant que ceux-ci tendent les bras vers leur vraie mère en criant « maman ! » sous les yeux des nazis, c’est vraiment arrivé mais ressassé encore et encore dans le film, c’est très très très lourd. Du coup, quand pour la 36e fois on nous fait le coup avec le gamin qui mange un bout de pain et crache un charançon devant un policier qui passait par là et lui colle une baffe parce qu’il a cru que c’était un geste de défiance, ben ça fait trop et ça détruit totalement une idée qui aurait pu être incroyablement poignante et aurait trouvé son point d’orgue avec ce petit garçon qui part en courant vers le camion qui l’emmène vers la mort parce qu’il croit qu’il va retrouver sa mère (morte hors champs au début du film).

Par exemple, dans Les Uns et Les Autres de Claude Lelouch, il y a une scène formidable où un couple juif sort de son immeuble sous escorte nazie, et leur enfant sort d’un meuble où ils l’avaient caché en demandant, comme s'il venait d'interrompre une partie de cache-cache : « Vous allez où ? ». Les parents l’étreignent dans un sourire triste et ils partent ensemble pour les camps. Tout est dit. Le scénario de La Rafle, c’est un peu la version voiture de clown de cette scène, soit trente variations autour de cette même tragique naïveté des enfants.

Venons-en maintenant au casting. Je ne sais pas si vous l’avez remarqué mais ce qui est irritant dans ce film c’est que tout le casting de têtes connus joue soit des victimes soit des gens formidables (Denis Ménochet, ça compte pas vu qu’il était moyen connu à l’époque du tournage). Passons sur Gad Elmaleh pour qui « faire son Tchao Pantin » signifie juste jouer sans intonation et sans expression faciale, mettons de côté Mélanie Laurent qui a toujours une fâcheuse tendance à confondre émotion et spasmophilie et qui, tout au long du film, se lance dans un triathlon de soutien aux déportés Je cours/Je fais du vélo/je me noie dans les bons sentiments.

A part ça, nous pouvons constater que la moitié des acteurs du cinéma français s’est donné rendez-vous ici récupérer sa carte de comédien humaniste. Ca va de Jean Reno tellement impliqué dans son rôle de médecin juif prêt à tout pour soulager les souffrances de son peuple qu’il en oublie de donner de l’intonation à sa voix quand il balance ses répliques, à Thierry Frémont en chef des pompiers qui dit, droit dans ses bottes et dans les yeux du chef des policiers « ce que vous faites est indigne ! ». Lors de l’avant-première, cette réplique a certainement provoqué une Ola spontanée du public, parce que c’est vrai que le comportement des figurants qui jouent les policiers et les miliciens aux faciès marqués par la haine était indigne, heureusement qu’il y avait des stars qui passaient par là pour leur faire remarquer. Laissez-moi vous dire que moi, à cette époque, j’aurais fait pareil ! (Tout ça pour dire que si on part du principe que le public aime à s’identifier aux stars et que celles-ci n’ont dans ce film que les bons rôles, on en viendrait presque à remettre en question la volonté des auteurs du film de chercher à relancer un débat comme « et vous à l’époque, qu’auriez-vous fait ? »)

Pour finir sur ce chapitre, rappelons que l’un des effets pervers de cette pipolisation du casting fut de transformer l’avant-première du film en événement mondain, Gad Elmaleh ayant très judicieusement choisi d’officialiser lors de cette soirée sa relation avec Marie Drucker. Le lendemain, les magazines people ne parlaient que de ça, on aurait oublié de projeter le film que ça aurait gêné personne… (oui, j'exagère un brin...)

Si la rumeur courait déjà depuis quelques mois, les clichés pris ce lundi 8 mars 2010, à l'occasion de l'avant-première du film La Rafle, semblent lever tous les doutes.
Gad Elmaleh et Marie Drucker ont en effet décidé de sauter le pas en s'affichant officiellement devant les objectifs et les caméras, multipliant les gestes tendres et complices.

Arrivés main dans la main, le Chouchou du public français et la nièce de l'animateur Michel Drucker ont accepté de poser ensemble devant les photographes, s'échangeant tour à tour de petits baisers appuyés sur la joue (photo) et dévoilant ainsi au grand jour leur belle romance.


Pourtant, le film ne démarrait pas si mal avec cette scène du soldat allemand qui filme Montmartre, tourne sa caméra vers un petit enfant avant de réaliser que celui-ci a une étoile jaune cousue sur sa veste. Mais passée cette scène, on entre direct dans le tout blanc ou tout noir avec les amis goys des juifs qui sont solidaires et ouvrent leur gueule devant les allemands quand c’est pas à l’extrême inverse l’épicière à sa fenêtre qui crie comme une folle « Ah ah, bien fait pour eux ! » quand les juifs sont déportés. Quand on assiste à ça, on a peine à croire que Rose Bosch fut la scénariste du 1492, Christophe Colomb de Ridley Scott. En effet, si c’est pas vraiment le meilleur film de Scott, il y avait quand même une intelligence d’écriture et une ampleur dans le récit qui font ici cruellement défaut tant s’accumulent les facilités voire les incohérences.

Rien que cette scène finale au cours de laquelle Mélanie Laurent retrouve coup sur coup, juste le temps de se retourner, deux de ses anciens protégés histoire de dire « elle va pouvoir trouver le repos, elle qui a tant donné pour tous ces gens », ou alors Gad Elmaleh dont le rôle se limite à jouer le gars qui n’y croit pas puis à faire le gars qui ne veut pas croire avant de faire le gars qui aurait peut-être dû y croire, pour finir avec ce gros plan sur le regard caméra d’un enfant « aux yeux qui en ont tant vu qu’ils sont devenus gris » (P. Desproges), on se dit qu’on se trouve quand même là face à un cas d’école. Rose Bosch pensait qu'il était important de faire un film sur la rafle du vél d'hiv', après avoir vu La Rafle, on continue à attendre le film en question.

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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 07 Fév 2013 2:04 
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je ne peux que suivre deathtripper dans son analyse, sur la profonde gêne que m'a laissé ce film. Même si certaines critiques de l'époque sont il me semble allées trop loin, en ressortant le débat sur "kapo", et en insistant trop lourdement sur la question de l'émotion face au génocide, étant donné qu'à mon sens, l'émotion n'est pas forcément à éviter, mais là, effectivement, avec conviction et bonnes intentions rose bosch a parfaitement réussi à passer à côté de son histoire. J'ai été profondément heurté par le côté tire-larme de la chose, ce qui rejoint la surexploitation du point de vue enfantin que soulignait deathtripper, et le fait d'être ému et de (tenter de) réfléchir malgré le film plus que grâce à lui. On a un film-somme, où il y a tout ou presque, l'argent, le casting, les décors, les événements, et où finalement, on arrive avec une vue presque trop rose de la shoah, ce qui, là, devient, terriblement angoissant : bien sûr qu'il est nécessaire de respirer parfois, mais ces passages plus légers restent insupportables, comme le simili happy-end, que j'aurais tendance à trouver presque insultant. l'humanisme est une belle chose, mais pas facile : et là, le public, les acteurs, se voient offrir une belle conscience humaniste à bien trop peu de frais. Finalement, comme le monde l'avait souligné à l'époque, la shoah apparaît comme un mauvais rêve de nono, le gamin, et on retrouve une belle France réunifiée, quand justement, un des enjeux était de montrer l'infinie variété des nuances, des comportements, des attitudes, des états d'esprit. Non, on a simplement un conte sur fond de génocide qui oppose vie et mort, bons et mauvais, espoir et négation, en tombant dans un travers qui se retrouve de plus en plus dans les films traitant de cette période, il me semble, génocide, mais aussi résistance (l'armée du crime, les femmes de l'ombre par exemple). En voulant faire oeuvre de mémoire, on fait oeuvre de reconstruction, et ça me semble quelque peu préoccupant.
A propos de ce film, sinon, je garde en mémoire un séminaire de recherche avec certains des meilleurs connaisseurs de la période dont l'un, homme plutôt sympathique, mesuré, et profondément impliqué dans son sujet n'avait pas pu s'empêcher de lâcher un "quelle merde" assez lapidaire, assez inattendu chez lui aussi. Dans le même temps, en discutant avec certains de mes étudiants, j'ai pu voir que, à l'évocation de cette période, c'est le premier film qui leur venait à l'esprit, ce qu'ils connaissaient, et partant, à partir de quoi ils appréhendaient la shoah. Encore une fois, si les intentions étaient bonnes chez la réalisatrice, le résultat est assez consternant, en ce qu'il facilite aussi chez le public-cible, celui qu'on veut éduquer, celui chez qui on veut maintenir la mémoire de l'événement, les raccourcis, les facilités, et devant la piètre qualité de l'objet, prendre le risque aussi, finalement, de la dérision, quand ce n'est pas du refus de l'événement, alors que c'est simplement le récit qui est mauvais. Dans le même temps, c'est ce qui venait à l'esprit des étudiants parce que c'était le dernier film à grande diffusion sur le sujet, et il faut parier que le prochain le remplacera. En espérant alors que le prochain sera meilleur, vraiment meilleur.


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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 07 Fév 2013 12:52 
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En fait, plus j'y pense, plus je me dis que ce qui pose problème d'emblée par rapport à ce film, c'est finalement un certain manque de distance par rapport à son sujet. Comme tu le dis, je ne doute pas de la sincérité de Rose Bosch dans sa volonté d'aborder un sujet aussi grave et je ne pense pas non plus qu'il s'agisse d'une entreprise cynique, d'un film volontairement bâclé parce que "le sujet est important donc les gens iront le voir". Le scénario s'appuie apparemment sur une documentation importante vis-à-vis des faits et c'est peut-être bien là le problème.

Tout dans le making of du film (oui, j'ai regardé ça aussi) ainsi que dans les déclarations de Rose Bosch à la sortie du film, montre que c'est une personne à la sensibilité à fleur de peau, qui démarre au quart de tour quand elle se trouve face à l'injustice et on comprend qu'un sujet pareil l'ait touchée, qu'elle ait eu besoin d'en parler, tout comme ça peut justifier en un sens ses débordements au moment de la sortie du film car quand on a mis tout son coeur dans un sujet, surtout rapportant des faits réels qui nous ont certainement fait passer de nombreuses nuits blanches, comment accepter qu'on vienne nous dire que notre film est bâclé? Et quand on se sent à ce point concerné, habité par un sujet, on se l'approprie, on refuse d'emblée de s'en détacher et on pense être la seule personne capable d'en parler tant il résonne en nous, l'orgueil d'auteur rejoignant la sensibilité artistique. Une telle sensibilité, un tel besoin de témoigner peut aveugler, mais sans nécessairement donner des résultats médiocre.

On ne peut pas reprocher à Rose Bosch d'avoir voulu parler de la Rafle du Vél' d'Hiv' mais, désolé pour elle, un sujet important ne te métamorphose pas du jour au lendemain de scénariste moyen (d'accord il y a eu Christophe Colomb mais il y a 20 ans, ont suivis les plus dispensables Le pacte du silence et Bimboland) en auteur dramatique de génie pas plus qu'il ne change un réalisateur débutant (La Rafle est le second film de Rose Bosch après le moyen Animal) en cinéaste brillant. Enfin ça arrive que, porté par son sujet, un auteur jusqu'ici inexistant se révèle brillant, mais c'est loin d'être une science exacte.

Si l'importance de son sujet a aveuglé Rose Bosch quant à ses capacités à lui rendre justice, je pense qu'il en a été de même pour une partie du reste de l'équipe. Voir une personne à ce point concerné par son propos, ça peut faire oublier bien des lacunes du scénario, tant son auteure nous en a parlé avec passion et conviction. Après tout, ça n'aurait pas été la première histoire qui, portée par la conviction de son équipe, transcende son scénario et fait passer les répétitions et maladresses comme une lettre à la poste. Ca n'excuse pas tout mais ça explique pas mal de choses, je pense.

Au final, quand je pense au scénario de La Rafle, ça me fait penser à ce qui se passe quand on est témoin d'une injustice dans la vie de tous les jours (une agression dans le métro, une humiliation au bureau...) : d'abord impuissant, on va ensuite rentrer chez soi révolté, les images tournant et retournant dans notre tête et on va se sentir obligé de tout raconter à nos proches, en forçant, en grossissant le trait à la hauteur de la révolte ordinaire que ça nous inspire, l'agresseur devenant un monstre sanguinaire sans états d'âme et l'agressé une pauvre victime sans défense malmenée par ce que l'homme a de plus abject. Et ceux qui nous écoutent, embarqués dans notre discours, ne peuvent qu'être révoltés à leur tour et on se met tous d'accord pour décréter que "non mais j'te jure, y a des gens...".

Après, bien sûr que la rafle du Vél d'Hiv constitue un des événements les plus tragiques et traumatisants de notre histoire mais pour lui rendre justice, il aurait sans doute fallu à une personne comme Rose Bosch accepter de s'en détacher, de poser dessus un regard moins directement révolté, habité par la souffrance de ceux qui l'ont vécu, pour en déceler les faiblesses d'écriture. Difficile, voire impossible... En fait, le gros problème du film n'est peut-être pas sa réalisatrice en elle-même car après tout comme le disait Tim Burton dans son commentaire audio d'Ed Wood, chaque scénariste/réalisateur qui se respecte doit être persuadé qu'il est en train de tourner le meilleur film du Monde, le problème c'est sans doute qu'on l'a laissée aller jusqu'au bout de son "délire" sans rien remettre en question (j'avoue avoir pensé une demie seconde à faire un parallèle douteux en écrivant cette fin de phrase :? ). Encore une fois, des films écrits comme ça, à fleur de peau, ça peut donner des chefs-d'oeuvre, mais la sincérité dans l'expression artistique ne fait pas tout et peut même conduire à l'inverse.

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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 07 Fév 2013 13:43 
Visiblement elle a choisi de traiter ça uniquement sous un angle franco-français (sans les nazis donc), ben pourquoi pas!
Mais fallait jouer la carte à fond, montrer l'ambiguité des français de l'époque, cela aurait été plus intéressant de traiter le comment en est-on arrivé à cette Rafle.
Tout ce qui suit le Vélodrome, c'est à dire l'internement au camp de Beaune est ridicule, le camp ressemble plus à une colonie de vacances, il fait beau, les enfants s'amusent,
on se demande même comment Mélanie Laurent en vient à aller demander au préfet plus de personnels médical, vu que tout se passe si bien, en plus la scène où elle rencontre le préfet est affligeante, elle lui demande des renforts, il répond, non et voilà c'est finit ^^, on passe à autre chose (on est très loin des scènes où Liam Neeson tente de négocier avec l'administration nazi...) ce film est ponctué de petites scènes toutes plus niaises que les autres.
La scène où Thierry Frémont en pompier arrive au Vélodrome, je n'y ai pas cru, j'ai cru que c'était les juifs enfermés qui organisaient un spectacle pour distraire les enfants, tellement c'était grotesque et caricatural.

A sa décharge, on ne peut pas comparer la situation des juifs en France et ceux des pays de l'Est, même si leur sort fut le même, il n'y pas de ghetto en France, les juifs dans les camps de transit ont été relativement bien traités, loin des humiliations extrêmes qu'ont pu subir ceux de Pologne et d'Ukraine sans compter les viols, tortures, exécutions...

Elle aurait pu avoir un personnage de référence qui soit un policier français qui oscille entre officier zélé qui obéit aux ordres dans un premier temps et qui dans un second va tenter de sauver quelques juifs ou de saboter le travail, plutôt que la gentille infirmière qui fatalement à des moyens plus que limités, un méchant milicien zélé qui aurait pu servir de référence dans le mal.

Ce film est plus une petite chronique d'une famille juive prise dans la rafle,
elle aurait du vendre son film comme tel au lieu de vendre ça comme une fresque grandiose sur la page noire de l'Histoire de France que fut la Rafle du Vel' d'Hiv', cela serait surement mieux passé et aurait été plus honnête...


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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 08 Fév 2013 1:03 
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effectivement, il y a eu une documentation importante, en tout cas, c'est bien le but recherché, de faire en sorte que tous les événements qui apparaissent puissent trouver leur référence dans cette documentation, même s'ils ont été traités artistiquement, et, il me semble à moi aussi que c'est là que quelque chose pèche. Documentation ne donne pas forcément perspective, ni idée, c'est juste le début, et c'est un métier à part entière de tirer quelque chose d'une documentation. En l'occurrence, c'est d'un regard critique, d'un recul, d'une mise en perspective qui a manqué, avant de passer directement au traitement artistique. Tel quel, dans sa tonalité, et profondément, je crois que c'est ce qui me gêne le plus, on a un résultat assez proche du "vivre avec les loups", sur la même période, avec un traitement parallèle, et une réalisatrice également extrêmement impliquée, volontaire, touchée par l'injustice et qui tient à faire passer un propos qu'elle ressent comme essentiel. L'ennui, c'est que "vivre avec les loups" s'est révélé être un hoax et qu'on a appris après coup que les historiens avaient senti qu'il y avait quelque chose de pas net dans ce récit, en dépit même de la documentation : trop de trous, trop de jolies choses. Et tandis qu'ici on a affaire à quelque chose de bien réel, irréfutable, on arrive à un présentation proche. Tel quel, ça reste un souci.


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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 08 Fév 2013 11:46 
Pour répondre à deathtripper21 (j'ai la flemme de citer), dire que c'est par ce que le sujet l'a particulièrement marqué et que donc cela l'a aveuglé pour faire un film correct, c'est un peu, beaucoup abusé, que devrait dire alors Spielberg, Polanski Adrian Brody qui eux sont juifs (on peut penser que le sujet les a particulièrement marqué quand même) et ont pourtant admirablement réussi leur film sur la Shoah,
Gad Elmaleh (que je trouve plutôt bon sur scène) ne semble guère être concerné dans le film, certes il est juif sépharade (beaucoup moins touchés par la Shoah que les Ashkénazes, qui eux ont quasiment été anéanti, pareil pour la rafle, je n'ai pas les % mais les juifs pris dans la rafle doivent au moins au 4/5 Ashkénaze) donc il a pu se sentir un peu moins concerné qu' Adrian Brody mais quand même, on ne peut pas dire qu'il a brillé dans le film.


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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 12 Fév 2013 21:40 
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Merci de bien relire mon post, c'est pas vraiment ça que je dis... :wink:

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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 09 Avr 2013 22:46 
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Pan, la justice tape une seconde fois dans les dents de Rose Bosch en appel:

http://www.pcinpact.com/news/78905-la-realisatrice-la-rafle-echoue-a-faire-taire-critique-sur-overblog.htm

Il serait temps qu'elle commence enfin à comprendre qu'on peut la critiquer elle et son film sans être d'infâmes nazis néocyniques de le internet! :-D

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Sbel a écrit:
le Mengeance est un film qui se voit froid (moi je l'ai vu cuit, parce que j'avais un peu bu)


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 Sujet du message: Re: La rafle. Roselyne Bosch, 10/03/10
MessagePublié: 10 Avr 2013 0:21 
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Je n'ai pas vu La Rafle. La bande-annonce, dégoulinante de clichés, m'avait suffi.

Roselyne Bosch n'était pas réalisatrice à la base. Elle était productrice et scénariste aux côtés de son mari, sur 1492 : Christophe Colomb et d'autres productions moins prestigieuses. Elle a réalisé elle-même le film parce qu'elle ne trouvait personne d'autre qui voulait tourner un sujet pareil.

Ce que la bande-annonce m'avait certifié, c'est que c'est un film conçu sur mesure pour être passé aux élèves de 3ème quand les profs d'histoire-géo veulent organiser une sortie ou échapper à deux heures de cours. C'est académique, hyper-consensuel, bourré de bons sentiments, avec l'erreur fatale de vouloir faire un film sur le Vél d'Hiv comme Grand Sujet avec une histoire à côté pour que ça soit plus digeste, là où il est beaucoup plus efficace de raconter une histoire intéressante qui s'avère ensuite rencontrer l'Histoire avec un grand H

Et il y a eu d'autres films parlant du Vél d'Hiv. Outre Monsieur Klein (bourré d'approximations au niveau des détails), il y avait aussi eu en 1974 Les Guichets du Louvre.

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